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Les conclusions phare de l’enquête parlementaire

L’enquête parlementaire ne conclut pas à une entente avérée entre les sociétés pétrolières, même si leurs marges bénéficiaires ont augmenté après la libéralisation du secteur. Les pratiques dans d’autres pays sont citées pour justifier les prix quasi-identiques à la pompe. Le gouvernement est épinglé pour le manque d’une politique d’accompagnement de la libéralisation. La révision de la taxation des carburants s’impose.

La marge bénéficiaire des sociétés pétrolières a considérablement augmenté depuis la libéralisation du secteur. La moyenne de différence entre les prix publics calculés selon la structure ayant précédé la libéralisation et les prix publics adoptés après la libéralisation est de 0,96 DH/ l sur le gasoil et 0.76 DH /l sur l’essence. Avant le 1er décembre 2015, le gouvernement fixait la marge de bénéfice à 0,31 DH/l sur l’essence et 0,26 DH/l sur le gasoil. Certaines sociétés investissent dans le stockage, le transport, la distribution, voire la vente en détail. Aussi leur marge est-elle encore beaucoup plus élevée. Quelques compagnies ont créé des sociétés internationales pour acheter les produits pétroliers des marchés locaux, ce qui leur génère des marges bénéficiaires supplémentaires. Il est, par ailleurs, à préciser que les marges des stations-service n’ont pas augmenté.

Absence de contrôle
Depuis la libéralisation du secteur, l’administration n’a plus le pouvoir de fixer les marges pour les activités d’importation, de distribution et de vente dans les stations-service. L’absence des mesures d’accompagnement de la libéralisation du secteur est pointée du doigt. Il fallait mettre en place un système précis de suivi du mouvement des prix au niveau international et son impact sur le pouvoir d’achat en vue d’intervenir, le cas échéant, à l’instar de ce qui est fait pour les produits alimentaires de base libéralisés. Même en libéralisant le secteur, il faut adopter des mécanismes clairs et transparents pour fixer les prix locaux comme en témoigne le cas réussi du Chili. Le renforcement du contrôle sur les prix après leur libéralisation s’avère nécessaire. Cette mission relève du ressort du Conseil de la concurrence, au point mort depuis des années. Le rôle de cette instance est primordial pour «imposer des pratiques unifiées en ce qui concerne les prix et les conditions de vente». Le rapport plaide, ainsi, pour l’impératif d’activer ce conseil pour analyser et maîtriser la situation de concurrence du marché des hydrocarbures et contrôler les pratiques anticoncurrentielles ainsi que les opérations de concentration et de monopole. Une grande question demeure aujourd’hui en suspens : Existe-t-il une entente entre les sociétés pétrolières ? Le rapport ne conclut pas à l’existence d’une entente, mais ne donne pas assez d’éléments pour infirmer cette situation. L’enquête relève que même dans d’autres pays comme le Canada, la France ou les États-Unis, les prix affichés par les sociétés sont souvent identiques ou différents de seulement quelques centimes, «ce qui pourrait être interprété comme une entente. Mais, cette situation est due à des raisons commerciales (la crainte de perdre des clients)». Mais, peut-on faire la même analyse pour le cas du Maroc ?

 
Système d’impôt à réviser
L’État qui a fait un gain annuel de 35 milliards de dirhams depuis la décompensation des hydrocarbures est appelé à assumer sa responsabilité. L’enquête recommande de réfléchir à la mise en place d’une nouvelle formule du système d’impôt sur les produits pétroliers en vue, d’une part, de protéger le pouvoir d’achat des citoyens, qui a été très touché après la libéralisation du secteur, et renforcer les ressources fiscales de l’État, d’autre part. Rappelons que les produits pétroliers au Maroc sont soumis à deux types d’impôt : la Taxe intérieure sur la consommation (TIC) et la Taxe sur la valeur ajoutée. À cet égard, le total des impôts appliqués varie entre 29 et 35% du prix final de vente. Pour le gasoil, ce taux est de 34% du prix public et 43% pour l’essence. En comparaison avec des pays européens, ces impositions sont jugées «modestes». La TIC est de 3,764 DH/l sur l’essence et de 2, 422 DH/l sur le gasoil. Quant à la TVA, elle est de 10% du prix d’importation. La structure des prix des carburants explique, selon les parlementaires, l’impact limité de la baisse des cours de pétrole sur les prix pratiqués à la pompe. «La baisse des prix concrne uniquement les composantes
variables (le prix du produit à l’international et les coûts de son importation et de sa distribution)».
 
Le rapport justifie la hausse des prix à la pompe par notamment les dépenses liées à l’investissement pour augmenter les stocks stratégiques et améliorer la qualité des produits et des services (2 MMDH), les taux d’inflation qui varient entre 1 et 3%, ainsi que la nécessité d’inclure les dépenses des risques financiers relatives aux fluctuations des prix des produits bruts et des prix de change des devises à travers l’achat des services d’assurance et d’autres produits bancaires pour couvrir les risques. «Sans prendre en considération le niveau des impôts, les prix appliqués au Maroc après la libéralisation restent bas, en comparaison avec d’autres pays importateurs de pétrole», lit-on dans le rapport. L’enquête relève que l’existence de plusieurs sociétés, la diversité des sources d’achat du pétrole et l’existence de stratégies d’investissement sont autant d’indicateurs de concurrence.
 
Les principales recommandations
Une seule recommandation phare est adressée aux professionnels du secteur qui sont appelés à renforcer leurs activités d’investissement en vue de diversifier et améliorer l’offre et garantir des stocks suffisants. L’enquête plaide pour la révision des conditions de financement du secteur bancaire aux sociétés en vue d’élargir l’investissement et alléger, par conséquent, la pression sur leurs finances. Ce qui permettrait de faire baisser indirectement les prix. Le gouvernement doit réviser le système de taxation des produits pétroliers et renforcer le contrôle sur le secteur. Les pouvoirs publics, dont les autorités locales et les conseils élus, doivent développer des mécanismes d’encouragement du transport en commun public pour alléger la demande sur les hydrocarbures liquides. Le gouvernement est appelé à créer un mécanisme gouvernemental de suivi des prix à l’échelle nationale et internationale et prendre les mesures adéquates pour protéger le consommateur. Il faut aussi réviser les lois encadrant la création des sociétés d’hydrocarbures pour faciliter l’entrée sur le marché d’autres acteurs pour promouvoir la concurrence. Au niveau des autoroutes, la révision de la distance entre les stations-service est à réviser pour agir sur les prix. Il est aussi recommandé d’augmenter la liberté de gestion des détenteurs des stations-service en fixant une durée relativement moyenne de leur contrat avec les sociétés d’hydrocarbures (5 ou 6 ans). Le gouvernement doit aussi inciter les petites sociétés à développer des formes de partenariat entre elles pour faire baisser les coûts (regroupement des opérations d’achat, de transport et de stockage).


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