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Publications comptables : le climat se greffe aux états de synthèse des sociétés

La première étape pour gérer l’externalité liée au changement climatique est de la mesurer, souligne Yves Perrier, vice-président d’Europlace, auteur d’un rapport sur la thématique, et dont il présentait une synthèse aux récents états généraux de la recherche comptable. Pour cela, il faut une comptabilité dédiée des émissions de CO2, suffisamment harmonisée afin de permettre une comparabilité et une fiabilité de l’information. 

Les publications comptables se rapportant au climat devront être auditées, au même titre que l’information financière, pour en assurer la robustesse et la confiance des utilisateurs, prévient Patrick de Cambourg, président de l’Autorité nationale comptable en France. Présent à l’ouverture des états généraux, ce praticien chevronné de la comptabilité est connu pour un célèbre rapport portant son nom sur le reporting extra-financier. Reste à trouver un consensus sur les outils techniques.

Ce n’est pas gagné (voir aussi article «Compta extra-financière : La guerre des normes aura lieu» dans notre édition du lundi 18 avril 2022). Le régulateur comptable européen- l’EFRAG- recense 95 initiatives internationales en matière de normalisation extra-financière !

Une course de vitesse s’est engagée entre, d’une part, le projet européen Corporate Sustainability Reporting Directive, qui a pour élément central le développement de normes en matière de durabilité fondée sur le principe de double matérialité et couvrant un champ environnemental, social et de bonne gouvernance, et, d’autre part, l’initiative de la Fondation IFRS, qui a lancé un International Sustainability Standards Board (ISSB) visant à développer un socle commun de normes limitées dans un premier temps aux risques financiers liés au changement climatique.

Des outils d’analyse et d’évaluation

Une fois le reporting extra-financier en place, il faut aussi un cadre d’analyse homogène et transparent qui permette, par la notation, d’infléchir le coût du capital et des financements. La comptabilité financière et les méthodes d’analyse utilisées aujourd’hui reposent sur des standards et des normes établis au début des années 1980 avec l’explosion des marchés financiers.

L’enjeu aujourd’hui est de bâtir des normes et standards de l’analyse extra-financière. Cette harmonisation de l’approche des acteurs financiers, mais également de l’écosystème qui contribue à la discipline de marché, avec notamment les agences de notation (Moody’s, S&P Global…), les fournisseurs d’indices climat utilisés dans la gestion passive, etc. Aujourd’hui, si des standards existent pour orienter les capitaux (obligations vertes, ACT,…), ceux-ci sont multiples, non stabilisés et en concurrence. L’initiative SBTI -Science-Based Targets Initiative-, développée en 2015 par le CDP, le WWF, le World Resources Institute et le Global Compact des Nations Unies, vise à développer des outils pour faciliter la définition et l’adoption d’objectifs climatiques par les entreprises.

Elle définit les meilleures pratiques en matière de réduction des émissions et d’objectifs de neutralité carbone, fournit une assistance technique et des ressources spécialisées aux entreprises pour les aider à se fixer des objectifs conformes aux dernières données scientifiques sur le climat. Elle réunit, également, une équipe d’experts pour fournir aux entreprises une évaluation et une validation indépendantes de leurs objectifs climatiques.

Près d’un millier d’entreprises, présentes dans 50 différents secteurs, travaillent actuellement avec l’initiative afin de fixer leurs objectifs climatiques. Le rapport d’étape 2020 de SBTI indique que les entreprises engagées auprès de l’initiative ont réduit leurs émissions de 25 % en cinq ans (de 2015 à 2019). Les entreprises signataires de Science-Based Targets Initiative représentent 1.200 milliards de tonnes CO2, pour une capitalisation de 20.500 milliards de dollars.

La France entraîne déjà ses entreprises

Les premières obligations réglementaires de reporting extra-financier des entreprises en France datent de 2001, et ont été renforcées au fur et à mesure. La France est allée au-delà du minimum de la réglementation européenne Non-Financial Reporting Directive élargissant le champ d’application des dispositions pour couvrir non seulement les sociétés cotées (seuils: 20 millions d’euros pour le total du bilan, 40 millions d’euros pour le montant net du chiffre d’affaires, 500 pour le nombre moyen de salarié permanents), mais aussi les sociétés non-cotées (seuils: 100 millions d’euros pour le total du bilan, 100 millions pour le montant net du chiffre d’affaires et 500 pour le nombre moyen de salariés permanents).

Le régulateur des marchés financiers a par ailleurs introduit l’obligation d’un audit de la déclaration de performance extra-financière par un tiers indépendant. En complément des exigences issues de la directive européenne liées à la déclaration de performance extra financière, le bilan des émissions de gaz à effet de serre (Beges) avait déjà été introduit par le législateur.

Le Beges couvre environ 3.000 entreprises dans l’Hexagone et permet d’évaluer la quantité de gaz à effet de serre émise (ou captée) dans l’atmosphère pendant une année par les activités d’une entreprise. Ces émissions sont classées suivant les scopes 1, 2 et 3 – le scope 3 étant à ce jour facultatif mais recommandé par la loi.

Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO


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