Trois questions autour de l’emprunt que le Maroc s’apprête à souscrire
Le Maroc s’apprête à souscrire, dès le mois prochain, un emprunt à l’international. Des questions se posent sur la dette marocaine, son état actuel, les causes d’une telle sortie sur le marché international…
Que faut-il savoir sur ce futur emprunt?
C’est la Directrice du Trésor et des finances extérieures qui l’a annoncé hier mardi lors de la conférence de presse de présentation du Projet de Loi de finances 2020: Le Maroc s’apprête à contracter un emprunt à l’international en novembre prochain.
La date exacte n’a pas encore été fixée, ni le montant et la devise d’ailleurs. Ces deux derniers aspects devraient être fixés quelques jours avant l’opération. Ce que l’on sait, c’est que le ministère des Finances attendra la fenêtre idéale pour effectuer cette levée de fonds en fonction des conditions du marché financier international.
Jusque-là, l’information d’une prochaine sortie sur le marché international avait déjà été évoquée. On parlait d’une levée équivalant à un 1 milliard d’euros sur le marché financier international, soit environ 11 milliards de DH. Plus, une deuxième sortie, en vue du même montant, serait prévue en 2020.
Dans la Loi de finances 2019, cet emprunt était déjà évoqué. Il a été pensé afin d’établir une nouvelle référence pour la signature du Maroc sur le marché financier international après plus de 4 ans d’absence. Egalement, son but est de renforcer le stock des avoirs extérieurs et de renouer contact avec les investisseurs internationaux pour leur présenter les dernières réformes sectorielles et structurelles engagées par le pays.
La démarche, comme expliquée dans la Loi de finances 2019, a été pensée de telle sorte à ne pas impacter le niveau de liquidité sur le marché local et de profiter de l’écart de coût de mobilisation des fonds qu’offre le marché international.
Comment se porte actuellement la dette extérieure marocaine?
En 2019, l’encours de la dette extérieure publique, qui est composé de l’encours de la dette extérieure du Trésor, des EEPs, des Collectivités territoriales (CTs), des emprunts extérieurs garantis par l’Etat du Secteur bancaire publique et des Institutions d’Utilité Publique (IUP), s’est établi à 326,3 milliards de DH emprunté par le Trésor. À hauteur de 44,9% et par les entreprises et établissements publics à hauteur de 54,4%, le reste concernant le secteur bancaire et les collectivités territoriales. La dette a baissé chez l’ensemble des emprunteurs.
Cela constitue une baisse par rapport à 2018 où il était de 326,6 milliards de DH, et de 332,6 milliards en 2017.
Le PIB au Maroc s’établit à 1.106,8 milliards de DH en 2018, selon le HCP. La dette extérieure représente donc 29,5% du PIB. Un niveau confortable mais, la prochaine sortie du Maroc à l’international pourrait renverser la tendance. Le niveau doit malgré tout être surveillé de près, car le service de la dette (remboursement du capital et des intérêts) se fait en devises étrangères et que la balance des paiements au Maroc est structurellement déficitaire selon un rapport de la Haute Cour des Comptes daté de juillet 2019.
Est-ce grave si le Maroc contracte cet emprunt?
Pour Rachid Aourraz, économiste et membre du Moroccan Institute for Policy Analysis (MIPA), le déficit budgétaire est structurel au Maroc et les moyens disponibles sur le marché local ne lui permettent pas de le couvrir. Le pays a besoin de financements extérieurs et d’une assistance pour couvrir le déficit, estime l’expert. « Le problème serait grave si ces dettes étaient destinées à couvrir les dépenses sociales et non les investissements, car dans ce cas, leur retour serait faible et les générations futures assumeraient les coûts de la non-rentabilité économique de leur consommation directe », souligne Aourraz.
Néanmoins, l’économiste tire la sonnette d’alarme: » Le Maroc devrait abandonner l’habitude des emprunts et entreprendre des réformes au niveau de l’administration pour améliorer la gouvernance, rationaliser les dépenses et encourager les investissements directs étrangers ».