Finance climat au Maroc : l’État mobilise le secteur financier et la sphère privée
Impliquer le privé ainsi que le secteur financier dans le financement de projets verts et climatiques au Maroc. C’est l’un des principaux objectifs que le gouvernement s’est fixé et essaie de concrétiser à travers une Stratégie de développement à l’horizon 2030.
Alors que la COP29 de Bakou est orientée finance climat, on se demande où en est le Maroc sur la question. Et la réponse est qu’il y a une prise de conscience concernant cet enjeu. Plus encore, le cadre se met progressivement en place, afin d’orienter efficacement le secteur financier vers les besoins de financement des projets climatiques. C’est dans cette optique que le gouvernement a planché sur une «une vision commune et concertée afin d’accélérer la transition verte du secteur financier marocain».
Présentée récemment, celle-ci vise à «accélérer la transition verte du secteur financier» national. Grosso modo, l’objectif est de contribuer à mobiliser les 78 milliards de dollars dont le Maroc aura besoin d’ici 2050 en termes d’investissements en projets verts et climatiques. Cela, d’autant plus que les partenaires économiques européens du Royaume sont désormais presque tous soumis aux obligations de la Taxe carbone, entrée en vigueur l’année dernière, et qui pourrait bientôt constituer un véritable barrage aux produits non décarbonés.
D’ailleurs, lors de la récente visite du président français au Maroc, Emmanuel Macron, les énergies renouvelables ont constitué une grande partie des contrats signés entre les deux gouvernements et avec les secteurs privés.
Stratégie finance climat
Aujourd’hui, les banques marocaines s’activent, chacune dans son couloir, à offrir des financements dits verts. C’est ainsi que plusieurs offres sont commercialisées par les différentes banques de la place. De quoi conforter la vision nationale, à savoir la Stratégie de développement à l’horizon 2030. Celle-ci est notamment portée par le ministère de l’Économie et des Finances, Bank Al-Maghrib, l’Autorité marocaine du marché de capitaux et l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale.
Du côté dudit ministère, on fait savoir que cette «nouvelle stratégie a été construite autour de trois piliers d’intervention comprenant neuf axes stratégiques». Ceux-ci visent principalement l’identification des leviers à même d’accélérer la mobilisation de financements privés en faveur du climat et le renforcement de la gestion des risques climatiques au sein du secteur financier.
In fine, il s’agira de faire en sorte d’augmenter la part des investissements privés dans le financement des projets climatiques. Il faut noter en effet que, selon cette stratégie, les flux de financement sont principalement d’origine publique, avec seulement 25-30% de contribution privée. Cette proportion est inférieure à celles observées dans les pays de la région MENA et dans les pays à revenu comparable où la part de financement privée dans la finance climat s’élève aux environs de 50%.
Financements privés
Toujours selon les observations à retrouver dans le document relatif à la stratégie, les financements privés, aussi bien au Maroc qu’à l’échelle mondiale, sont principalement orientés (à 90%) vers des projets d’atténuation (production d’énergie verte, électrification du transport…). Ces projets offrent en effet des modèles d’affaires généralement plus rentables et sont donc plus attractifs pour les investisseurs privés.
En revanche, les projets d’adaptation, qui visent à atténuer les effets actuels et futurs du changement climatique, attirent peu les financements privés. C’est ainsi que près de 98% des financements destinés aux projets climatiques d’adaptation proviennent du secteur public, notamment des États et des banques de développement.
Les résultats des négociations qui ont eu lieu à Bakou, en cette COP29, seront probablement très révélateurs de l’orientation que prendra le financement climatique mondial, et permettront aussi d’avoir un aperçu de la tendance qui se dégagera au Maroc.
Climat : plus de 2,5 MMDH de la BERD pour le secteur financier marocain
La Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) prévoit de dégager en faveur du Royaume un montant pouvant atteindre 250 millions d’euros (plus de 2,5 MMDH). Cette enveloppe de prêts est destinée à «des institutions financières partenaires de premier plan au Maroc». Ces institutions financières auront par la suite la charge de rétrocéder ces financements à des entreprises de taille moyenne et aux groupes, dans le cadre du Mécanisme de financement de l’économie verte de taille moyenne.
«L’objectif du projet est de permettre aux institutions financières partenaires d’accélérer et d’intensifier le financement d’investissements verts de taille moyenne (supérieurs à cinq millions d’euros par sous-projet) au Maroc», fait savoir la BERD.
En plus, poursuit celle-ci, l’utilisation des bénéfices sera orientée vers des projets d’énergies renouvelables, d’efficacité énergétique industrielle, de bâtiments verts, de valorisation énergétique des déchets, d’adaptation au climat et d’économie circulaire. Les sous-projets d’énergie renouvelable seront plafonnés à 20 MW de capacité installée et les sous-projets d’énergie non renouvelable, quant à eux, limités à 15 millions d’euros.
Abdellah Benahmed / Les Inspirations ÉCO