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Investissement et réglementation de l’IA : des défis majeurs pour les entreprises

Les entreprises marocaines ont tout à gagner en tirant profit de l’Intelligence artificielle pour renforcer leur efficacité. Toutefois, des aspects cruciaux sont à prendre en considération, à savoir l’investissement dans l’IA et la réglementation. Bien cernés, ils permettront de façonner un avenir prometteur pour cette technologie au Maroc. 

Pour une entreprise de taille moyenne ou disposant de ressources limitées, il est évident que l’investissement dans l’IA représente un défi. Cependant, cet investissement est incontournable, et l’effort visant à soutenir le développement de l’IA, tant en interne qu’au sein de l’écosystème, revêt une importance cruciale pour l’avenir des entreprises marocaines. Tout d’abord, Aziz Knina, vice-président trésorier général de l’AUSIM, évoque «le besoin accru de puissance de calcul, impliquant l’utilisation de machines plus performantes. Cela peut être satisfait par le recours au Cloud, qui offre des capacités de calcul à un coût raisonnable ». Toutefois, il est essentiel de développer également l’aspect sécurité, car la protection des données est primordiale, notamment en ce qui concerne la confidentialité des données et les réglementations.

De plus, l’IA nécessite une grande quantité de données. Par conséquent, il est nécessaire d’investir dans une stratégie de gestion des données, incluant l’amélioration de leur qualité et la formation des employés dans le domaine de leur gestion. Il est également conseillé d’appréhender la création de services ou de ressources dédiées à la gestion des données. Un défi majeur réside dans l’acquisition de compétences en IA. Trouver des professionnels qualifiés est actuellement une tâche ardue, car le Maroc dispose de peu d’experts en la matière. Il est suggéré de promouvoir la formation en IA au niveau des écoles d’ingénieurs pour combler cette lacune.

En outre, tant les petites et moyennes entreprises (PME) que les très petites entreprises (TPE) ont également beaucoup à gagner en utilisant l’IA. Les outils d’automatisation et d’amélioration des processus peuvent se révéler très bénéfiques pour ces entreprises, car ils simplifient certaines tâches et améliorent l’efficacité. Par exemple, l’IA peut être employée pour automatiser le processus de sélection de candidats lors du recrutement, ce qui est particulièrement utile pour les entreprises recevant de nombreux CV.

 Les PME ont tout à gagner
L’automatisation de certaines tâches, telles que la sélection des candidats ou la gestion des questions fréquentes des clients, peut contribuer à améliorer l’efficacité des PME grâce à l’utilisation de l’IA, leur permettant ainsi de rivaliser avec des entreprises plus importantes. «Cela démontre le potentiel de l’IA pour apporter des avantages concrets, même dans des contextes de ressources limitées», affirme Zouhair Lakhdissi, chief executive, Dial technologies et fondateur d’AI Crafters. En effet, des solutions basées sur le cloud, comme le vidéobot, restent abordables et accessibles aux PME. Cela devrait encourager davantage de petites entreprises à explorer comment l’IA peut contribuer à leur croissance et à leur efficacité opérationnelle.

Comment alors aborder cette transition au sein des entreprises ?
Maha Gmira, experte en stratégie d’intelligence artificielle auprès des Nations Unies pour le développement, affirme que «la gestion de la résistance au changement est un aspect crucial. Il ne s’agit pas seulement d’approcher les individus de manière adéquate, mais aussi de ne pas procéder au changement de manière directe. Il faut passer par des preuves de concept (Proof of concept)».

Cette approche permet de réduire la résistance au changement, car elle démontre aux collaborateurs que la transformation ne bouleversera pas du jour au lendemain l’ensemble de leurs méthodes de travail. Elle permet de généraliser progressivement en s’appuyant sur ce qui a déjà prouvé son succès. L’idée, selon Mohamed Benali, chief technology and information officer chez Orange Maroc, est de tester, apprendre et décider ensuite de continuer ou non à implémenter cette stratégie.

Faut-il règlementer l’usage de l’IA ?
La question du cadre réglementaire est essentielle pour déterminer les types d’utilisation de l’intelligence artificielle au sein des entreprises. Il est indéniable que les grandes entreprises sont plus sensibles à ces enjeux, car les risques sont plus importants, et elles adoptent généralement une approche prudente. Les grandes entreprises préfèrent souvent minimiser les risques, tandis que les PME s’inquiètent davantage de la clarification des règles et des réglementations pour savoir ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas.

Pour les PME et les TPE, Zouhair Lakhdissi estime que les contraintes réglementaires sont souvent moins contraignantes que pour les grandes entreprises, qui doivent respecter des réglementations strictes.

Selon lui, «les PME sont davantage préoccupées par l’efficacité opérationnelle et les performances commerciales». Ainsi, il est crucial de prendre en compte des considérations éthiques, mais il ne faut pas s’enliser dans une surabondance de réglementations. Il est préférable d’adopter une approche expérimentale, de rester agile et de progresser. Adil Lachhab, directeur du pôle Digital & Data Groupe, Bank of Africa, estime que, dans des secteurs tels que celui de la banque, un cadre réglementaire est essentiel pour l’utilisation de l’IA. Cependant, les experts du panel s’accordent pour dire qu’adopter une réglementation restrictive serait contre-productif. Au lieu de cela, ils recommandent de favoriser une approche qui stimule l’innovation, en donnant par exemple aux start-ups, notamment les fintechs, la possibilité de se développer.

Dans d’autres pays, la réglementation varie. Ainsi, aux États-Unis, où le capitalisme est prédominant, l’approche habituelle consiste à laisser les entreprises créer de la valeur avant d’instaurer une réglementation. En Chine, en revanche, le gouvernement joue un rôle central dans la gestion de l’IA. En Europe, la réglementation est un élément caractéristique. Néanmoins, Maha Gmira estime que l’Afrique offre une opportunité exceptionnelle en raison de sa jeunesse dynamique. Elle souligne l’importance de mettre en place une formation adaptée dès un jeune âge pour anticiper ces évolutions. De plus, elle souligne la nécessité de considérer cette question du point de vue des trois piliers : l’État, le secteur privé et les citoyens. Le cadre réglementaire doit évoluer pour s’adapter aux nouvelles technologies, y compris les solutions Open source. La conformité est importante, mais il est tout aussi essentiel de favoriser l’innovation.

Zouhair Lakhdissi 
Chief executive, Dial technologies et fondateur d’AI Crafters

 

«Les limites de l’IA sont essentiellement associées aux contraintes des données qui servent de base à son apprentissage. Ces contraintes peuvent englober des biais dans les algorithmes, des problèmes de qualité, de densité et de quantité des données disponibles. Le principal risque associé à l’IA réside souvent dans la manière dont les êtres humains l’utilisent, parfois à des fins préjudiciables pour eux-mêmes, d’autres individus ou l’environnement. Je suis d’avis que l’IA devrait être considérée comme un puissant outil destiné à renforcer notre créativaité. Elle devrait nous encourager à libérer notre créativité, car elle n’est pas en mesure de créer des concepts révolutionnaires par elle-même».

Maha Gmira,
experte en stratégie d’intelligence artificielle auprès des Nations Unies pour le développement

«Il est crucial d’établir un cadre réglementaire et de poser des questions éthiques. Cependant, ce cadre ne devrait pas être restrictif, mais plutôt juste et adapté pour favoriser l’innovation. Il s’agit de créer un environnement qui encourage la créativité et l’innovation, en particulier pour les startups qui ont le potentiel d’opérer à l’échelle internationale. Le but est de ne pas les contraindre davantage, car la réglementation pourrait peser encore plus sur les acteurs émergents au niveau national plutôt que sur les acteurs internationaux, qui ne considèrent peut-être pas le Maroc comme un marché prioritaire».

Aziz Knina
Vice-président trésorier général de l’Ausim

 

«Aujourd’hui, nous constatons que l’IA se démocratise de plus en plus, et les outils nécessaires sont accessibles pour une utilisation à grande échelle, non seulement par les grandes entreprises, l’industrie, et les banques, mais bien au-delà».

Adil Lachhab
Directeur du pôle Digital & Data Groupe, Bank of Africa

 

«Nous disposons d’un algorithme qui a remplacé de nombreux contrôleurs qui effectuaient des opérations de vérification dans les agences et le réseau. À présent, un algorithme est en mesure d’exécuter cette tâche en identifiant les signaux de fraude. Ainsi, les personnes qui étaient affectées à ces contrôles sont désormais concentrées sur le diagnostic de ces cas particuliers. Cela représente un exemple de la manière dont les métiers évoluent avec l’intégration de l’IA».

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