Reprise du dialogue social : Du concret ou seulement des promesses ?
Le dialogue social reprendra en septembre pour rapprocher les points de vue entre les différentes parties et lancer les concertations sur le budget de 2019. Le gouvernement est appelé à revoir son offre relative aux augmentations salariales. L’espoir aussi est de pouvoir avancer sur les points qui ne nécessitent pas d’effort financier.
La rentrée sera chaude. Dès septembre, le gouvernement est attendu de pied ferme par les syndicats pour la reprise du dialogue social. Les négociations, rappelons-le, sont arrivées au point mort à la veille de la fête du travail car l’offre gouvernementale a été jugée trop modique par les partenaires sociaux qui ne lâchent toujours pas du lest en ce qui concerne le dossier des augmentations salariales. Le nouveau round du dialogue social permettra-t-il de rapprocher les points de vue des trois parties surtout après le discours royal qui a appelé à ouvrir des négociations permanentes ? En tout cas, les syndicats se disent prêts à reprendre les discussions avec le gouvernement. Mais, rien n’indique un éventuel changement de leur position. L’exécutif espère que les partenaires sociaux acceptent son offre, pour pouvoir la mettre en œuvre, avant de poursuivre les négociations. La proposition gouvernementale est chiffrée à 6,4 milliards de dirhams. Un montant que l’exécutif avait, dès le démarrage des négociations, fixé en tant que seuil à ne pas dépasser pour sauvegarder les équilibres macro-économiques. Une position critiquée par les syndicats dont la satisfaction de l’ensemble du cahier revendicatif nécessite au moins 14 milliards de dirhams. Après le rejet de l’offre du gouvernement par les syndicats, le chef de l’exécutif Saâd Eddine El Othmani a annoncé son intention de mettre en œuvre quelques mesures proposées, notamment celles ayant trait aux allocations familiales (9,8 millions de dirhams) et à l’augmentation de la prime de naissance de 150 à 1000 dirhams (37 millions de dirhams). Les syndicats aspirent toujours à ce que le gouvernement améliore son offre et les associent au processus de préparation du budget de 2019.
En effet, les centrales syndicales ont toujours déploré le manque de concertation en amont autour du projet de loi de finances. Cette fois-ci, le démarrage des négociations en septembre permettra de discuter des points pouvant être intégrés dans le prochain budget pour renforcer le pouvoir d’achat des citoyens. Outre les demandes d’ordre matériel, l’espoir est de pouvoir avancer sur les doléances qui ne nécessitent pas un effort financier, comme les libertés syndicales. Le prochain round du dialogue social tripartite doit être saisi pour accorder les violons sur les dossiers qui constituent toujours la pomme de discorde sur le plan législatif.
Ainsi, à titre d’exemple, il est temps d’engager la réflexion sur le projet de loi organique sur le droit de grève qui est en suspens au parlement depuis son transfert par l’ancien gouvernement. El Othmani a promis de le discuter dans le cadre du dialogue social avant d’entamer son examen au sein de l’institution législative. Les centrales syndicales espèrent amender plusieurs points «restrictifs» et entendent, ainsi, peser de tout leur poids pour garantir «la souplesse» dans l’observation des grèves et supprimer la mesure relative aux prélèvements sur le salaire des grévistes. Ce projet de loi organique devra être négocié en parallèle avec le texte relatif à l’organisation des syndicats qui tarde à être mis dans le circuit législatif depuis le gouvernement de Abbas El Fassi. C’est une grosse épine dans le pied du chef de gouvernement qui entend le sortir des tiroirs malgré les réticences des partenaires sociaux. Très contesté, le texte est considéré par certains syndicalistes comme une ingérence dans les affaires internes des syndicats. El Othmani a souligné l’urgence de l’adoption de cette loi pour réglementer l’échiquier syndical en vue d’instaurer la démocratie interne, favoriser le renouvellement de l’élite et garantir la transparence financière. Le compromis est difficile à trouver autour de ce texte en raison de la divergence des points de vue entre les syndicalistes sur cette question. Le projet est déjà inscrit au menu des négociations du dialogue social.
La bonne gestion de temps s’impose
Le gouvernement est appelé à accélérer le rythme des tractations. Les partenaires sociaux lui reprochent d’avoir mal géré les négociations et le timing, comme en atteste le bilan de la commission du secteur privé qui est sortie bredouille du dernier round du dialogue social. Il était en effet on ne peut plus difficile d’accorder les violons sur la législation de discorde. Il s’agit notamment de la réforme du code de travail qu’exige le patronat, mais qui est fortement redoutée par les syndicalistes. La Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) aspire à une flexibilité du marché du travail. Pour leur part, les syndicalistes se disent conscients des difficultés que vivent les entreprises, mais plaident, en premier lieu, pour le règlement des véritables problématiques comme celle du secteur informel que l’État doit accompagner pour qu’il bascule vers l’économie formelle.