Budget 2023 : le département des Finances table sur une croissance de 4,5%
L’argentière du Royaume a annoncé la nouvelle mercredi, tour à tour devant les membres de la Commission des finances et du développement de la Chambre des représentants, et devant ses collègues, lors du Conseil de gouvernement, présidé par Aziz Akhannouch. Le même jour, une forte menace surgissait d’Outre-Atlantique : la FED, la Banque centrale américaine, relevait ses taux d’intérêt, pour la quatrième fois consécutive.
Nadia Fettah Alaoui, ministre de l’Économie et des finances, a dévoilé, mercredi, les grands contours du projet de budget 2023. Devant les membres de la Commission des finances et du développement de la Chambre des représentants, puis devant ses collègues, lors du Conseil de gouvernement, présidé par Aziz Akhannouch le même jour, l’argentière du Royaume a déclaré que «le projet de loi de Finances 2023 table sur une croissance de 4,5%», loin des prévisions de Bank Al-Maghrib et du HCP qui s’attendent, respectivement, à 4% et 3,7%, et assez proche de celle de la Banque mondiale (4,3%). Selon elle, ces prévisions sont basées
sur les hypothèses, en 2023, d’une récolte céréalière de 75 millions de quintaux, d’un repli des cours du gaz butane à 700 dollars/tonne et du pétrole à 93 dollars/baril avec un retour du taux d’inflation, en conséquence, à 2%.
Des prévisions ambitieuses compte tenu de la conjoncture économique incertaine
Poursuivant son propos, elle a ajouté que ces prévisions sont susceptibles d’être revues à la baisse en cas de poursuite de la détérioration des perspectives de reprise de l’économie mondiale en 2023, en particulier dans l’Union européenne, en raison des répercussions de la guerre en Ukraine. Lesquelles induisent des effets négatifs sur les prix des matières premières et sur les chaînes mondiales de production et d’approvisionnement, en plus du durcissement des politiques monétaires visant à maîtriser les tensions inflationnistes.
Justement, mercredi, quelques heures à peine après son annonce, une mesure hautement déstabilisatrice a été prise en matière de durcissement des politiques monétaires. La FED, la Banque centrale américaine, a relevé ses taux d’intérêt, pour la quatrième fois consécutive, afin de refroidir la machine économique, l’inflation battant des records aux États-Unis comme dans le reste du monde. Ce relèvement, de trois-quarts de point, situe les nouveaux taux directeurs de la FED entre 2,25 et 2,50%. Des niveaux susceptibles d’être encore revus à la hausse en septembre prochain, si nécessaire.
Les relèvements des taux directeurs de la FED, une sérieuse menace
En attendant septembre, ce nouveau relèvement des taux n’est pas sans conséquence sur l’ensemble des marchés financiers, car l’argent y est plus cher. En effet, quand les taux d’intérêt américains sont à la hausse, le moral du reste du monde est à la baisse ! L’argent est de plus en plus cher, ce qui n’arrange pas les pays africains, y compris le Maroc donc, lesquels ont actuellement besoin d’emprunter pour financer leur transition économique, leur développement ou leur budget. Alors qu’il y a un an encore, les pays africains constataient avec soulagement une baisse générale de leurs taux d’emprunt (notamment les fameux eurobonds), cette embellie n’aura guère duré.
En juin, le puissant Nigeria a dû renoncer à un prêt de 950 millions de dollars car les conditions n’en étaient pas assez avantageuses. Ce n’est pas tout, cette remontée pèse aussi sur les taux de change entre monnaies, ce qui renchérit encore l’ardoise. Le dirham marocain, constitué d’un panier d’euros et de dollars, est à ce titre particulièrement exposé. Le déficit des balances des paiements risque aussi de s’alourdir, puisque les importations des pays émergents sont majoritairement libellées en billet vert.
Bref, aujourd’hui, 60% des pays africains à faible revenu présentent un risque de surendettement. Ils étaient 20%, il y a dix ans. La situation est donc grave, mais pas désespérée, soulignent les économistes, pour peu que la coopération mondiale suive. En effet, les pays du G20, qui ont mis en place, durant la pandémie, un cadre commun pour aider les pays africains surendettés à gérer leurs dettes, doivent désormais agir sans tarder, souligne le FMI qui pointe les risques de contagion d’une possible crise de la dette.
Aziz Diouf / Les Inspirations ÉCO