Réseaux sociaux : Elon Musk dangereux pour Twitter ?
La plateforme cherche une parade face à l’OPA hostile lancée par le milliardaire américain. Ses membres préfèrent brader les actions pour tous les autres actionnaires, et ainsi renchérir le prix pour Elon Musk, que d’accepter son offre.
Sans nul doute Twitter est resté le Petit Poucet des géants de la tech en termes de revenus, mais il n’accueille pas pour autant à bras ouverts les dollars d’Elon Musk, signe que le fossé s’est creusé entre la Silicon Valley et l’homme le plus riche du monde. La croissance de la plateforme déçoit régulièrement, et ses revenus publicitaires sont restés inversement proportionnels à sa renommée.
Quand le patron de Tesla a proposé la semaine dernière d’acquérir Twitter à un prix qui la valoriserait à plus de 43 milliards de dollars (contre environ 36 milliards à l’heure actuelle), l’action de la plateforme a décollé à Wall Street. Mais le conseil d’administration (CA) a répondu en adoptant une clause dite de la «pilule empoisonnée»: ses membres préfèrent brader les actions pour tous les autres actionnaires, et ainsi renchérir le prix pour Elon Musk, que d’accepter son offre.
Cette réaction est en partie «viscérale», explique Roger Kay, de Endpoint Technologies Associates. Le milliardaire «tourne en ridicule les gens qui ne sont pas d’accord avec lui. Il a tout de l’autocrate», détaille l’analyste. Or le CA est constitué de «personnes qui ont l’habitude d’avoir leur mot à dire», continue-t-il.
«Elles risqueraient d’être réduites à des rôles subalternes». Elon Musk, friand des provocations sur Twitter, a déclaré que les membres du CA ne seraient plus payés si son OPA hostile réussit, pour économiser 3 millions de dollars par an.
Visions opposées
L’entrepreneur aux idées libertaires considère la plateforme comme la place publique essentielle à la démocratie dans le monde, une vision que partagent de nombreux observateurs et élus. Mais ses projets pour «débloquer son potentiel» angoissent les utilisateurs, employés et dirigeants affiliés à la gauche de l’échiquier politique. «Il y a une pincée d’extrême droite dans ses opinions, et du sexisme, entre autres», estime Roger Kay.
La Californie a accusé en février l’usine Tesla de Fremont, dans la Silicon Valley, de «ségrégation raciale». Plusieurs femmes se sont plaintes de harcèlement dans des entreprises du magnat. Et Elon Musk a déménagé fin 2021 le siège de Tesla au Texas, État majoritairement républicain qui a adopté une loi particulièrement restrictive sur l’avortement. Mais pour ses fans, c’est un entrepreneur culotté, qui fait rêver avec le succès de ses voitures électriques et son autre fleuron, SpaceX.
Elon Musk désire une modération des contenus plus transparente et beaucoup moins sévère. Il fait ainsi saliver les conservateurs qui se sentent censurés, notamment les partisans de l’ex-président Donald Trump, banni du site après avoir été accusé d’incitation à la violence. Mais pour la gauche, le réseau est au contraire déjà trop tolérant vis-à-vis de la désinformation et des discours de haine.
Sami Nemli avec Agence / Les Inspirations ÉCO