L’amélioration de la gouvernance s’impose
Comment améliorer la gouvernance de l’investissement public au Maroc pour tirer la croissance vers le haut ? La régionalisation avancée offre une opportunité de mettre en place une territorialisation active des stratégies d’investissement, selon l’OCDE. Plusieurs pistes sont proposées pour accroître l’efficacité de l’investissement public.
L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a passé au crible un sujet d’actualité brûlant au Maroc : l’efficacité de l’investissement et les moyens de renforcer les effets sur la croissance des politiques économiques menées, notamment les dépenses publiques en investissement. Observateurs et parlementaires se réfèrent toujours au Haut commissariat au Plan qui considère que le taux de croissance au Maroc ne reflète pas l’effort d’investissement accompli depuis des années. Pour l’OCDE, cette question ne concerne pas uniquement le Maroc mais l’ensemble des pays de l’organisation. Un constat est déjà établi : les obstacles à un investissement public efficace sont souvent plus liés à des questions de gouvernance qu’à des questions de financement. Le Maroc qui a opté pour la régionalisation avancée se doit d’améliorer la gouvernance de l’investissement.
Approches intégrées
L’OCDE recommande d’adopter une approche systémique prenant en compte l’ensemble des étapes du cycle d’investissement, de la planification initiale à la mise en œuvre et l’évaluation et les différents mécanismes de coordination entre les niveaux de gouvernement mais aussi entre secteurs, sans laisser de côté les acteurs privés et les citoyens. Il faut aussi investir dans le renforcement des capacités adéquates aux différents niveaux surtout sur le plan régional pour assumer les nouvelles compétences. Le Maroc doit saisir l’opportunité de la régionalisation avancée pour mettre en place une territorialisation active des stratégies d’investissement. Lesquelles ne doivent plus être conçues uniquement de manière sectorielle ; mais il faut qu’elles reflètent mieux les besoins des divers territoires dans des approches intégrées. À ce titre, une grande mission incombe aux collectivités territoriales pour le développement économique et social de leurs territoires. Or, le Maroc reste un pays fortement centralisé en termes de dépenses réalisées par les collectivités territoriales en comparaison avec les pays de l’OCDE et au reste du monde. Les dépenses infranationales ne représentent qu’environ 12% des dépenses publiques soit 3,6% du PIB contre respectivement 40% et 17% dans l’OCDE en moyenne. On s’attend au changement de cette situation dans les années à venir en raison de la régionalisation qui prévoit le transfert des responsabilités du pouvoir central aux territoires.
Cohésion entre les politiques territoriales
Pour rendre l’investissement public efficace sur la croissance, il est nécessaire de renforcer la coordination entre tous les niveaux de gouvernement et les différentes politiques. Il est en effet recommandé d’investir en utilisant des stratégies régionales différenciées et de mobiliser les connaissances locales et régionales pour élaborer des stratégies d’investissement public adaptées aux territoires. Les approches sectorielles et territoriales doivent être articulées de manière à concilier la programmation stratégique au niveau central pour répondre aux objectifs de développement territorial. Cela pourrait se concrétiser à travers la pérennisation d’un comité de coordination des politiques territoriales entre ministères et institutions concernées. Il est également préconisé de renforcer les liens entre la planification territoriale et l’allocation budgétaire par le biais de la programmation pluriannuelle. À cela s’ajoute la nécessité de clarifier le champ d’action des nouvelles agences régionales d’exécution des projets. Outre ce volet de la coordination, le renforcement des capacités des différents niveaux de gouvernement s’impose pour concevoir et mettre en œuvre des stratégies efficaces d’investissement public. Cela passe notamment par l’implication des citoyens dans la définition des stratégies d’investissement public au niveau local et le contrôle de leur réalisation. Il faut aussi encourager la production des données à l’échelle territoriale, mettre en œuvre une stratégie rigoureuse des capacités existantes dans les collectivités territoriales, partager l’expérience du transfert des compétences entre les régions, accroître la qualification de la fonction publique pour assurer l’attractivité des cadres de haut niveau vers les régions. Par ailleurs, l’OCDE plaide pour la nécessité de veiller à l’existence d’un cadre institutionnel solide pour l’investissement public à tous les niveaux de gouvernement (renforcement de la fiscalité des collectivités territoriales, diversification des sources de financement des investissements public, renforcement du recours au partenariat public/privé). La production et l’usage des indicateurs territoriaux devraient être mieux gouvernés afin de renforcer les politiques d’investissement public.
La charte d’investissement booste les chiffres
L’investissement public au Maroc a plus que doublé au cours de la dernière décennie au Maroc qui se positionne parmi les pays ayant les taux d’investissement les plus élevés. Rien que l’investissement direct proprement dit (État et collectivités locales) représente 4,4% du PIB en 2015. Entre 2000 et 2015, l’investissement a cru en moyenne de 6,6% par an. L’investissement direct et indirect de l’ensemble du secteur public (budget général de l’État, entreprises et établissements publics et collectivités locales) est significatif, selon l’OCDE. Il s’élève à environ 17% du PIB. Les entreprises et les établissements publics sont responsables de la majorité de cet investissement. Le taux d’investissement total (public et privé) a plus que doublé entre 2007 et 2017. Outre les efforts déployés en matière d’infrastructure, les conditions d’investissement ont été beaucoup améliorées pour les investissements étrangers grâce notamment à la charte d’investissement.