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Entreprises publiques : ça va tanguer dans les Conseils !
La nouvelle politique actionnariale de l’État va amorcer une rupture avec quelques vieilles habitudes dans les entreprises publiques. Fini les conseils d’administration transformés en «chambres d’enregistrement» où les administrateurs (fonctionnaires) étaient surtout motivés par les jetons de présence. Par ailleurs, la rémunération des dirigeants doit être rendue publique. La réforme en cours, avec l’assistance de l’OCDE, va non seulement bousculer la gouvernance de ces entreprises, mais également pousser l’Etat-actionnaire à se réinventer. Les Principes de gouvernance édictés par l’OCDE et le G20 serviront de référentiel.
Les Lignes directrices de gouvernance des entreprises, que vient de publier l’OCDE, insistent sur la nécessité pour l’État de se comporter en actionnaire actif, éclairé et professionnel. Il s’agit, notamment, de définir clairement les motifs justifiant l’actionnariat public et les attentes à l’égard des entreprises publiques, en particulier leurs objectifs de politique publique.
La doctrine OCDE, dont s’inspire le Maroc, engage les conseils d’administration à disposer des compétences, de l’intégrité et de l’objectivité nécessaires à l’exercice de leurs fonctions, et à respecter des normes élevées en matière de transparence, de diffusion de l’information et de redevabilité à l’égard des actionnaires et des parties prenantes. Il importe que les entreprises publiques observent une très grande transparence sur la rémunération des administrateurs et des principaux dirigeants, et que les informations sur ce point soient individualisées.
On attend des entreprises publiques qu’elles divulguent, en temps opportun, les informations sur la politique de rémunération des administrateurs et des principaux dirigeants, y compris les modifications significatives apportées à celle-ci, ainsi que le niveau ou le montant des rémunérations, sur une base normalisée permettant d’établir des comparaisons.
L’État doit être un actionnaire éclairé et actif
En tant qu’actionnaire, l’État devrait redéfinir ses attentes envers l’entreprise publique de manière transparente et uniquement lorsque la mission de cette dernière a radicalement changé. Les principaux moyens dont dispose l’État pour se comporter en actionnaire dynamique et éclairé consiste à définir une politique actionnariale claire et cohérente, à assigner des attentes et des mandats globaux aux entreprises publiques, à instaurer une procédure méthodique de nomination au conseil d’administration et à exercer efficacement les droits attachés à ses participations.
Les attentes et les mandats globaux assignés par l’État à une entreprise publique ne devraient être revus que lorsque la mission de cette dernière a radicalement changé. S’il peut parfois se révéler nécessaire de réexaminer, puis de modifier les objectifs d’une entreprise publique en raison de l’évolution des circonstances, l’État devrait s’abstenir de les modifier trop souvent et devrait veiller à ce que les procédures suivies pour ce faire soient transparentes et conformes à l’intérêt général.
Rapprocher le plus possible les statuts du droit des sociétés
Les Principes de gouvernance d’entreprise du G20 et de l’OCDE sont également applicables aux entreprises publiques, que l’État soit seul maître à bord ou pas. Les pouvoirs publics devraient simplifier et rationaliser les formes juridiques sous lesquelles les entreprises publiques exercent leurs activités. C’est dans ce cadre qu’il faut inscrire le processus de transformation en S.A de plusieurs d’entre elles.
Les limites imposées à l’extension du mandat des entreprises publiques sont souvent pertinentes, si l’entreprise poursuit des objectifs de politique publique du plus haut intérêt ou assume des obligations de service public, et visent à prévenir l’utilisation abusive des fonds publics, mettre un frein à des stratégies de croissance trop ambitieuses ou encore empêcher les entreprises publiques d’exporter des technologies sensibles. Il convient de veiller à ce que ces limites concernent le principal type d’activité de ces entreprises, tout en s’assurant qu’elles ne privent pas le conseil d’administration de l’autonomie pour s’acquitter de sa mission.
Les pouvoirs publics devraient s’inspirer le plus possible du droit des sociétés qui s’applique de la même manière aux entreprises privées, et éviter de créer un statut spécifique ou d’octroyer à des entreprises publiques un statut privilégié ou une protection spéciale lorsqu’un tel statut n’est pas absolument nécessaire à la réalisation des objectifs de politique publique assignés à l’entreprise.
Des conseils d’administration responsables !
L’État devrait laisser les conseils d’administration des entreprises publiques exercer les responsabilités qui leur incombent et devrait respecter leur indépendance. L’entité actionnaire devrait établir et appliquer des cadres adéquats de communication avec l’organe directeur suprême des entreprises publiques, généralement par l’intermédiaire de son président.
À l’occasion de la désignation des administrateurs d’une entreprise publique, l’entité actionnaire devrait veiller avec un soin particulier à la nécessité qu’ils exercent leurs responsabilités de manière professionnelle et indépendante. Il est important que, dans l’exercice de leurs fonctions, les membres du conseil d’administration n’agissent pas en qualité de représentants d’autres entités.
L’indépendance suppose que tous les administrateurs remplissent leur mission de manière équitable et responsable envers tous les actionnaires, publics ou privés. L’entité actionnaire devrait s’abstenir de désigner un nombre trop important de fonctionnaires issus de l’administration. Ce qui est le cas actuellement.
Par ailleurs, les membres du conseil ne devraient pouvoir être révoqués qu’en cas de motifs valables. Leur nomination et leur révocation devraient être indépendantes des périodes électorales ou des cycles politiques de l’État.
Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO