Éco-Business

Échanges extérieurs : L’ALE avec les USA expliqué par Mohammed Boussaïd

Mohamed Boussaïd, Ministre de l’Économie et des finances

Intervenant à la 5e édition des «Atlantic Dialogues», le ministre de l’Économie et des finances a défendu le très critiqué accord de libre-échange (ALE) qui lie le Maroc aux États-Unis. À l’issue de son intervention, vendredi dernier à Marrakech, Mohamed Boussaid a improvisé une conférence de presse express pour faire le point sur cet ALE.

Les Inspirations ÉCO: L’accord de libre-échange avec les États-Unis, entré en vigueur depuis plus de dix ans, est encore très déficitaire en faveur des USA…  
Mohamed Boussaïd: L’accord de libre-échange (ALE), en tant qu’acte politique est un argument extraordinaire pour le Maroc. Notre pays est lié par des ALE avec plus de 55 pays, ce qui représente 1 milliard de consommateurs. On ne peut pas évaluer un ALE sur une période de 10 ans seulement. Entre 2005 et 2015, notre volume d’échange avec les États-Unis a plus que triplé, passant à 31,4 MMDH, soit 5,3% des échangeurs extérieurs du royaume. Les États-Unis sont devenus le 4e fournisseur et le 5e client du Maroc. Les exportations marocaines ont certes triplé sur la même période, mais il est vrai que les importations en provenance du marché américain ont quadruplé. Cet ALE a creusé le déficit commercial, mais il a ouvert un potentiel énorme pour les entreprises marocaines dans ce grand marché et a permis d’attirer les investissements américains qui ont plus que triplé. L’ALE ne se mesure donc pas uniquement par le niveau du déficit. Il nous a permis de gagner en attractivité. Il faudra travailler afin qu’il soit mieux maîtrisé et voir tous les bénéfices qu’il pourra dégager.J’appelle les entreprises marocaines à mieux s’investir afin de mieux connaître le gigantesque marché américain.

La question sur les barrières non tarifaires se pose aussi. Ne pensez-vous pas que cela bloque l’entrée des produits marocains sur le marché américain ?
Le Maroc fait partie de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Notre pays utilise de plus en plus de moyens de défense commerciale pour lutter contre le dumping et les produits subventionnés qui peuvent porter atteinte à notre tissu industriel. En même temps, si nous voyons aussi que les règles de l’OMC ou les termes des ALE ne sont pas appliqués par certains pays, nous portons plainte devant l’OMC. Il est vrai qu’avec ce vent de conservatisme et de protectionnisme, un certain nombre de pays auront tendance à mettre en place de plus en plus de barrières tarifaires. Si c’est légal, on n’y peut rien, mais si ce n’est pas le cas, on recourt aux instances compétentes pour y faire face.  

Pouvez-vous donner une estimation chiffrée de vos attentes dans les prochaines années ?
Le Maroc est un marché de 34 millions d’habitants, qui a atteint une certaine taille non négligeable, en plus des perspectives qu’offrent ses partenariats. D’un autre côté, les États-Unis constituent un très grand marché. Sur le plan purement économique et théorique, celui qui peut tirer le plus d’opportunités de cet accord, est forcément le Maroc. Les entreprises installées au Maroc voient dans ce grand pays plus d’opportunités que l’inverse. C’est la raison pour laquelle, j’estime que, sur le long terme, le fait de prendre appui sur les facilités qu’offre cet ALE, d’investir sur la manière d’approcher ce marché américain et de découvrir ses opportunités, pourra redresser la situation et faire baisser le déficit.  

Mais cela fait 10 ans tout de même que les résultats se font attendre. Ne faudrait-il pas réévaluer la situation ?
Comme je l’ai déjà dit, 10 ans, c’est très court pour mesurer la portée d’un pareil accord. Cette période est celle de la stabilisation de l’accord et d’apprentissage. Il faut que de notre côté aussi, nous puissions développer une offre exportable, valable et compétitive. Et je pense que l’existence de cet ALE facilite les choses. Par exemple, le Plan Maroc Vert est un bon plan, qui nous a permis d’améliorer notre production agricole, mais l’enjeu se pose au niveau de la valorisation et de l’exportation. Dans ce cas de figure, imaginez ce que le marché américain peut offrir comme débouchés !

Lors des «Atlantic Dialogues», il a été question des échanges dans l’espace Atlantique. En dehors des États-Unis, quels sont les autres marchés qui intéressent le Maroc ?
En dehors des États-Unis, les autres pays de l’espace Atlantique sont le Canada et les États d’Amérique latine. Avec le Canada, le courant d’affaires et les échanges progressent. L’Amérique latine est un grand continent, mais je pense que la priorité doit être donnée à ce grand marché américain (États-Unis, ndlr) pour mieux le connaître, mieux le maîtriser et tirer profit de ses potentialités. Comme c’est un marché qui rayonne sur l’ensemble du continent, il peut être une porte d’entrée pour les autres pays. 



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