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Pétrole : la découverte de gisements à fort potentiel relance le sujet de la raffinerie

La découverte de gisements de pétrole à fort potentiel sur les côtes marocaines relance le débat sur l’intérêt ou non de doter le Maroc d’une raffinerie, dans le contexte marqué  par la hausse des prix. 

C’est l’annonce qui fait couler beaucoup d’encre ces dernières 24 heures. La société britannique d’exploration de pétrole et de gaz, Europa Oil & Gas, vient de rendre public un document détaillant les résultats intérimaires de ses recherches réalisées sur la période allant d’août à janvier dernier, dans lequel elle annonce la découverte de 1 milliard de barils (équivalent pétrole) dans les cinq principaux prospects au large d’Agadir.

Précision de taille : la compagnie britannique ne précise pas qu’il s’agit d’une découverte confirmée, d’un potentiel à exploiter ou d’une réserve de pétrole. Mais, quand l’on sait que 90% des besoins énergétiques du Maroc sont couverts par les importations et que ne disposant plus de raffinerie, le Maroc importe l’essence et le gasoil, deux accélérateurs de la cherté de vie, ce qui, au passage, fragilise sa souveraineté énergétique.

Face aux nombreux enjeux, il y a de quoi s’interroger sur les choix que compte opérer le Maroc au cas où ces gisements se confirmeraient. Que devrait-on attendre de ces gisements dans le contexte actuel ? Comment ces gisements peuvent-ils améliorer la situation actuelle ? Ne faut-il pas remettre en marche la Samir ou construire au plus vite une nouvelle raffinerie, pour réduire les importations du raffiné ?

Sur la question, Youssef Mossadek, consultant en stratégies et management des organisations, expert en intelligence économique, réagit en ces termes: «La Samir ne serait certainement pas un pari gagnant, vu ce qu’il faudrait débourser pour supporter d’éventuels coûts de raffinage, de stockage et de distribution. Une dette colossale qui dépasserait les 2 milliards de dollars. C’est plutôt une chaîne qu’il faut gérer pour que le prix de vente dépasse le seuil de rentabilité.

Un objectif incertain en imaginant un retour du baril à un prix de 50-60 dollars. Ce qui va nous ramener à puiser dans les caisses de l’État pour payer le différentiel, et amener le Maroc à se désengager sur d’autres projets plus attractifs favorisant des points de croissance économique, et une certaine liquidité pour consommer ce pétrole. Il faut que nos institutions publiques réorientent leurs stratégies opérationnelles en décomposant les problématiques du secteur énergétique au Maroc en décongestionnant certains flux des chaînes de valeur (déblocage de projets industriels, réinvestissement dans d’autres sources énergétiques, consommation intelligente publique et privée..)».

En quelques mots, notre source ne trouve pas judicieux de relancer la Samir. Pas si loin du Maroc, plus au Sud-Est, notamment au Nigéria, c’est le cas. Le plus grand producteur pétrolier en Afrique ne dispose pas de capacité de raffinage, importe les produits raffinés et achète la paix sociale à coup de subventions et compensations. Est-ce ce schéma que le Royaume veut suivre ? Un autre économiste voit les choses autrement.

En se privant de raffinerie, le Maroc «ampute son économie d’une partie de la valeur ajoutée, des emplois et des produits dérivés créés par l’industrie du raffinage du pétrole et rend vulnérable sa souveraineté», souligne Abdelghani Youmni, économiste et spécialiste des politiques publiques.

Conséquence : la facture de compensation s’alourdit, sachant que le gouvernement, dans un élan d’anticipation, vient de débloquer 15 MMDH pour soutenir le pouvoir d’achat, à travers l’accompagnement des transporteurs, le prix à la pompe et les produits alimentaires.

Rappel et chronologie des faits

Europa Oil & Gas, société britannique d’exploration et de production, a annoncé la découverte d’une grande quantité de pétrole offshore à Inezgane, une zone offshore adjacente à Agadir, au sud-ouest du Maroc. «Une évaluation récente a indiqué une quantité considérable de ressources récupérables en toute sécurité, supérieures à 1 milliard de barils (équivalent pétrole)», révèle Europa Oil & Gas dans son rapport annuel 2022.

Le rapport, qui a été publié le 13 avril, résume les résultats des découvertes de la société au cours de la période de six mois qui s’est terminée le 31 janvier 2022. La valeur de cette richesse découverte à Inezgane dépasse 100 milliards de dollars. Europa Oil & Gas affirme que Inezgane représente une opportunité d’exploration à fort impact dans une «région du monde sous-explorée».

En tant qu’opérateur de l’énorme permis d’Inezgane, la société détient 75% de la région offshore, tandis que l’Office national des hydrocarbures et des mines (ONHYM) possède les 25% restants. Cette région pétrolière du bassin d’Agadir couvre une superficie de 11.228 km2 et se trouve à des profondeurs d’eau allant de 600 à 2.000 mètres.

Mostafa Labrak
Directeur général d’Energysium Consulting et expert en matière de carburants

Le Maroc importe du produit raffiné qui suit le référentiel Platts et non pas le brut à l’international. Le Platts est un corollaire au brut mais décalé dans le temps, car il faut bien le transporter, le raffiner, le stocker et le mettre à la disposition des traders qui le commercialisent en y ajoutant aussi leur premium.

Encore aujourd’hui, le rush sur le produit a bien commencé depuis la levée des restrictions post-Covid et nos distributeurs peinent à trouver des produits pour tourner… Il faut savoir que dans la pratique d’approvisionnement en carburants, que ce soit en contrat à terme ou en spot, le prix d‘achat est fixé le jour de la livraison, et non pas le jour de la commande, en se basant sur le référentiel Platts (Nortwest Europeens Ports).

Des formules existent depuis longtemps et les opérateurs s’en accommodent très bien. Même si des frictions surgissent parfois entre les traders et les compagnies sur les arrivées, délibérément tardives ou précoces, des navires anticipant un changement de prix en faveur des traders.

Les prix sont donc fixés, en général, sur la moyenne de la quinzaine passée. Aujourd’hui, les stocks sont à un niveau très bas et bien qu’ils soient valorisés par le principe de la moyenne pondérée, les prix tirent vers le haut.

Modeste Kouamé / Les Inspirations ÉCO


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