Éco-Business

Industrie et écosystèmes : entre avancées majeures et perspectives prometteuses

Des acteurs de poids, des écosystèmes dynamiques, des investissements colossaux. Depuis plusieurs années, le secteur de l’aéronautique a pris une ampleur considérable au Maroc. Il s’impose aujourd’hui comme l’un des fruits les plus précieux d’une stratégie industrielle rondement menée depuis des décennies. 

Dans le panorama industriel marocain, et particulièrement celui des métiers mondiaux sur lesquels le Royaume mise énormément pour booster sa valeur ajoutée, le secteur de l’aéronautique a pris une dimension de plus en plus importante. En aperçu, le secteur de l’aéronautique au Maroc, c’est un savoir-faire rodé sur deux décennies, mais surtout des exportations chiffrées à quelques 2 milliards de dollars, pour un taux d’intégration de l’ordre de 40% d’après les données recueillies auprès du Groupement des industries marocaines aéronautiques et spatiales (GIMAS). Comment évoquer le secteur sans parler de ses acteurs ? Pas moins de 140 entreprises emploient plus de 20.000 professionnels hautement qualifiés. Et vu les tendances actuelles, ces chiffres sont appelés à croître davantage dans les années qui viennent.

«Les tendances dans le monde entier sont clairement à la hausse. Les commandes d’avions dépassent de loin les capacités à les honorer. Au Maroc, nous sommes généralement dans une meilleure position que d’autres bases aéronautiques, compte tenu de notre compétitivité et de la disponibilité des ressources qui leur font aujourd’hui défaut», nous explique Maria El Filali, directrice générale du GIMAS.

Sur la même lancée, Jamal Lemridi, délégué général de Safran Maroc, l’un des leaders du secteur, renchérit : «Le Maroc offre de nombreuses opportunités, c’est pour cela d’ailleurs que l’industrie aéronautique est en plein développement. Il y a des facteurs très favorables».

Des opérateurs de premier plan évoluant dans un écosystème des plus dynamiques au monde
Avec un coût du travail parmi les plus attractifs, une main-d’œuvre relativement moins chère, et un régime fiscal souple, le Royaume a attiré de nombreux opérateurs de l’industrie aéronautique. Boieng et Airbus, par exemple, y sous-traitent une partie de la production de leurs pièces d’avions. En plus de ces avionneurs de renom, d’importants groupes industriels ont investi dans des usines au Maroc. L’un des derniers en date, le constructeur américain de moteurs d’avions Pratt & Whitney, leader mondial des systèmes de propulsion, a annoncé au mois de juin, l’ouverture d’une usine à Casablanca pour la production de pièces usinées statiques et structurelles pour divers modèles de moteurs. «La communauté aérospatiale en pleine croissance à Casablanca garantit un bassin de main-d’œuvre hautement qualifiée, un environnement économique stable et le soutien du gouvernement marocain.

Pratt & Whitney Maroc, en tant que société affiliée indépendante, créera 200 emplois de haute qualité d’ici 2030», a déclaré Maria Della Posta, présidente de Pratt & Whitney Canada, au moment de l’annonce. Dans la zone franche MidParc de la capitale économique, le constructeur de moteurs rejoindra d’autres gros calibres de l’industrie aéronautique dans le monde, comme Safran, présent à travers huit filiales qui exploitent neuf sites répartis dans le Royaume, ou encore les groupes Nexans ou Daher, pour ne citer qu’eux. La foison d’opérateurs s’explique aussi par le dynamisme des écosystèmes dans lesquels ils opèrent. À ce jour, quatre écosystème font office de locomotives de l’industrie aéronautique au Maroc : l’assemblage, le câblage (EWIS, pour «Electrical wiring interconnected systems»), la maintenance (MRO, pour «Maintenance repair overhaul»), et l’ingénierie. «Les plus performants sont l’assemblage et EWIS. Les moins performants, alors qu’ils présentent le plus grand potentiel pour le Maroc, sont l’ingénierie et surtout le MRO. Les écosystèmes de l’électronique embarquée et du composite sont en développement», précise Maria El Filali. C’est dire combien la marge de progression reste importante, malgré les résultats importants déjà enregistrés.

Des perspectives réjouissantes
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les opérateurs n’ont pas l’intention de se reposer sur leurs lauriers. Aujourd’hui, il est question de monter en puissance, surtout sur les écosystèmes à fort potentiel que sont la maintenance et l’ingénierie. «Pour lever les freins pour le MRO il y a le problème du foncier et de la formation de mécaniciens. Pour l’ingénierie, cet écosystème manque de leviers de financement souples, d’aide à l’investissement, et d’une formation plus adaptée sur des niveaux techniciens-ingénieur multilingues», souligne la directrice générale du GIMAS. Une situation que le gouvernement ne prend pas à la légère. En effet, si les Exécutifs successifs ont énormément investi dans le développement des zones franches, la mise en place de stratégies de développement et d’incitations à destination des investisseurs, la nécessité d’accompagner cet impulsion avec une main-d’œuvre qualifiée est à l’ordre du jour.

C’est ainsi que le pays s’est doté d’instituts dédiés à la formation aux métiers de l’aéronautique. Le premier d’entre eux, l’IMA (Institut des métiers de l’aéronautique), a été inauguré par le Roi Mohammed VI en mai 2011. Deux ans plus tard, le Souverain présidait à l’ouverture de l’ISMALA (Institut spécialisé dans les métiers de l’aéronautique et de la logistique aéroportuaire). Le cap était ainsi fixé pour préparer les talents de l’industrie aéronautique de demain. D’ailleurs, le secteur est concerné par l’objectif de formation de 100.000 diplômés dans l’industrie, annoncés par le Chef du gouvernement Aziz Akhannouch, début juin. Et il est intéressant de relever l’implication des opérateurs dans le processus. «Nous contribuons aussi à la mise au point des programmes, vu que nos salariés bénéficient également de cette formation», souligne le délégué général de Safran Maroc. Safran qui a, au passage, détaché un de ses cadres, en l’occurrence Patrick Ménager, pour diriger l’IMA depuis sa création. Un exemple d’émulation.

À quand l’avion 100% marocain ?
La question mérite d’être posée, au vu des objectifs ambitieux affichés par le secteur. En effet, le Royaume a démontré son savoir-faire dans les métiers de l’assemblage, et espère monter en puissance sur les métiers de l’ingénierie et de la maintenance dans les prochaines années. Doté d’un tel savoir-faire et des transferts de technologie prévus avec l’installation d’acteurs de renom de plus en plus nombreux, voir un avion sorti intégralement des chaînes de montage au Maroc, comme c’est déjà le cas pour certaines marques automobiles, ne serait pas farfelu. La concrétisation de cette ambition reste pour l’instant un rêve lointain. Pour Abdelhamid Addou, patron de Royal Air Maroc, «il faudra du temps».  Même son de cloche chez Safran. «Vous savez, la Chine vient à peine de lancer son avion, qui est similaire à l’A320. Ça leur a demandé beaucoup d’efforts, beaucoup d’énergie, et beaucoup de temps. Donc, pour le Maroc, cela nécessitera beaucoup de temps, mais c’est tout à fait envisageable. Même si le délai reste difficile à estimer». Ainsi, si l’horizon n’est pas clair pour la réalisation de cet objectif ultime, la méthode l’est : il faudra travailler !

Aerospace Meetings Casablanca, chapitre 7

C’est le rendez-vous incontournable de l’industrie aéronautique au Maroc. La7e édition des Aerospace Meetings de Casablanca (AMC) se déroulera du 3 au 5 octobre. Un évènement d’envergure internationale, vu qu’il réunira pas moins de 650 participants représentant une vingtaine de nationalités. Au menu, des conférences, des ateliers, mais surtout des rendez-vous d’affaires, puisque 250 entreprises sont attendues.

«Son format efficace réunit les acheteurs mondiaux avec les entreprises basées au Maroc. Il s’agit d’un évènement qui a lieu dans plusieurs pays, dont le Maroc. Ses effets ont été de permettre une meilleure visibilité de notre savoir-faire, et surtout de développer le potentiel de sous-traitance expliquant le doublement de notre base en croissance organique depuis 20 ans», souligne la directrice générale du GIMAS, Maria El Filali.

Pour les acteurs de l’industrie aéronautique au Maroc, l’enjeu est énorme. «Il s’agira probablement de l’édition la plus importante qui ait été organisée jusqu’à présent. Après le salon du Bourget en juin, avons notre grand moment en ce mois d’octobre, vu la qualité des grands acheteurs confirmés et des participants internationaux annoncés. Nos attentes sont clairement d’attirer de nouveaux acteurs qui ne nous connaissent pas ou qui nous ont découvert récemment : Israël, Allemagne, Japon, etc. Aussi, cette édition verra une forte délégation de PME du GIFAS (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales, ndlr) qui vont effectuer le déplacement», précise la directrice générale du GIMAS.

Darryl Ngomo / Les Inspirations ÉCO



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