Éco-Business

Inflation : les jeunes et l’art de s’adapter

Pour faire face à la flambée des prix des denrées alimentaires et des carburants, de nombreux jeunes Marocains se sont découvert une nouvelle compétence, particulièrement utile en cette période de crise, la capacité d’adaptation. Fini les grandes dépenses et place désormais aux nouveaux modes de consommation peu onéreux et à l’épargne… pour celles et ceux qui le peuvent !   

Se serrer la ceinture encore et toujours, opter pour de nouveaux modes de consommation peu onéreux où le moindre dirham compte, c’est devenu la norme au Maroc où l’inflation “folle” n’épargne quasiment aucun secteur.

Et s’il y a une catégorie de la population dont la conjoncture, dopée par la guerre en Ukraine et sa cascade de hausses des prix, impacte lourdement le pouvoir d’achat et les habitudes de consommation, ce sont bien les jeunes, tenus, désormais, de consommer différemment.

Le «cocooning», où l’on transforme son foyer en un lieu protégé de toute forme de menace de consommation parasite, n’a jamais autant eu de succès.

Les nouvelles tendances, ce sont les consommations «domestiques» et achats électroniques strictement nécessaires. Faire du shopping pour se faire plaisir peut attendre ! Ils sont de plus en plus nombreux à ne pas trouver «cool» de faire de grandes dépenses.

C’est le cas pour Rachid qui déclare avoir, au cours des deux derniers mois, réduit son budget consommation de 20%. Ainsi, ce jeune cadre dans l’administration publique, qui a la chance de bénéficier d’un transport public gratuit, ne déjeune plus dans les restaurants, ayant «opté pour une autre alternative : préparer à manger à la maison. C’est beaucoup plus économique», se réjouit-il.

Il fallait y penser ! Comparé à Y.N, une jeune maman -souhaitant garder l’anonymat- qui s’occupe seule de ses enfants, le fonctionnaire paraît moins «galéreux». «Je supporte toutes les dépenses scolaires, vestimentaires et ménagères, ainsi que les factures», nous confie notre interlocutrice.

Salariée dans le secteur des transports, cette mère de deux enfants est aujourd’hui criblée de «petites dettes». Et de poursuivre, sur un ton amer, «je ne prend plus soin de moi comme avant».

Au-delà de cette catégorie de la population, les ménages, de manière générale, longtemps privés de certaines dépenses durant le confinement ainsi que de la fermeture quasi générale des lieux publics (magasins, restaurants, cinémas, parcs d’attraction), sont de plus en plus nombreux à opter pour ces nouveaux modes de consommation, nous explique un expert.

Mais cette extrême sobriété que s’imposent certains, en renonçant, contraints et forcés, aux plaisirs de la consommation de masse, a ses limites. «Il est vrai qu’en ce moment, gérer son budget s’avère un peu difficile dans la mesure où nous faisons partie d’une génération qui consomme la fast-fashion à outrance, il faut le dire !», avoue Nadia (un nom d’emprunt), jeune étudiante en journalisme âgée de 19 ans.

«Nous aimerions bien avoir des habitudes plus healthy pour nous et pour la planète mais, malheureusement, notre train de vie nous impose certaines pratiques», ajoute-t-elle.

Pour K. Boufous, qui évolue dans le même secteur, son budget est resté le même, en dépit de la crise. Il est «toujours réparti entre l’achat de certaines nécessitées (livres, produits cosmétiques, vêtements…) et les restaurants. Il faut dire que je n’ai pas le temps pour cuisiner chez moi vu que je prépare un master parallèlement à mon travail. C’est difficile d’avoir du temps libre pour cuisiner !».

Notre consœur, qui travaille depuis huit mois, envoie, par ailleurs, une partie de son salaire mensuel à sa mère «qui vit toute seule, loin de moi». Et le reste, dit-t-elle, c’est pour l’épargne. Un coussin de sécurité financière en attendant des lendemains meilleurs alors que le niveau de l’inflation actuel ne donne guère de raison d’espérer.

Au cours des 12 prochains mois, 39,1% des ménages s’attendent à une dégradation de leur niveau de vie, 43,3% à son maintien, et 17,6% seulement à une amélioration, relève une récente note de conjoncture du HCP.

Selon cette même note, le solde d’opinion sur l’évolution future du niveau de vie est resté négatif à moins 21,5 points, contre moins 1,3 point au trimestre précédent et 13,2 points au même trimestre de l’année passée. Parallèlement, l’enquête fait ressortir qu’à fin T1-2022, 87,4% des ménages (contre 4,6% d’un avis contraire) s’attendent à une hausse du chômage au cours des 12 prochains mois.

Le solde d’opinion est resté ainsi négatif, et s’est même dégradé à -82,8 points (contre -77,6 points un trimestre auparavant et -62,2 points il y a un an). Plus inquiétant, un Marocain sur deux serait en dépression aujourd’hui, contre un sur trois en 2020 et un sur quatre en 2018.

Khadim Mbaye / Les Inspirations ÉCO


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