Réforme du système de santé : une transformation en marche vers l’équité et la modernité
Le Maroc s’engage dans une réforme ambitieuse et globale de son système de santé, visant à moderniser les infrastructures, à renforcer les ressources humaines et à garantir un accès équitable aux soins. Entre gouvernance repensée, digitalisation et souveraineté pharmaceutique, le Royaume se positionne comme un modèle régional en matière de transformation sanitaire. Une vision audacieuse, mais non sans défis, pour construire un système de santé inclusif et performant.
Le Maroc s’est engagé, depuis quelques années, dans une réforme audacieuse et structurante de son système de santé. Sous les Hautes orientations du Roi Mohammed VI, cette réforme vise à moderniser les infrastructures, améliorer la gouvernance et garantir un accès équitable aux soins pour tous les citoyens. À travers des initiatives ambitieuses et des investissements significatifs, le Royaume amorce une transformation qui le positionne comme un modèle en Afrique en matière de couverture sanitaire et d’efficience du système de santé.
Une vision portée par une gouvernance renouvelée
Au cœur de cette réforme, la gouvernance du secteur de la santé a été profondément repensée. La création de la Haute Autorité de la Santé (HAS) est un des piliers de cette transformation. Cet organisme indépendant a pour mission d’encadrer techniquement l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO), d’évaluer les prestations des établissements de santé et d’orienter les politiques publiques. Ce cadre institutionnel garantit une continuité dans l’action étatique et une transparence dans la gestion des services de santé.
Par ailleurs, les Groupements Sanitaires Territoriaux (GST) sont instaurés pour harmoniser l’offre de soins au niveau régional. En regroupant les établissements de santé sous une même entité, le Maroc aspire à une meilleure coordination et à une rationalisation des ressources. Ces entités joueront un rôle clé dans l’amélioration de la qualité des services et dans l’élargissement de la couverture sanitaire, en particulier dans les zones rurales.
Infrastructures et personnel médical, un chantier colossal
La réforme accorde une attention particulière aux infrastructures sanitaires et aux ressources humaines, deux volets essentiels pour assurer un système performant. Le ministère de la Santé et de la Protection sociale bénéficie d’une hausse historique de son budget, atteignant 30,7 milliards de dirhams pour 2024, soit une augmentation de 9,1%.
Cette enveloppe vise à financer la réhabilitation de plus de 1.400 centres de santé, la construction de nouveaux hôpitaux et l’ouverture de Centres Hospitaliers Universitaires (CHU) dans plusieurs régions.
En parallèle, des efforts notables sont déployés pour renforcer les effectifs médicaux et paramédicaux. La création de 5.500 postes budgétaires supplémentaires en 2024 s’ajoute à un total de 42.700 postes créés depuis 2017. Un nouveau statut pour les professionnels de santé, incluant des incitations financières basées sur la performance, a également été introduit pour reconnaître et valoriser leur rôle clé dans la mise en œuvre de cette réforme.
Vers une souveraineté pharmaceutique et une gestion efficace des médicaments
Le secteur pharmaceutique, souvent pointé du doigt pour ses prix élevés et ses lacunes structurelles, bénéficie également d’une révision en profondeur. L’Agence Marocaine des Médicaments et des Produits de Santé a été créée pour superviser la disponibilité et la qualité des médicaments. Un système informatique avancé de traçabilité permettra de suivre en temps réel les flux de médicaments, réduisant ainsi les ruptures de stock et assurant une meilleure accessibilité pour les patients.
Cette réforme du secteur pharmaceutique reflète l’ambition du Maroc de renforcer sa souveraineté sanitaire. En optimisant la gestion et la production des médicaments, le pays vise à répondre de manière autonome aux besoins croissants de sa population.
Unification et simplification du système d’assurance maladie
L’unification de la gestion des régimes d’assurance maladie obligatoire constitue un autre volet stratégique de la réforme. Le projet de loi n°54.23, récemment approuvé, transfère la gestion de l’AMO pour le secteur public à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS).
Ce changement vise à simplifier les démarches administratives et à améliorer l’efficacité du système. Par ailleurs, le régime d’assurance pour les étudiants a été intégré à celui des ayants droit, facilitant ainsi leur couverture sanitaire.
Digitalisation, une révolution silencieuse
L’intégration des technologies numériques dans le système de santé marocain marque une avancée significative. Un système national d’information centralisé est en cours de développement pour faciliter la gestion des données de santé.
Cette digitalisation permettra une meilleure coordination entre les établissements de santé, tout en offrant aux citoyens un accès simplifié à leurs informations médicales et aux services en ligne.
Défis et perspectives d’avenir
Malgré ces avancées, des défis subsistent. La mise en œuvre effective des réformes nécessite une coordination étroite entre les différents acteurs du secteur. La formation continue des professionnels de santé, l’amélioration des conditions de travail et la lutte contre les inégalités d’accès aux soins, notamment en milieu rural, demeurent des priorités.
Par ailleurs, la pérennité du financement du système de santé est primordiale. La rationalisation des dépenses, l’optimisation des ressources et l’implication du secteur privé sont autant de leviers à actionner pour assurer la viabilité du système. Le gouvernement a d’ailleurs mis en place des mécanismes de gouvernance territoriale et d’optimisation des ressources pour financer la réforme de la santé.
Santé mentale, un domaine en quête d’attention
La santé mentale, longtemps négligée, est désormais au centre des préoccupations. La Cour des comptes a récemment publié un rapport alarmant sur l’état des services de santé mentale au Maroc, soulignant des lacunes en matière d’infrastructures, de ressources humaines et de cadre juridique.
Le rapport recommande l’élaboration d’une politique intégrée, la mise en place d’un cadre juridique adapté et le renforcement des ressources humaines pour améliorer la prise en charge des patients souffrant de troubles mentaux.
Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO