Éco-Business

Investissement sur le marché boursier : il faudra composer avec les sociétés de gestion

Alors que le Maroc vise à augmenter le nombre d’entreprises cotées en bourse, certaines sociétés s’en retirent. Les investisseurs en private equity jouent un rôle clé, mais les incitations fiscales sont-elles suffisantes pour convaincre les entrepreneurs d’opter pour une introduction en bourse ? La nouvelle mentalité des entrepreneurs marocains et les questions de transmission d’entreprises ajoutent une dynamique intéressante à ce débat.

Dans le cadre d’une conférence-débat organisée par Les Inspirations ÉCO sur le thème «Marché boursier : comment stimuler l’investissement privé ?», Hatim Ben Ahmed, président de l’Association marocaine des investisseurs en Capital (AMIC), a partagé son point de vue sur les défis et les opportunités liés au développement du marché boursier au Maroc. Le Maroc a connu un développement économique remarquable ces dernières années, et le Nouveau modèle de développement (NMD) du pays met le marché des capitaux au cœur de sa stratégie. L’objectif est de passer d’environ 75 entreprises cotées en Bourse, un chiffre inchangé depuis 15 ans, à un nombre plus élevé. Le NMD vise à atteindre 300 entreprises cotées d’ici 2035, ce qui témoigne de l’importance accordée au marché boursier dans la vision économique du pays.

Cependant, l’un des défis auxquels le marché boursier national est confronté est le retrait récent de certaines entreprises, telles que Timar. Pour atteindre l’objectif ambitieux d’augmenter de manière significative le nombre d’entreprises cotées, il est crucial d’attirer de nouvelles entreprises sur le marché. Les investisseurs en private equity, dont Hatim Ben Ahmed fait partie, considèrent le marché boursier comme une voie de liquidité pour leurs investissements. Ils évaluent les opportunités d’investissement en fonction de leur potentiel d’introduction en bourse (IPO). Ainsi, la capacité des entreprises à être cotées en bourse est un critère important dans leur processus d’investissement. Hatim Ben Ahmed souligne que l’AMIC compte actuellement une vingtaine de sociétés de gestion (SDG) au Maroc, et ce nombre devrait augmenter dans les années à venir. Avec en moyenne un portefeuille d’une dizaine d’entreprises par SDG, cela représente un potentiel de 200 à 300 entreprises sur les cinq prochaines années. Bien que les SDG jouent un rôle important dans le processus d’introduction en bourse, elles ne peuvent pas à elles seules répondre à toutes les exigences du marché. «Il est important de souligner que nous ne pouvons pas délivrer toutes les IPO au Maroc, et je pense que ce n’est pas notre rôle», souligne le dirigeant. En d’autres termes, d’autres acteurs, tels que la Bourse de Casablanca et les investisseurs, doivent également contribuer à la dynamisation du marché boursier.

Le nouveau mindset émergent
Hatim Ben Ahmed exprime son optimisme quant à l’avenir du marché boursier marocain. «Pour qu’un marché boursier soit dynamique, il faut avant tout des entrepreneurs dynamiques. C’est la base. Sans cela, il n’y a rien. Nous avons observé, au cours des quinze dernières années, une évolution du regard des entrepreneurs vis-à-vis de leurs perspectives. Je pense qu’au cours de cette période, de nouveaux acteurs sont arrivés sur le marché de l’entrepreneuriat, des personnes qui construisent leur entreprise avec une vision de croissance. Car je pense que le problème que nous avions au Maroc jusqu’à présent, c’était qu’il y avait des gens qui raisonnaient avec une vision à très court terme, et ne se souciaient pas de la valeur et de la transmission. Bien sûr, il y a eu de grands entrepreneurs dans l’histoire du Maroc, mais je constate une augmentation significative du nombre d’entrepreneurs ayant des projets de croissance et d’ambition. Nous entendons de plus en plus de discours de personnes qui nous disent : «Je veux me développer en dehors du Maroc. Je veux ouvrir une deuxième usine. Je veux m’étendre en Afrique subsaharienne. Je veux acquérir un concurrent en Europe. Je veux grandir.» C’est un discours de plus en plus fréquent», explique le président de l’AMIC, pour illustrer la transformation positive de la mentalité en cours chez les entrepreneurs marocains.

Emergence des sujets de transmission d’entreprises
De plus, le Maroc connaît également des questions de transmission d’entreprise, avec la fin de certaines générations d’entrepreneurs. Pour ces dernières, Hatim Ben Ahmed souligne que la bourse et le private equity peuvent jouer un rôle essentiel dans la structuration de leur capital et leur croissance, en offrant des solutions pour la succession et en renforçant leur dynamisme.

Les incitations fiscales ne sont pas déterminantes
En ce qui concerne les incitations fiscales destinées à stimuler l’investissement en bourse, Hatim Ben Ahmed estime que celles-ci ne sont pas un facteur déterminant dans la décision des entrepreneurs d’opter pour une introduction en bourse. «Je voulais simplement revenir sur l’incitation fiscale visant à stimuler l’investissement en bourse. Du point de vue de l’émetteur, je pense que l’actuelle incitation fiscale n’est pas un facteur déterminant dans le choix de s’engager en bourse.

En d’autres termes, en tant que décideurs publics chargés d’allouer les budgets et de déterminer où doivent être accordées les incitations fiscales, je suis d’avis que, d’après les discussions que j’ai eues avec des entrepreneurs, les avantages fiscaux de 50% sur trois ans ne suffisent pas à les convaincre d’opter pour la bourse. Ce n’est pas assez. Évidemment, c’est un «nice to have», car cela permet de compenser en partie les frais d’introduction, mais ce n’est en aucun cas un «must have». Je pense que le sujet doit plutôt être abordé du point de vue des investisseurs plutôt que de celui des émetteurs», explique Hatim Ben Ahmed. En d’autres termes, il souligne que les investisseurs jouent un rôle plus crucial dans ce contexte, et que le dialogue sur les incitations fiscales devrait se concentrer principalement sur eux.

Hatim Bean Ahmed
Président de l’Association marocaine des investisseurs en capital (AMIC)

 

«Nous observons ces deux éléments : la croissance et l’ambition, ainsi que les problèmes de succession qui commencent à émerger. Ils sont les moteurs de l’introduction en bourse et du private equity. Nous constatons ces dynamiques et nos opérations sont souvent liées à l’un ou l’autre de ces aspects. Bien sûr, en tant que SDG, nous ne serons pas en mesure de réaliser 10 opérations par an comme nous avons pu le faire entre 2005 et 2009. Cependant, nous espérons pouvoir participer à environ deux ou trois opérations par an au cours des dix prochaines années.»

Modeste Kouamé & Moulay Ahmed Belghiti / Les Inspirations ÉCO



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