Éco-Business

Entrepreneuriat innovant : que valent nos jeunes pousses ?

Ce ne sont pas les envies d’entreprendre qui manquent. Les Marocains sont victimes de la pandémie entrepreneuriale. Faut-il le rappeler, les PME représentent plus de 95% de la production du Royaume. Mais que valent réellement les jeunes pousses et dans quel environnement évoluent nos entrepreneurs ?

Les Marocains se lancent désormais avec plus de passion et de moins en moins d’hésitation. Bien que la peur de l’échec et le manque de culture entrepreneuriale ont encore la peau dure, dynamisée par les secteurs en plein essor et la quête d’autonomie, la création d’entreprise a bondi en pleine pandémie. Dopés par les pertes d’emplois occasionnées par la crise liée au Covid, beaucoup de jeunes diplômés sont victimes de la mode entrepreneuriale. A ce sujet, 2021 constitue une année charnière.

Selon les chiffres de l’OMPIC, les créations d’entreprises ont repris de plus belle en 2021. Les dépôts de marques ont suivi la même tendance positive, avec une hausse annuelle de 16%.

Dans le détail, plus de 135.000 demandes de noms commerciaux (certificats négatifs) ont été délivrées par l’office en 2021, enregistrant un taux d’évolution de 22%. La même tendance positive est observée pour les entreprises immatriculées au Registre de commerce, avec une progression de 23%, ce qui correspond à la création de 104.748 entreprises, dont 72.227 personnes morales et 32.521 personnes physiques.

«La création d’entreprises «personne morale» (PM) a enregistré une évolution de 31%, tandis que celle des entreprises «personne physique» (PP) a augmenté de 9% par rapport à l’année précédente», détaille l’OMPIC dans son rapport annuel. Si aujourd’hui l’entrepreneuriat est devenu l’objet de toutes les attentions, en réalité, cette tendance n’est pas nouvelle au Maroc. Dans les années 1990 déjà, l’entrepreneuriat apparaissait comme une source potentielle et une réponse au problème du chômage.

Le Centre national pour la recherche scientifique et technique, dans une note publiée fin 2021, rappelait les nombreuses initiatives déployées par les pouvoirs publics au Maroc dans le sens de promouvoir l’entrepreneuriat, à l’instar d’autres pays (exemple, le statut de l’auto-entrepreneur, le statut de l’étudiant entrepreneur, le programme Moukawalati…).

Toutefois, relativise le centre, le maillon faible demeure la culture entrepreneuriale qui peine à s’instaurer dans les esprits des jeunes Marocains. Et d’ajouter que, d’une manière générale, pour qu’une activité entrepreneuriale puisse avoir lieu dans un pays donné, deux conditions doivent être réunies : des opportunités entrepreneuriales et des personnes ayant les compétences nécessaires à cette activité.

Ces conditions sont-elles réunies pour le cas du Maroc ? Une certitude, la fièvre entrepreneuriale bute encore sur de nombreux obstacles, notamment le manque de financement. Les jeunes pousses africaines sont parvenues à lever 5 milliards de dollars en 2021, et ce, malgré la crise économique induite par la pandémie liée au Covid.

Cependant, bien qu’il soit difficile de disposer de statistiques fiables, les difficultés relatives aux financements des porteurs de projets, PME et startups africains, de manière générale, ont encore la peau dure.

Au Maroc, en matière de financement, les efforts des pouvoirs publics, à travers notamment plusieurs éditions de financement et des acteurs classiques, à savoir les fonds d’investissement, bailleurs de fonds et banques privées, sont louables. Il reste cependant du chemin à faire. Aujourd’hui, en matière de levées de fonds, le Maroc est loin d’être un champion africain.

Le financement des startups reste encore problématique. Généralement, ce sont les startups expérimentées et innovantes qui captent les fonds destinés au financement des jeunes pousses. Autrement dit, pour bénéficier d’un appui financier, les startups doivent jouir d’une certaine expérience et faire preuve d’inventivité. Les bailleurs sont très attentifs au potentiel R&D pour accorder le financement nécessaire.

Résultat, les startups marocaines, qui peinent souvent à remplir ces critères, ont du mal à prendre leur part du gâteau et demeurent moins compétitives par rapport à la concurrence.

«Il faut former les jeunes entrepreneurs dans la collecte et la gestion de fonds avec plus de transparence dans l’octroi de ces financements, et proposer plusieurs fonds complémentaire et un accompagnement après financement», propose Benadis Chahinez, docteur en biotechnologie, chercheur et entrepreneuse.

Compte tenu des difficultés d’accès des jeunes aux sources de financement et des contraintes que subissent les toutes petites entreprises au Maroc, le gouvernement a lancé récemment le programme FORSA. Ambitieux et novateur, il s’adresse à toutes les personnes âgées de plus de 18 ans porteuses d’idées ou de projets d’entrepreneuriat.

Le programme FORSA converge avec les autres initiatives de soutien à l’initiative individuelle et complète le dispositif en place et verra consacrer une enveloppe budgétaire de 1,25 milliard de dirhams au titre de l’année 2022. Il cible l’accompagnement de 10.000 porteurs de projets incluant tous les secteurs de l’économie, tout en assurant les principes d’équité régionale et de genre.

Le dispositif d’accompagnement comprend une formation en e-learning pour l’ensemble des projets retenus, ainsi qu’une incubation de 2,5 mois au profit des projets les plus prometteurs, à travers la mobilisation d’incubateurs régionaux.

Pour sa part, le dispositif de financement prévu au profit des bénéficiaires consiste en un prêt d’honneur d’un montant maximal de 100.000 DH, dont une subvention pouvant atteindre 10.000 DH. Surfant sur la fièvre entrepreneuriale qui sévit au Maroc et la multiplication des initiatives visant à encourager le phénomène dans le royaume, les incubateurs et programmes d’accompagnement prolifèrent.

La question qui se pose est de savoir si les entrepreneurs, organismes publics et privés travaillent suffisamment en bonne intelligence pour influencer l’écosystème entrepreneurial national afin de faire de l’innovation un levier essentiel du développement économique du pays.

Benadis Chahinez
Docteur en biotechnologie, chercheur et entrepreneuse

Il faut former les jeunes entrepreneurs dans la collecte et la gestion de fonds avec plus de transparence dans l’octroi de ces financements, et proposer plusieurs fonds complémentaires et un accompagnement après financement.

Khadim Mbaye / Les Inspirations ÉCO



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