Éco-Business

Jalal Charaf : “Ce n’est pas un sprint, c’est une construction de long terme”

Jalal Charaf
Chief Digital and AI Officer, UM6P

À l’UM6P, l’innovation n’a pas vocation à séduire, mais à servir. La deuxième édition du DeepTech Summit l’a rappelé, avec une intelligence artificielle appelée à s’ancrer dans les usages, portée par des synergies opérationnelles.

Le DTS 2025 a mis en avant l’intelligence artificielle comme levier d’impact pour des secteurs comme l’agriculture ou la santé. Comment éviter que cette IA ne reproduise les biais ou dépendances des modèles importés ?
La question touche à un enjeu fondamental : l’autonomie technologique. Les modèles importés reflètent souvent des biais ou des logiques qui ne sont pas les nôtres. Pour que l’IA soit utile à nos contextes, elle doit se construire sur des données locales et représentatives. Cela demande des infrastructures, mais aussi une gouvernance éthique et ouverte de la donnée. À l’UM6P, nous bâtissons une capacité de calcul locale via Atlas Cloud Services. Nous utilisons les modèles puissants, mais en les entraînant sur nos données et nos réalités.

L’innovation DeepTech repose sur des temps longs. Comment bâtir un écosystème financier adapté à cette temporalité ?
La DeepTech demande de la recherche, de la patience. Ce n’est pas un sprint. Il faut des acteurs capables de prendre le risque technologique, pas uniquement commercial. Cela implique les fonds publics, les universités, les investisseurs à impact. L’UM6P a lancé des programmes allant jusqu’au prototypage industriel. Mais cela reste rare. Il faut des parcours structurés pour que l’Afrique passe du POC à la production. C’est une décision politique, qui demande vision et foi en nos capacités.

Comment éviter que les partenariats noués deviennent de simples vitrines sans suite ?
Nous restons vigilants. Un partenariat n’a de sens que s’il produit de la technologie utile, ancrée dans des cas d’usage concrets comme l’agriculture, la santé ou les énergies renouvelables. Nous voulons des transferts de compétence, des brevets déposés ici, des startups qui émergent. Nous n’hésitons pas à refuser les accords qui ne servent pas l’intérêt local. Le manque de transfert technologique vers les PME est un frein structurel. C’est l’un des facteurs du «Middle Income Trap». Nous voulons contribuer à le dépasser.

Pourquoi si peu de startups DeepTech africaines parviennent à franchir le cap industriel ?
C’est là tout le défi. On a du talent, des idées, des prototypes. Mais l’industrialisation demande une convergence entre technologie, infrastructures et, surtout, débouchés. Trop souvent, nos États n’accordent pas leur confiance à l’écosystème local. Pourtant, la commande publique est un levier décisif. Le Maroc avance, mais il faut aussi que les grandes entreprises africaines fassent leur part. Le problème n’est pas le potentiel. C’est l’environnement d’atterrissage.

Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO



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