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Banques africaines : la productivité, le nouveau mot d’ordre

2022 a été une année charnière pour les banques africaines, elle était aussi celle de la croissance. L’étude réalisée par McKinsey invite les banques africaines à viser des gains de productivité de l’ordre de 25 à 30%.

Si les banques africaines souhaitent renouer avec une rentabilité supérieure aux coûts des fonds propres, elles devront se pencher davantage sur la productivité. C’est ce que confirme une récente étude du cabinet international McKinsey. Face à un contexte économique plus complexe, les banques africaines se doivent donc d’accroître leur productivité, pour améliorer leur compétitivité, renforcer leur résilience et offrir une meilleure proposition de valeur à leurs clients.

Dans son analyse, McKinsey démontre que la rentabilité des cinq plus grands marchés bancaires du continent, à savoir l’Afrique du Sud, l’Égypte, le Kenya, le Maroc et le Nigéria, a connu un déclin constant, avec une baisse moyenne de 2% au cours des six dernières années. L’Égypte a connu la plus forte baisse (9,5%) en termes de rentabilité, suivie de l’Afrique du Sud (2,7%).

Par ailleurs, le Nigéria est la seule grande économie africaine à avoir connu une augmentation de son ROE bancaire depuis 2016 (3,6%), sous l’effet d’une baisse du coût du risque suite aux réformes économiques du Nigéria après la récession de 2015-2016, mais aussi de la reprise partielle des prix du pétrole. François Jurd de Girancourt, directeur associé du bureau de McKinsey à Casablanca qui dirige le pôle de compétences Institutions financières de McKinsey en Afrique, explique que «les banques africaines sont coûteuses à gérer : elles possèdent un ratio coût/actif moyen compris entre 4 et 5 %, soit deux fois plus que celui de la moyenne mondiale. En même temps, l’environnement économique dans lequel de nombreuses banques africaines opèrent est souvent caractérisé par des taux de bancarisation et par des ratios prêts/dépôts beaucoup plus faibles, ce qui signifie des pools de revenus bancaires plus petits et donc moins d’économies d’échelle».

Ainsi les banques du continent sont amenées à revoir leur base de coûts et leurs modèles opérationnels, en particulier si elles souhaitent continuer à investir dans la technologie et encourager l’inclusion bancaire. L’étude réalisée par McKinsey invite les banques africaines à viser des gains de productivité de l’ordre de 25 à 30 %. À bien des égards, la pandémie et le resserrement de l’économie mondiale ont déjà incité la plupart des banques à s’engager dans cette voie. McKinsey suggère de recentrer leur effort de productivité sur six domaines : la banque de détail, les opérations, les fonctions centrales et support, l’informatique, l’immobilier et les achats et coûts tiers.

«Si les banques africaines commencent à appréhender leur productivité à partir de ces six domaines critiques, alors elles pourront réussir à optimiser leur base de coûts, mais aussi mieux allouer leurs ressources financières vers leurs segments de croissance, tout en réagissant plus efficacement face à l’érosion du ROE. Elles parviendront en outre à réduire le coût du service apporté aux consommateurs, ce qui est nécessaire pour faire progresser l’inclusion financière», affirme Jurd de Girancourt.

Phygitale et «zéro opération manuelle»
Selon les recherches de McKinsey, le niveau d’adoption du numérique au sein des banques africaines a atteint 20 à 30 %, et pourrait être plus élevé. Alors que, partout dans le monde, les services et les ventes sur les canaux numériques continuent à gagner en importance par rapport aux canaux physiques plus traditionnels, certains leviers clés manquent encore aux banques africaines et qui pourraient fortement les aider à embrasser la réalité «phygitale».

De plus, l’une des principales tendances qui façonnent l’avenir des opérations est l’hyper-digitalisation du travail. Les recherches suggèrent qu’il existe un potentiel d’automatisation de plus de 50 % pour ce qui est des fonctions centrales liées à la vente ou à l’administratif (SG&A). Les grandes banques s’orientent de plus en plus vers l’automatisation et la numérisation de toute la chaîne de valeur bancaire.

Malgré plusieurs années d’investissement dans le lean, le numérique et l’automatisation (qui sont pourtant à l’origine de 60 à 70 % des coûts), Mckinsey estime qu’une partie importante de la chaîne de valeur bancaire en Afrique dépend encore des tâches manuelles. Mckinsey propose aussi aux banques africaines d’envisager d’adopter des méthodes de travail lean dans les fonctions centrales. L’intégration d’une mentalité plus orientée «client», que ce soit un client à l’intérieur de la banque ou un client externe, est susceptible d’aider les banques à anticiper et à répondre plus rapidement à un environnement qui évolue vite.

L’étude de McKinsey indique que les banques pourraient doubler la productivité de l’informatique en déployant des plateformes technologiques plus modernes. De plus, en automatisant le déploiement de l’infrastructure et en passant à un modèle DevOps qui automatise les tâches manuelles et qui permet d’améliorer la gestion d’environnements complexes, les équipes réussiront à innover encore plus rapidement et à traiter de manière beaucoup plus efficace les demandes de leurs clients.

Vers plus de flexibilité
Le travail hybride est désormais devenu la norme. Cela donne aux banques africaines l’occasion de repenser l’utilisation qu’elles font de leurs actifs physiques. Mckinsey estime que «les banques pourraient offrir à leurs employés davantage de flexibilité sur le lieu de travail : à ce titre, la migration vers une plateforme de cloud computing pourrait faciliter le travail à domicile pour les employés».

Pour ce qui est des achats, la prochaine évolution en la matière se concentrera davantage sur l’automatisation et la collaboration numérique. Investir dans les capacités numériques permettra aux banques d’automatiser leurs process achats et de générer davantage de transparence. Cela contribuerait fortement à améliorer l’efficacité opérationnelle, tout en réduisant les temps liés aux cycles via un déploiement plus strict des contrôles et l’amélioration de la conformité en matière de prise de décisions immédiates. En définitive, cela pourrait contribuer à renforcer la culture de responsabilité au sein de l’entreprise.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO


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