Plan d’accélération industrielle : Comment sortir d’une économie à revenus intermédiaires
L’OCP Policy Center a lancé une réflexion sur le potentiel de croissance du Plan d’accélération industrielle 2014-2020. Plus un process et/ou un produit sont complexes, plus la valeur ajoutée augmente et sa participation dans le PIB et l’emploi qualitatif aussi.
Le débat sur l’industrialisation ou la réindustrialisation de l’économie marocaine s’est récemment saisi de l’intérêt public. Non que l’on veuille remettre en question les choix actuels en matière de développement, mais pour se mettre mieux à l’écoute des marchés. S’ajoute à cela le fait qu’il n’y a pas un seul pays au monde qui a accédé à l’émergence sans industrie. Le Maroc l’a compris dès 2005 à travers le Plan Émergence, puis le Pacte national pour l’émergence industrielle avant d’arriver aujourd’hui au Plan d’accélération industrielle 2014-2020. Tous ces plans partaient du constat récurrent que le secteur industriel peine à créer la croissance et partant l’emploi.
À chaque fois, les pouvoirs publics ressentaient le besoin de tout remettre à plat à travers de nouvelles feuilles de routes. Le brief que l’OCP Policy Center vient de publier, et dont les ÉCO détient copie, ne rentre pas dans la philosophie des plans industriels ou leur pertinence. Il vise, à travers le plan d’accélération industrielle 2014-2020 à faire ressortir le positionnement des nouveaux écosystèmes dans l’espace-produit, ainsi que par rapport aux capacités cognitives et productives actuelles du Maroc. En d’autres termes, il s’agit d’évaluer la capacité des écosystèmes industriels à intégrer un certain nombre de paramètres inhérents à la nature de l’économie marocaine. Selon l’ économiste Karim El Mokri, auteur du brief, souvent les pays qui restent piégés dans le schéma d’économie à revenu intermédiaire ont du mal à basculer vers des produits qui exigent plus de complexité dans les process d’industrialisation. Ce constat est corroboré par le classement du Maroc selon l’indicateur de complexité économique (ECI) en 2014, où il occupe la 78e place sur 124 pays, devancé par la Tunisie et l’Égypte.
En effet, l’industrie exportatrice, comme le textile ou l’agroalimentaire, ont emprunté une pente descendante sur les 10 dernières années avec des pertes sèches en emplois parfois spectaculaires en 2011, 2012 ou 2014. Le plan d’accélération industrielle est donc venu à la rescousse pour palier à trois principales faiblesses : l’accès au financement pour les projets industriels, l’accès au foncier et aux plateformes intégrées, ainsi qu’une formation de qualité et adaptée aux exigences du secteur. S’ajoute à cela le ciblage d’écosystèmes à forte valeur ajoutée comme l’industrie automobile, l’aéronautique, les industries du textile et du cuir, la chimie et parachimie, les poids lourds et la carrosserie, les matériaux de construction et l’industrie pharmaceutique. Sans exception, ces secteurs figurent en pôle position sur les radars du commerce mondial, offrant un potentiel élevé pour le Maroc afin qu’il s’intègre aux chaînes de valeurs mondiales, estime El Mokri. Il en déduit que si le Maroc arrive à bien se positionner dans certains secteurs complexes de sa politique industrielle, il pourra développer davantage les capacités cognitives et productives requises par d’autres secteurs encore plus complexes, conditionnant ainsi sa croissance.
Toutefois, ce n’est pas suffisant pour s’extirper de la catégorie des pays à revenu intermédiaire et ne pas être rattrapé par les pays à faibles revenus.Pour faire le saut qualitatif nécessaire, El Mokri propose de poursuivre la diversification vers des composantes et produits à plus forte valeur ajoutée et de ne pas se contenter de chaînons de production moins sophistiqués comme les activités d’assemblage ou de câblage. Comme l’expérience asiatique le montre, il faut s’armer d’une adaptabilité aux changements du marché mondial. Par ailleurs, le plan d’accélération industrielle se distingue par deux éléments majeurs : des mesures incitatives conditionnées par la performance des bénéficiaires et une aptitude à récompenser l’effort des pionniers par rapport aux suiveurs.
Doing business
Selon le brief de l’OCP Policy Center, dans le cas d’un pays comme le Maroc, il est important d’augmenter le rythme de mise en œuvre des réformes relatives à certains aspects institutionnels. Ces cadres institutionnels et juridiques ont un caractère décisif pour le développement de l’industrie et de l’entrepreneuriat privé en général. N’oublions pas qu’il influe considérablement sur le classement du pays dans le doing business. À ce titre, l’accélération de la mise en œuvre du nouveau cadre régissant la concurrence devrait constituer l’une des principales priorités sur le plan institutionnel afin de réduire la formation de monopoles et de rentes qui leurs sont liées et de lutter contre les barrières à l’entrée pour les nouvelles entreprises innovantes et à fort potentiel.