Budget 2021 : le retour en force des comptes spéciaux du Trésor
Après une forte baisse constatée au cours des cinq dernières années, les comptes spéciaux du Trésor refont surface. Les comptes d’affectation spéciale continuent toutefois à prédominer.
La mise en conformité du Budget de l’État avec les normes imposées par la loi organique de Finances, en vue de réduire le nombre de comptes spéciaux du Trésor (CST), devra prendre en considération les circonstances exceptionnelles que connaît le pays. C’est ce qui ressort de l’état des lieux élaboré par l’Exécutif, afin de faire des comptes d’affectation spéciale (CAS) un véritable levier stratégique pour les secteurs touchés par la crise. Il faut dire que le recours aux CST se justifie essentiellement par la souplesse de leurs procédures de gestion, notamment la possibilité de les créer au cours de l’année budgétaire, assortie de programmes d’emploi adaptés au domaine d’intervention du compte. «Cette importance s’est confirmée dans ce contexte marqué par la pandémie de Covid-19, avec la création de deux CAS destinés au financement et à la mise en œuvre des actions devant limiter les impacts de la crise», souligne le diagnostic de l’Exécutif.
Les données chiffrées
Le nombre des comptes spéciaux du Trésor a enregistré une forte baisse en 2019, passant de 156 (en 2018) à 67, avant de remonter à 69 en 2020. Cela est dû à la création de 4 comptes d’affectation spéciale relatifs à la promotion de l’éducation et à la création d’un Fonds d’appui à l’entrepreneuriat. Deux comptes spéciaux ont en revanche été supprimés; ils étaient liés aux prêts à l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE) et au compte des prêts aux régies de distribution d’eau et d’électricité. L’analyse de la répartition du nombre de CST en 2020, par catégorie de comptes, montre la prédominance des CAS, au nombre de 56 (sur les 69 comptes non concernés par les suppressions). «Cette augmentation de la part des CAS dénote un changement majeur au niveau de la structure des CST», indique le bilan gouvernemental. À noter que les comptes de financement et d’adhésion aux organismes internationaux ont connu une baisse considérable, n’étant plus que sept dans le projet de loi de Finances (PLF) 2021.
En matière de gestion des comptes, le département des Finances se taille la part du lion, avec le statut d’ordonnateur qui lui est conféré pour 26 comptes spéciaux, suivi du ministère de l’Intérieur qui gère directement neuf comptes spéciaux. L’évolution des ressources et des plafonds de charges des CAS pour la période 2017-2019 montre, quant à elle, que les prévisions y afférentes ont connu une relative stabilité durant les trois dernières années, sans oublier qu’au cours de la même période, le plafond des charges des CAS a maintenu son trend haussier. Cette évolution positive s’explique par la renforcement des actions financées par le Fonds spécial relatif au produit des parts d’impôts affectées aux régions, ainsi qu’à l’accompagnement des réformes du transport routier urbain. S’agissant des dotations budgétaires versées aux CAS, le bilan du gouvernement indique qu’elles ont dépassé les 21,8 MMDH avec, parmi les premiers domaines financés, le Fonds pour le développement rural et des zones de montagne, le Fonds de développement agricole et le Fonds de soutien à l’Initiative nationale de développement humain (INDH).
Le souci de l’efficience
Le choix stratégique de revoir à la baisse le nombre de comptes spéciaux du Trésor dans le projet de Budget se confirme. Le gouvernement cherche avant tout à rationaliser la gestion des comptes spéciaux, afin d’assurer leur efficience dans la réalisation des grands projets et la lutte contre les disparités spatiales. L’encours total des comptes de financement a, en effet, pratiquement doublé durant les trois dernières années, et ce sont les projets liés au développement territorial qui arrivent en tête des domaines investis par les comptes spéciaux (36%) pour un montant dépassant les 34 MMDH. La liste des actions menées via les CST indique aussi le financement des projets d’infrastructures qui ont bénéficié de plus de 7,8 MMDH, ainsi que des projets agricoles et de la pêche qui représentent plus de 8% des charges supportées par les CST. La logique qui prévaut actuellement, qu’il s’agisse de la suppression ou de la création de nouveaux CST, consiste en un déploiement des stratégies sectorielles et en la prise en charge de certains programmes prioritaires, mais aussi en l’évaluation budgétaire et comptable, dans un deuxième temps, des comptes d’affectation spéciale selon les normes d’analyse des ressources et des charges réalisées par ces comptes.
Younes Bennajah / Les Inspirations Éco