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Monnaie & change : le rouble, redoutable arme monétaire russe malgré les sanctions

Six mois de guerre ; six mois de sanctions économiques pour la Russie. Si le rouble s’est fortement déprécié au début de la guerre, il a effectué un redressement historique, grâce aux mesures prises par Moscou et par la Banque centrale russe. Certains dirigeants et économistes européens pariaient sur un effondrement économique de la Russie. Pour l’instant, il n’en est rien et c’est en grande partie grâce à la bonne tenue du rouble. 

Des taux d’intérêt réajustés chaque jour, par la Banque centrale russe, ont permis d’éviter les dérapages de la monnaie nationale. Certes, l’inflation est importante, avec environ 17%, mais très loin des catastrophes envisagées quand les paquets de sanctions économiques occidentales tombaient semaine après semaine. En mars, la Banque centrale russe, sous l’impulsion de sa gouverneure Elvira Nabioullina, commençait d’augmenter les taux d’intérêt, favorisant ainsi un rebond du rouble qui s’était effondré après le début de la guerre. «Ils ont également imposé aux acheteurs de gaz et de pétrole russe le fait de commercer en rouble, explique Philippe Crevel, économiste et directeur du Cercle de l’épargne à Paris. Ça a permis d’accroître la demande en rouble, et donc de faire remonter son cours. D’autant plus que les prix du baril de pétrole et du gaz ont atteint des sommets, il faut donc beaucoup de roubles. Ça alimente ce phénomène haussier».

Une récession sévère en 2022
Cet été, le rouble était un peu trop haut par rapport à l’euro et au dollar, mais en jouant habilement sur le marché des changes, et surtout grâce au contexte international de matières premières chères, les autorités russes s’en sortent une nouvelle fois. «Tous les jours, ils précisent les taux d’intérêt en fonction de l’inflation et d’objectifs politiques. C’est une façon pour eux de matérialiser la force et la résilience de l’économie russe», décrypte Philippe Crevel. Avec 60 roubles pour un dollar américain, le taux de change optimal souhaité par Moscou n’est plus si loin. Mais tout cela reste très fragile et cette extrême volatilité du rouble pourrait avoir des effets désastreux en cas d’importante dépréciation. «Le rouble va rester fortement volatile, en fonction de la guerre et du cours des matières premières et de l’énergie, poursuit Philippe Crevel. Pour les entreprises russes qui importent et exportent, cela peut avoir des conséquences majeures, d’autant que la Russie devrait connaître une récession de 10 à 15% cette année».

Le gaz, un levier contre l’Europe
L’autre arme de Moscou, c’est le gaz. Il représente 45% des importations de gaz de l’Union européenne et il est en constante augmentation. En Allemagne, par exemple, les coûts de l’énergie ont grimpé de 105% en un an. Avant l’automne, les Russes gardent plus que jamais la main sur le prix du gaz. L’interruption des livraisons, via le gazoduc Nord Stream 1 pour maintenance, en début de semaine a provoqué une nouvelle flambée (+20% pour le gaz livré à Rotterdam). Depuis six mois, la Russie fait monter les prix et ils pourraient encore augmenter de 60% d’ici à l’hiver, avertit Gazprom. La compagnie joue sur du velours dans cette bataille du gaz. La baisse des volumes exportés est largement compensée par la hausse des prix. Comment stopper cette dépendance au gaz russe ? L’UE a un plan pour s’en affranchir d’ici à 2027. En attendant, certains pays comme la Bulgarie se retrouvent piégés. Sofia avait dans un premier temps refusé de payer en rouble, espérant pouvoir compter sur le seul gaz azerbaïdjanais. Mais lundi, volte-face ! La Bulgarie s’est dite prête à reprendre les négociations avec Gazprom par crainte de pénuries cet hiver.

Sami Nemli avec agences / Les Inspirations ÉCO


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