Commerce extérieur : Alerte sur la facture énergétique
La valeur des importations en produits énergétiques ne cesse de grimper depuis le début de l’année 2017. À fin mars dernier, la facture énergétique a connu une hausse de 6,2 MMDH. Après un sursis de près de cinq ans, principalement justifié par la baisse des prix du baril du pétrole à l’international, ce début d’année 2017 est donc clairement marqué par un retour de la hausse des importations énergétiques.
Il faudra s’attendre à une facture énergétique salée en fin d’année. C’est en tout cas ce que laissent présager les dernières statistiques sur les échanges extérieurs publiées par l’Office des changes. La facture a connu une hausse importante de 6,2 MMDH à fin mars. Une tendance qui se confirme depuis le début de l’année où les importations énergétiques ont connu, en janvier et février derniers, des hausses respectives de 2,3 et 3,6 MMDH. Après un sursis de près de cinq ans, principalement justifié par la baisse des prix du baril du pétrole à l’international, ce début d’année 2017 est donc clairement marqué par la hausse à nouveau de la facture énergétique. L’instabilité du prix des produits énergétiques n’est d’ailleurs pas pour rassurer. Le Maroc, qui importe pratiquement l’ensemble de ses besoins énergétiques (27% des importations), est particulièrement vulnérable à ce niveau.
L’impact immédiat de cette hausse se ressent d’abord sur le plan de la balance commerciale avec la hausse des importations de biens de 9,5 MMDH, plus importante que celle des exportations de 1,7 MMDH, ce qui se traduit par une augmentation du déficit commercial de 7,7 MMDH au premier trimestre de l’année. La hausse des importations s’explique pour l’essentiel par l’augmentation des achats de produits énergétiques, notamment les gas-oils et fuel-oils (4 MMDH). Hors facture énergétique, les importations ne s’accroissent que de 3,9% ou +3,3 MMDH.
S’agissant des exportations, celles-ci enregistrent un accroissement de seulement 3% (60,1 MMDH au lieu de 58,3 MMDH une année auparavant). À noter, la légère performance des ventes de phosphates et dérivés avec une hausse de 938 MDH de la valeur des expéditions. Selon le dernier rapport de la Banque mondiale sur les perspectives économiques dans la région MENA, la volatilité du marché pétrolier est bien partie pour se prolonger. «Les prix du pétrole fluctuent avec la demande, l’offre et les stocks, lesquels dépendent directement de l’instabilité du marché pétrolier», note le rapport qui estime que d’importants stocks pèseront sur les prix du pétrole et, à moins qu’ils soient utilisés, toute remontée potentielle des cours sera limitée.
Cette situation prévaut depuis juin 2014, lorsque les prix ont baissé des deux tiers, de 140 dollars le baril à moins de 50 dollars actuellement. Pour équilibrer l’offre et la demande, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) a accepté la première réduction importante de sa production en huit ans, de quelque 1,25 million de barils par jour (Mb/j), portant ainsi son plafond à 32,5 Mb/j. L’Arabie saoudite en a absorbé l’essentiel, avec une réduction de 680.000 barils par jour. Cette baisse de la production a également été suivie par les producteurs hors OPEP, dont la Russie, et s’est soldée par une réduction de la production totale de 1,8 million de barils par jour à compter du 1er janvier 2017. Bien que cette mesure ait réussi à stimuler les prix pendant quelque temps après son annonce, cette hausse ne s’est pas inscrite dans la durée.
Depuis fin février, les prix ont à peine dépassé 52 dollars le baril malgré le respect presque total de la réduction des quotas par les pays producteurs, membres ou non de l’OPEP. Cette situation tient essentiellement au fait que le marché connaît un bouleversement profond, les producteurs de schistes bitumineux américains venant remplacer l’OPEP en tant que producteurs régulateurs.
L’huile de schiste compense la recul de production
Depuis le début de 2017, la production américaine d’huile de schiste augmente à un rythme sans précédent et compense ainsi le recul de la production de l’OPEP. Les prix supérieurs à 50 dollars le baril (seuil de rentabilité) encouragent les producteurs américains d’huile de schiste à augmenter leur nombre d’appareils de forage, mesure indirecte de l’activité pétrolière, et à accroître leur production. La production pétrolière du bassin permien, qui couvre une partie de l’Ouest du Texas et du Sud-Est du Nouveau-Mexique, a ainsi atteint 53.000 barils par jour en février 2017 et devrait passer à 70.000 barils par jour en mars. Qui plus est, la production des schistes d’Eagle Ford devrait croître de 14.000 barils en mars, pour atteindre une production totale d’un million de barils par jour. La récente évolution du marché pétrolier est également ressentie sur le marché à terme, avec des prix inférieurs à 50 dollars le baril – 49,25, 49,77 et 50,20 dollars pour une livraison en avril, mai et juin respectivement –suggérant ainsi que la remontée des prix pétroliers au-delà de 50 dollars le baril n’est pas prévue dans l’immédiat. En pareilles circonstances, et en l’absence de choc de demande ou de diminution des stocks, le marché restera tributaire de l’offre et toute tentative de redressement des prix sera limitée, jusqu’à la fin de la décennie au moins.