Hydrogène vert : un catalyseur pour l’industrialisation durable
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Face aux impératifs de transition énergétique et aux nouvelles exigences environnementales des marchés internationaux, le Maroc mise sur l’hydrogène vert pour transformer son industrie et renforcer sa compétitivité. Grâce à ses ressources renouvelables exceptionnelles et à une stratégie nationale ambitieuse, le Royaume se positionne comme un acteur clé de cette révolution énergétique.
Le Maroc s’apprête à entrer dans une nouvelle ère industrielle, portée par l’essor de l’hydrogène vert. Derrière cette ressource énergétique, qui fait rêver les plus grandes puissances mondiales, se dessine une révolution pour l’industrie nationale.
Entre ambition souveraine et opportunités stratégiques, le Royaume se positionne en pionnier de cette transition, prêt à décarboner son industrie et à renforcer son attractivité économique. Un pari audacieux qui pourrait bien consacrer le “Made in Morocco” comme un label compétitif et durable sur la scène mondiale.
Un potentiel exceptionnel, une vision affirmée
S’il est un pays en Afrique capable de produire de l’hydrogène vert à grande échelle, c’est bien le Maroc. Avec plus de 3.600 heures d’ensoleillement annuel et un potentiel éolien parmi les plus compétitifs au monde, le Royaume bénéficie de conditions naturelles idéales pour la production d’énergie renouvelable, indispensable à la fabrication de cet hydrogène bas-carbone.
Conscient de cet atout, le Royaume a rapidement structuré son approche. La feuille de route nationale pour l’hydrogène vert, présentée en 2021, vise à faire du pays un hub énergétique de référence, capable de répondre aux besoins industriels nationaux tout en exportant vers l’Europe et d’autres marchés demandeurs.
L’initiative “Offre Maroc”, mise en place en 2023, a également posé les bases d’une structuration du secteur, en offrant aux investisseurs un cadre clair et des incitations attractives. Mais ce ne sont pas seulement les ambitions énergétiques du pays qui se jouent ici.
L’hydrogène vert représente une opportunité industrielle majeure, en permettant de décarboner les secteurs stratégiques du pays et en renforçant la compétitivité des produits labellisés “Made in Morocco”.
Une industrie marocaine en mutation
L’intégration de l’hydrogène vert dans l’industrie ouvre des perspectives stratégiques dans plusieurs secteurs clés. La sidérurgie et la métallurgie, encore largement dépendantes des énergies fossiles, pourraient bénéficier de l’utilisation de l’hydrogène vert comme agent réducteur pour produire de l’acier décarboné, répondant ainsi aux exigences environnementales des marchés européens.
Dans l’industrie chimique, OCP, leader mondial des phosphates, mise sur l’ammoniac vert pour décarboner la production d’engrais et renforcer la compétitivité du Maroc en tant que fournisseur durable. Le secteur du transport et de la logistique, notamment à travers Tanger Med, pourrait lui aussi tirer parti de l’hydrogène vert pour alimenter camions, trains et navires, réduisant ainsi l’empreinte carbone du fret «Made in Morocco».
Enfin, le Royaume investit dans le développement des carburants synthétiques à base d’hydrogène vert et de CO₂ capté, avec un projet d’envergure près de Dakhla, destiné à approvisionner le marché international du transport aérien et maritime.
Un levier pour l’attractivité économique
L’essor de l’hydrogène vert au Maroc dépasse les enjeux énergétiques et environnementaux pour devenir un véritable levier de compétitivité industrielle. Son intégration dans les chaînes de production permet au pays d’anticiper les nouvelles réglementations européennes, notamment le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), prévu pour 2026, garantissant ainsi aux industries exportatrices une meilleure compétitivité sur les marchés internationaux.
En parallèle, l’attractivité du Royaume pour les investisseurs étrangers s’en trouve renforcée, attirant des acteurs majeurs comme TotalEnergies, Engie et Fortescue Future Industries, séduits par les infrastructures du pays et son cadre réglementaire stable.
Enfin, le développement d’une filière hydrogène vert générera des milliers d’emplois, tant dans la production, le transport et le stockage que dans la recherche et l’innovation, contribuant ainsi à structurer un écosystème industriel durable et performant.
Des défis à relever pour concrétiser cette ambition
Malgré l’immense potentiel du pays, plusieurs défis doivent être relevés pour faire de l’hydrogène vert un pilier industriel du «Made in Morocco». Le financement des infrastructures reste un enjeu majeur, nécessitant des investissements colossaux de plusieurs dizaines de milliards de dollars, impliquant ainsi un engagement fort des bailleurs de fonds et des investisseurs privés.
Parallèlement, le Maroc devra accélérer le développement d’un cadre réglementaire adapté, en instaurant des normes claires et des incitations fiscales attractives pour structurer un marché compétitif et attirer les acteurs internationaux.
Enfin, l’industrialisation des technologies représente un défi crucial, nécessitant des avancées techniques significatives et des partenariats stratégiques avec des centres de recherche et des industriels expérimentés afin de garantir une production d’hydrogène vert à grande échelle.
Un tournant stratégique
Le Royaume dispose de tous les atouts pour réussir le pari de l’hydrogène vert : des ressources naturelles abondantes, une vision claire et des ambitions industrielles en phase avec les attentes du marché mondial.
L’intégration de cette ressource dans les chaînes de valeur industrielles permettrait non seulement de décarboner le Made in Morocco, mais aussi de renforcer son attractivité et sa compétitivité.
Le succès de cette transformation dépendra de la capacité du pays à accélérer la concrétisation des projets en cours et à fédérer les acteurs industriels autour d’une dynamique commune. Une chose est certaine : l’hydrogène vert n’est plus une option, mais une nécessité pour inscrire l’industrie nationale dans un avenir durable et prospère.
Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO