Éco-Business

Industrie du papier et du carton : hausse des prix à la production en juin !

Entre février 2020 et mai 2022, l’indice des prix à la production industrielle (IPPI) du secteur de la fabrication de papier et carton n’avait augmenté que de 0,1 point. Mais en l’espace d’un mois (de mai à juin 2022), cet indice a bondi de 1 point et demi. Les effets ?

Depuis le début de l’année 2021, le prix du carton ne cesse d’augmenter du fait de la hausse des matières premières : les déchets (véritable matière première «secondaire» puisqu’issue de l’économie circulaire), l’amidon, les encres et bien sûr l’énergie, ont subi de fortes hausses de prix. «Depuis le début de la crise sanitaire, le coût de revient du carton a augmenté de 50 à 60% à l’échelle mondiale. Celui du papier s’est accru de 130%, voire plus», nous expliquait Mounir Naciri, DG de Smurfit Kappa Maroc dans Les Inspirations Éco n°3112 du jeudi 2 juin 2022.

Selon Le HCP, cette tendance haussière se poursuit inexorablement, au vu de l’Indice des prix à la production des industries manufacturières (IPPIEM) affiché par le secteur du papier et du carton, en juin 2022. Entre février 2020 et mai 2022, cet indice n’a augmenté que de 0,1 point. Mais en l’espace d’à peine 1 mois (de mai à juin 2022), il a bondi de 1 point et demi. Ce qui est considérable, dans un contexte marqué par la baisse du pouvoir d’achat des ménages et celle de leur moral. Les résultats de l’enquête permanente de conjoncture auprès des ménages, menée par le HCP, montrent qu’au deuxième trimestre 2022, le moral des ménages poursuit sa tendance baissière pour atteindre son niveau le plus bas jamais enregistré auparavant. Les conséquences de cette hausse enregistrée dans l’industrie du carton risquent de se faire lourdement sentir, car tous les secteurs d’activité utilisent du carton ou du papier, que ce soit pour la «paperasse» ou pour conditionner les produits. À l’approche de la rentrée scolaire, si de telles tensions continuent sur le papier, matière première pour livres et cahiers, la prochaine rentrée pourrait peser grandement sur les foyers marocains.

Matières premières : les fondamentaux de l’offre et de la demande affectés par la crise
Comme nous l’avons dit dans un précédent article, pour la fabrication de carton ondulé, les industriels utilisent des bobines de papier (papier pour couverture et papier pour annelure), de l’amidon de maïs pour la fabrication de la colle utilisée sur l’onduleuse, et de l’encre à base d’eau pour imprimer le carton ondulé. À propos de l’amidon, celui-ci provient essentiellement du maïs, dont les prix ont flambé du fait de la guerre en Ukraine. En effet, ce pays représente quelque 16% des exportations mondiales de maïs.

Dans la foulée, le prix du maïs américain a atteint un niveau record. Le cours de cette céréale, au Chicago Board of Trade (CBOT), a ainsi atteint un niveau record, le 11 mars 2022, à 287 USD/T, en hausse de 12% sur un mois et de 38% sur un an. Cette flambée s’explique par les perturbations de la navigation dans les ports ukrainiens et russes qui ont interrompu l’approvisionnement en maïs ukrainien et perturbé la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale.

Par ailleurs, les semis de maïs de printemps, qui devaient commencer en avril dernier en Ukraine, ont été perturbés du fait de la guerre, ce qui réduira les approvisionnements mondiaux, la saison prochaine. La hausse des prix du maïs aux États-Unis a également été stimulée par les fondamentaux de l’offre et de la demande.

Du côté de la demande, la Chine est devenue le plus grand importateur de maïs lors de la saison 2020/21 (près de 30 millions de tonnes). Du côté de l’offre, les récentes conditions météorologiques défavorables en Amérique du Sud (Argentine, Brésil) ont créé une incertitude sur l’offre, ce qui pourrait encore resserrer l’offre mondiale. De plus, les coûts de production élevés, tels que l’énergie, les engrais et les frais de transport, continuent de créer des pressions inflationnistes, soutenant ainsi les prix du maïs, donc de l’amidon de maïs, l’un des ses dérivés.

Une industrie très énergivore

Le prix du papier, non plus, ne baisse pas. En octobre 2021, Tarik Sindi Lallouch, président du Groupement marocain des métiers de l’impression, de l’industrie publicitaire et des fournisseurs pour l’événementiel (GMI), dénonçait une hausse du prix de la tonne de papier à 800-900 dollars, (+30 à 40%). Depuis la reprise économique progressive de 2021, on a pu observer l’apparition d’une crise sur le papier dans plusieurs secteurs. Le prix de la pâte à papier a augmenté et le papier se fait de plus en plus rare sur le marché, au point que des pays ont interdit l’exportation des déchets de papiers et cartons. Les prévisions pour 2022 prédisent une hausse supplémentaire de 15 à 25% des prix !

Si l’on prend l’exemple du grand fabricant de papier The Navigator Company, il a augmenté ses tarifs de 8% en novembre 2021 (soit 50€ supplémentaires/tonne) et de 10 à 25% en mai 2022 (soit 50 à 100€ de plus/tonne). Selon le journal Le Monde, «à cet état de fait, s’ajoute une hausse mondiale des coûts de production de la pâte à papier, aussi bien en Chine, aux États-Unis, en Scandinavie, en Allemagne, qu’au Brésil ou au Chili.

Les coûts de cette industrie très énergivore -pour en évaporer 95% d’eau- sont directement corrélés aux prix du gaz et de l’électricité, qui flambent depuis le début de la guerre en Ukraine. La hausse, là encore vertigineuse, des coûts des transports maritimes, très utilisés dans l’industrie papetière, affecte également le secteur».

Modeste Kouamé / Les Inspirations ÉCO



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