Gaming et e-sport : le Maroc joue la partie

Industrie culturelle, levier technologique, opportunité économique : le gaming et le e-sport s’imposent au Maroc comme un moteur d’avenir. C’est précisément ce défi qui a été au cœur de la table ronde organisée dans le cadre du Cercle des ÉCO du groupe Horizon Press. Intitulée «Gaming et e-sport : une industrie émergente à fort potentiel», cette rencontre, animée par Hicham Bennani, directeur général délégué du groupe et responsable du Pôle éditorial, a réuni des acteurs clés du domaine: Ghyzlaine Alami Marrouni, directrice exécutive en charge du Marché des particuliers et professionnels chez Attijariwafa bank, Brahim Amdouy, corporate communication and content manager chez inwi, Hicham El Khlifi, président de la Confédération africaine de e-sport et de la Fédération royale marocaine des jeux électroniques (FRMJE), Nissrine Souissi, directrice du Développement de l’industrie du gaming et des Systèmes d’information au ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, ainsi que Bassem Gharsalli, vice-président et country manager Afrique du Nord-Ouest chez Mastercard. Entrée en la matière… et en jeu.
Ce n’est plus un simple loisir. Longtemps considéré comme un passe-temps réservé à une frange de la jeunesse, le jeu vidéo est désormais un secteur culturel et économique à part entière, capable de rivaliser avec les industries les plus lucratives de la planète.
Le gaming, qui englobe la création, la diffusion et la consommation de jeux, et l’e-sport, sa déclinaison compétitive, sont devenus des leviers de croissance incontournables. Le Maroc, porté par une jeunesse connectée, des talents émergents et des politiques publiques volontaristes, entend bien jouer sa carte.
C’est tout l’enjeu de la table ronde organisée dans le cadre du Cercle des ÉCO du groupe Horizon Press. Intitulée «Gaming et e-sport : une industrie émergente à fort potentiel», cette rencontre animée par Hicham Bennani, directeur général délégué du groupe en charge du Pôle éditorial, a permis de réunir autour d’une même table des acteurs de premier plan. Banques, télécoms, fédérations sportives et institutions publiques ont croisé leurs regards et partagé leurs expériences pour mieux cerner les contours d’un secteur en pleine effervescence.
Étaient présents, Ghyzlaine Alami Marrouni, directrice exécutive en charge du Marché des particuliers et professionnels chez Attijariwafa bank, Brahim Amdouy, corporate communication and content manager chez inwi, Hicham El Khlifi, président de la Fédération royale marocaine des jeux électroniques (FRMJE) et de la Confédération africaine de e-sport, Nissrine Souissi, directrice du Développement de l’industrie du gaming et des Systèmes d’information au ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, et Bassem Gharsalli, vice-président et country manager Afrique du Nord-Ouest chez Mastercard.
D’entrée de jeu, Hicham Bennani a posé le décor. Il ne s’agissait pas seulement de décrypter un phénomène de société, mais bien d’analyser une filière industrielle naissante, structurée autour de ses usages, de ses modèles économiques et de son ancrage culturel. À ses côtés, Hicham El Khlifi, président de la Fédération royale marocaine des jeux électroniques (FRMJE) et de la Confédération africaine d’e-sport, a très vite rappelé l’ampleur du phénomène.
Avec un chiffre d’affaires mondial estimé à 240 milliards de dollars, soit cinq fois plus que celui de l’industrie du cinéma, le jeu vidéo représente un empire économique global. «Le gaming, c’est l’arbre. L’e-sport, c’est le fruit. Pour récolter ce fruit, il faut des racines solides, un tronc structuré, des branches bien nourries. Le Maroc est en train de bâtir cet arbre», a-t-il résumé.
Une politique d’État
Cette structuration passe d’abord par une vision publique claire. Celle-ci existe bel et bien et elle est portée par le ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication. Nissrine Souissi, directrice du Développement de l’industrie du gaming au sein du ministère, a présenté les grands axes de la stratégie nationale.
Le premier est d’ordre infrastructurel. Une cité entièrement dédiée au gaming est en cours de construction à Rabat. Baptisée Rabat Gaming City, elle regroupera des espaces de production pour les studios, des bureaux pour les startups, ainsi qu’une arène e-sport capable d’accueillir de grandes compétitions. Mais les bâtiments ne suffisent pas.
Le deuxième pilier de cette stratégie concerne la formation. Le ministère a engagé la création de filières diplômantes, qualifiantes et même accessibles aux non-bacheliers, afin d’ouvrir les portes de ce secteur à un maximum de jeunes. «Le gaming couvre plus de soixante-dix métiers. Il était impératif d’élargir l’accès, d’inclure ceux qui n’ont pas de parcours académiques classiques mais qui possèdent un réel savoir-faire technique ou créatif», explique la responsable.
Troisième pilier: l’incubation. Le ministère travaille en partenariat avec des structures d’accompagnement, des fonds d’investissement et des incubateurs privés pour soutenir les jeunes porteurs de projets. Il ne s’agit pas seulement d’un appui financier, mais aussi d’un accompagnement stratégique et managérial, afin d’aider les studios marocains à franchir les différentes étapes de croissance, de la conception à la commercialisation.
Enfin, la stratégie marocaine mise sur la visibilité. L’organisation du Morocco Gaming Expo, qui connaît un succès grandissant depuis sa première édition, répond à cet objectif. En attirant des dizaines de milliers de visiteurs, des compétitions internationales et plus de cent experts venus du monde entier, ce salon devient un véritable moteur de rayonnement.
Leadership africain
Dans cette dynamique, les opérateurs économiques ont joué un rôle de précurseurs (voir encadrés). L’ensemble des intervenants s’accorde à dire que le Maroc dispose désormais des éléments fondamentaux pour devenir un hub africain du gaming.
À l’échelle continentale, le Royaume a pris une longueur d’avance. La Confédération africaine d’e-sport, présidée également par Hicham El Khlifi, regroupe 48 pays. Le Maroc y occupe un rôle central, notamment en organisant les premiers championnats d’Afrique en présentiel et en s’associant aux éditeurs internationaux pour renforcer la compétitivité des joueurs.
«Nous avons comblé notre retard sur des pays comme l’Afrique du Sud, le Nigeria ou l’Égypte. Mieux, nous sommes devenus un modèle. Le Maroc, avec ses institutions engagées, sa jeunesse dynamique et ses entreprises visionnaires, peut aujourd’hui ambitionner d’exporter ses jeux, ses talents et son expertise», se félicite-t-il.
Mais les défis sont encore nombreux. Financement des studios, fiscalité adaptée, accès au marché international, production de contenu local : autant de chantiers à mener pour passer du statut de terrain de jeu à celui de territoire producteur. La partie est engagée. Et elle ne fait que commencer.
Hicham El Khlifi
Président de la Fédération royale marocaine des jeux électroniques (FRMJE) et de la Confédération Africaine d’e-sport
«Le Maroc n’est plus un simple consommateur, nous sommes devenus un modèle africain en matière de gaming et d’e-sport. En deux ans, nous avons fédéré 48 pays et organisé les premiers championnats africains qualificatifs pour les mondiaux, ici même au Maroc».
Nissrine Souissi
Directrice du développement de l’industrie du Gaming au MJCC
«Avec la création de la Rabat Gaming City, nous posons la première pierre d’une infrastructure complète dédiée au gaming, qui regroupera production, compétition et innovation dans un même lieu».
Brahim Amdouy
Corporate communication & content manager chez inwi
«Chez inwi, nous ne nous contentons pas de connecter les joueurs, nous créons un écosystème complet en fournissant contenu, plateformes de compétition et services adaptés à leurs besoins».
Ghyzlaine Alami Marrouni,
Directrice exécutive en charge du marché des particuliers et professionnels à Attijariwafa bank
«L’bankalik, notre néo-banque digitale, est née pour parler le langage des jeunes. Le gaming est leur univers, le comprendre, c’est les accompagner vers une bancarisation moderne et responsable».
Attijariwafa bank joue le jeu
Autre acteur inattendu mais de plus en plus engagé dans cet univers : le secteur bancaire. Attijariwafa bank a fait figure de pionnière en mettant L’bankalik, sa banque digitale, au service du gaming. Ce produit est gratuit et pensé pour les jeunes de 12 à 35 ans.
Ghyzlaine Alami Marrouni, directrice exécutive en charge du Marché des particuliers et professionnels, explique cette incursion dans l’e-sport par la volonté de parler le langage de la jeunesse.
«Le gaming est leur mode d’expression. Nous avons voulu les rencontrer dans leur univers, les écouter, les accompagner», constate-t-elle. C’est ainsi qu’est née la Banka League, un tournoi national de League of Legends co-organisé avec la FRMJE et Mastercard. L’événement a rassemblé plus de 10.000 participants et généré près de 20 millions de vues sur les réseaux sociaux.
«C’est bien plus qu’une opération marketing. C’est une façon de rendre la banque accessible, d’ancrer la bancarisation dans des usages concrets, modernes et familiers», souligne la responsable.
Ilyas Bellarbi / Les Inspirations ÉCO