PLF 2019 : Quelles contraintes pour la croissance ?

En Conseil de gouvernement, le ministre de l’Économie et des finances a cité plusieurs obstacles à surmonter liés au contexte international mais aussi aux attentes de l’entreprise. L’année 2018 devrait se terminer avec un taux de croissance de 3,6% malgré un prix du baril à 73 dollars.
C’est un projet de loi de Finances 2019 sous le signe de la contrainte dont le ministère des Finances s’apprête à livrer les grandes orientations avant la fin de ce mois. Durant le Conseil de gouvernement de jeudi dernier, Mohamed Boussaïd a annoncé la couleur lors d’un exposé sur le contexte de son élaboration. Il a cité un chapelet de défis à commencer par la montée du protectionnisme dans l’économie mondiale combinée à la hausse prévisible des cours du pétrole. Deux facteurs qui ne sont pas pour faciliter les échanges ni pour maîtriser les dépenses énergétiques et leur impact sur les prix à la pompe. Il faut indiquer à ce propos que le prix du baril a atteint 73 dollars alors que les prévisions du PLF 2018 étaient de 60 dollars le baril. Toutefois, lors de sa présentation du budget exploratoire 2019, le HCP ne le voyait pas de cet œil, estimant que le contexte international reste favorable au Maroc avec une amélioration prévue de la demande mondiale adressée au pays.
Ahmed Lahlimi, Haut commissaire au Plan, a estimé que la croissance en 2019 baisserait à 2,9% après 4,1% à fin décembre 2017, ce qui situe le royaume encore loin d’une croissance inclusive seule à même de provoquer une baisse palpable du taux de chômage. Selon le FMI, le taux minimum pour avoir une croissance inclusive est de 7%. Cette instabilité de la croissance au Maroc qui épouse une courbe sinueuse est essentiellement due, comme le soutient le HCP, à sa dépendance vis-à-vis des aléas pluviométriques. Sans une offre à forte valeur ajoutée technologique, le Maroc ne pourra s’extraire de la tendance structurelle de sa croissance. Pour ce qui est de la loi de Finances de l’année en cours, il est prévu que l’on termine l’année avec un taux de croissance de 3,6%. Un taux qui reflète aussi l’effort fiscal considérable de l’État concernant le butoir (crédits de TVA) ayant atteint 10 MMDH dont 6 MMDH déboursés. L’autre contrainte de taille est intérieure. Cette fois-ci en liaison avec les attentes pressantes des entreprises notamment en matière de fiscalité mais aussi en ce qui concerne le climat des affaires et la lutte contre des délais de paiement trop longs qui compromettent le développement de l’entreprise et ses plans d’investissements et d’emplois. D’ailleurs un Observatoire des délais de paiement vient d’être lancé pour prendre cette question avec le sérieux nécessaire. Le PLF 2019 sera aussi celui du lancement de la budgétisation trisannuelle comme l’a récemment annoncé Boussaïd lors d’une rencontre avec la CGEM.
Cette première expérience qui figure parmi les principaux apports de la nouvelle loi organique des Finances nécessiterait une certaine visibilité, mais au regard des contraintes mises en avant par l’argentier du pays, le premier budget trisannuel risque de buter sur le manque d’éléments nécessaires à une bonne maîtrise des prévisions budgétaires à court terme. C’est d’autant plus difficile que le gouvernement a besoin aujourd’hui d’identifier ses priorités qui, en tout cas, ne feront pas exception à celles inscrites dans chaque note de cadrage du projet de loi des Finances : la vocation sociale et économique du PLF 2019 et la poursuite des réformes structurelles, auxquelles s’ajoutent la régionalisation avancée et la réforme du système judiciaire. Sachant que le débat aujourd’hui se trouve sur le champ du modèle de développement du pays, le maintien des mêmes orientations et standards budgétaires risque de lui ôter sa vigueur. Sans grandes annonces, le fléchissement attendu risque d’être renvoyé aux calendes grecques.
Les priorités du PLF 2019 devront également, selon Boussaïd, porter sur la réduction des disparités sociales et spatiales, l’accompagnement de l’entreprise nationale, particulièrement les petites et moyennes entreprises, la stimulation de l’investissement privé et la protection du consommateur. Il n’a pas omis de citer la nécessaire et incontournable poursuite des réformes relatives à la retraite, à l’enseignement et à la santé tout en accordant un intérêt particulier à la lutte contre le chômage des jeunes, à l’élargissement du régime de la couverture sociale et à la lutte contre la corruption. Toutes ces orientations doivent trouver leur écho dans le prochain projet de budget.