Ces secteurs économiques qui peuvent mieux faire !
Excepté les mines, la logistique, l’eau, les assurances et le bancaire, tous les autres secteurs économiques passés au crible par la DEPF ont essuyé des critiques et bénéficié de pistes d’amélioration.
La Direction des études et des prévisions financières (DEPF) du Ministère de l’économie et des finances vient de publier son quatrième tableau de bord sectoriel de l’économie marocaine. Selon ses auteurs, l’objectif de ce document est d’approfondir l’analyse micro-économique pour mettre en évidence les atouts et les faiblesses des différents secteurs et apporter l’éclairage nécessaire pour le recadrage des stratégies sectorielles. Avant de livrer les diagnostics et recommandations par secteur, signalons que l’étude a indiqué les tendances sectorielles lourdes de l’économie marocaine. Elle a notamment montré que, d’une part, «les options industrielles adoptées par le Maroc au cours des deux dernières décennies ont enclenché une dynamique qui a amélioré l’attractivité du pays aux investissements étrangers et a favorisé l’émergence des métiers mondiaux du Maroc » ; et d’autre part, que «l’économie marocaine s’est inscrite dans un processus de tertiarisation avec une part dans la valeur ajoutée globale de 56,5% en 2017, soit un gain de 5,2 points par rapport aux débuts des années 90». Ce qui veut dire que le Maroc est dans un processus de transformation économique « normal » et donc sur la bonne voie. Un processus où il serait, cependant, intéressant de connaître la part du tertiaire supérieur qui regroupe les «métiers du savoir» qui fournissent aux entreprises et aux particuliers des prestations intellectuelles complexes.
Agriculture: muscler le PMV
En attendant, le rapport montre que le secteur primaire continue de jouer un rôle économique, social et environnemental important dans notre pays. Il a représenté près de 13,9% du total des valeurs ajoutées aux prix courants durant la période 2008-2017, dont 12,9% pour l’agriculture et 1% pour la pêche. Il a employé plus de 4 millions de personnes en 2017, soit 38,7% de la population active occupée. Une embellie rendue possible grâce au PMV (Plan Maroc Vert) qui a enclenché une transformation structurelle du secteur agricole marocain et lui a permis de réaliser une croissance soutenue et moins erratique de sa valeur ajoutée, avec un taux de croissance annuel moyen de 6% sur la période 2008-2017. Ceci étant, remarque le rapport, pour profiter des acquis enregistrés et des bonnes perspectives qui se profilent, l’approfondissement de la transformation structurelle du secteur agricole et la concrétisation pleine et entière des ambitions du PMV rendraient nécessaire d’apporter des réponses appropriées à un certain nombre de défis de taille. Parmi ces défis, il y a lieu de citer ceux liés au développement de l’amont agricole à travers l’agrégation, au renforcement du rôle de l’agriculture dans le développement rural et à l’amélioration de la compétitivité à l’international des exportations agroalimentaires en renforçant l’agro-logistique à travers la mise en place d’un réseau de plateformes d’exportations intégrées et multi-filières.
Pêche: améliorer l’infrastructure
Grâce au Plan Halieutis, le secteur des pêches maritimes connait également une bonne dynamique. En effet, le secteur a réalisé, en 2017, une production totale de 1,4 million de tonnes, soit un taux de réalisation de près de 84% de l’objectif fixé par le Plan Halieutis à l’horizon 2020, avec 700 000 emplois directs et indirects. En termes de performance commerciale, près de 21,2 milliards de dirhams d’exportations ont été réalisés en 2017 (soit 70,5% de l’objectif en 2020) contribuant ainsi à près de 58% des exportations agro-alimentaires et à plus de 16% des exportations totales des biens. Mais selon le rapport, nonobstant ces performances, celles-ci demeurent insuffisantes eu égard au potentiel réellement mobilisable. En effet, une grande partie de la production halieutique est exportée à l’état frais sans aucune transformation (41% du volume total des exportations), bien que cette part s’inscrive dans une tendance baissière depuis quelques années. Cela représente indubitablement un important manque à gagner en termes de création d’emplois et de valeur ajoutée au niveau national et local. Aussi, les auteurs de l’étude préconisent «une meilleure maîtrise de la chaîne de froid et de mettre l’accent sur l’adaptation des infrastructures de débarquement à la flotte à grand tonnage pour permettre le débarquement de la totalité des captures des ressources halieutiques au niveau des ports marocains».
Energie: miser sur l’intégration
Idem pour l’énergie, depuis son lancement en 2009, la stratégie énergétique du Royaume a enregistré d’importantes avancées, comme en témoignent les progrès réalisés en matière de mise en œuvre de la stratégie de développement des énergies renouvelables notamment dans les domaines solaire, éolien, hydro-électrique et de l’efficacité énergétique. Toutefois, des efforts additionnels gagneraient à être déployés particulièrement au niveau de la sécurisation des financements, du développement des smart grids et du renforcement de l’intégration régionale dans le domaine de l’électricité. Selon le rapport, il est impératif de réunir les conditions propices à une mobilisation de taille des financements notamment privés pour satisfaire les besoins énormes d’investissements prévus en la matière (40 milliards de dollars dont 30 milliards pour les projets de production électrique de sources renouvelables). L’étude préconise également de développer des «smart grids» pour favoriser l’ancrage aux énergies renouvelables, assurer une meilleure gestion de la demande et de l’offre d’électricité et permettre de faire face à la production intermittente des nouvelles sources d’énergie renouvelable. Tout ceci sans oublier la mobilisation du potentiel de l’intégration régionale afin d’éviter le gaspillage et maximiser la rentabilité en érigeant le Maroc en hub énergétique au carrefour des marchés de la méditerranée occidentale et ceux de l’Afrique de l’Ouest.
Industrie manufacturière: explorer de nouveaux marchés
Depuis le lancement du Plan d’Accélération Industrielle (PAI) en 2014, le secteur industriel continue de consolider ses performances, en réalisant une croissance en termes de valeur ajoutée de +10% entre 2014 et 2017. Cette progression soutenue a eu des effets positifs sur les emplois créés par le secteur industriel, soit un total de 288 126 postes au titre de la même période, selon le Département de l’Industrie, ce qui représente 57% de l’objectif d’emplois escomptés à horizon 2020. Par branche d’activité, c’est la branche automobile qui est la plus dynamique en matière d’export. Elle est épaulée par le textile-habillement, les industries alimentaires, l’aéronautique et l’offshoring. Selon le rapport, ces secteurs qui jouent un rôle socio-économique important, sont appelés à se repositionner pour mieux capter les opportunités qui s’offrent aussi bien à l’échelle nationale qu’internationale et à se rénover afin de faire face à une concurrence de plus en plus intense. A cet effet, l’affinement des spécialisations au profit de créneaux dynamiques et à plus forte valeur ajoutée, la meilleure valorisation de la production locale et la prospection de nouveaux marchés porteurs, notamment en Afrique, s’imposent avec acuité.
BTP: instituer le travail collaboratif
Dans le BTP, le secteur de l’immobilier a entamé ces dernières années une baisse impressionnante qui s’est confirmée par une chute de 51% de la production depuis 2011 ainsi qu’une baisse des mises en chantier (à l’exception de l’année 2015, de 35% en 2012, de 23,7% en 2013, de 6,4% en 2014). Cette situation est, d’ailleurs, confirmée par l’évolution du principal baromètre conjoncturel du secteur à savoir les ventes du ciment qui continue toujours d’afficher des baisses successives confirmées en 2017 par un recul de 2,54%. Selon les auteurs du rapport, sa redynamisation tant espérée nécessite de nouvelles approches basées sur un meilleur ciblage et une politique d’habitat régionalisée et plus réactive à même de surmonter les goulots d’étranglement qui entravent toute tentative de relance. La saturation du segment social, la difficulté à faire adhérer les promoteurs immobiliers au segment du moyen standing, les appréhensions afférentes à l’application de la nouvelle loi 66-12… sont également des défis qui s’ajoutent à d’autres déjà persistants qu’il faut éradiquer comme l’opacité du marché du foncier, l’importance de l’informel, le manque de convergence des actions publiques, etc…
Tourisme: accélérer la cadence
Dans le tourisme, le rapport remarque que malgré ses perspectives positives, le secteur touristique est loin de converger vers les objectifs arrêtés par la vision 2020. Ainsi, le PIB touristique accuserait un manque à gagner de 72,1 milliards de dirhams en 2020 imputé en partie à un gap de 64,3 milliards de dirhams en termes de recettes de voyage. Ces écarts engendreraient, ainsi, un cumul d’emplois non créés de 335 272 postes. Et selon les auteurs, ces résultats mitigés du bilan d’étape intermédiaire du secteur touristique et de la simulation de son évolution à l’horizon 2020 incitent fortement à un recadrage des objectifs de l’horizon 2020 et des moyens à mettre en œuvre pour se remettre progressivement sur un sentier de croissance plus soutenue que celui qui se dresse au gré de la simulation effectuée.
Télécoms: revoir la gouvernance
Dans les télécoms, l’étude indique que le développement du secteur des télécommunications ne pourrait que se consolider si un accroissement du taux de pénétration de l’Internet (seulement de 63,67% en 2017) est assuré. Selon ses auteurs, les segments du fixe et du haut débit fixe (ADSL) présentent des perspectives de développement, eu égard, à leur faible taux de pénétration. L’accélération du dégroupage et la mise en place d’offres innovantes, notamment, en liaison avec la voix sur l’ADSL à travers des box DSL ne pourront qu’apporter un nouveau souffle pour ce segment. La réduction de la fracture numérique entre les territoires reste également un chantier majeur à entamer pour améliorer la couverture et l’accès et l’usage des télécommunications surtout en zones rurales. Sans oublier le renforcement du dispositif institutionnel dans le volet relatif à la réglementation du partage de l’infrastructure permettant une mutualisation des coûts et une concurrence réelle sur les segments du fixe et de l’ADSL.