Éco-Business

BTP : des chiffres en trompe-l’œil !

-12,28% à fin janvier. À première vue, les ventes de ciment ont du mal à se remettre de la crise. Cette baisse intervient après des ventes s’élevant à 1.180.237 tonnes au mois de décembre 2020. Mais selon Driss Effina, docteur en économie, spécialiste du secteur des BTP, ces chiffres sont à prendre avec des pincettes.

Les chiffres sont trompeurs ! C’est ce qu’il faudrait garder à l’esprit avant d’aborder les dernières statistiques de l’Association professionnelle des cimentiers (APC). En effet, à la fin du 1er mois de 2021, les livraisons de ciment affichent un repli de 12,28%, par rapport à janvier 2020. En volume, les livraisons de janvier s’élèvent à 1.037.005 tonnes de ciment contre 1.182.198 tonnes à la même période l’an dernier.

«Même avec une variation des ventes de -12,28%, il faut retenir que la performance est bonne. D’une part, parce que janvier 2020 était un mois exceptionnel pour les cimentiers en termes de vente. D’autre part, il n’y a pas véritablement de base de comparaison entre les deux mois. Cette année, janvier a connu une pluviométrie plus importante que la même période l’an dernier. Sur la base de ce qui précède, je soutiens que la performance de janvier révèle que les ventes vont s’améliorer», explique Driss Effina, docteur en économie, spécialiste du secteur des BTP.

Comme l’a souligné l’expert, le marché du ciment et plus généralement celui des matériaux de construction demeure affecté par la saisonnalité de l’activité immobilière, due notamment à la pluviométrie. En effet, des périodes marquées par de fortes pluies affectent le niveau de production dans le secteur des BTP et ralentissent, par conséquent, les volumes de ventes de ciment et de béton. Le facteur météorologique et climatique détermine non seulement la sécurité sur les chantiers, mais aussi l’organisation des opérations et la rentabilité des projets. Les ventes de ciment dépendent de plusieurs segments : l’auto-construction, les travaux de réhabilitation, les travaux de construction des bâtiments publics et privés ou encore le segment des infrastructures.

Du fait de la crise, les segments construction de logement de promoteurs et auto-construction ont enregistré des baisses très importantes d’activité au cours du 2e trimestre 2020. Rappelons que les ventes de ciment, principal baromètre du secteur des BTP, ont clôturé l’année 2020 sur une baisse de 10%, après une augmentation de 2,6% un an auparavant. Après la chute brutale des ventes observée en mai 2020 (-25,13%), ces dernières se sont redressées pour fluctuer autour de 1,2 million de tonnes. Janvier 2021 ne déroge pas à la règle.

«Si l’on veut relativiser, pour moi, la baisse de 10% observée au terme de 2020 est bien meilleure comparée à la baisse de juin dernier, qui a atteint -25%. Heureusement, la courbe des ventes s’est redressée au 2e semestre du fait d’un rattrapage et à la faveur d’une relative amélioration de la situation. Étant donné les conditions économiques globales ayant marqué 2020, l’on est en droit de dire que le secteur a performé», analyse Effina.

Globalement, nous assistons à un ralentissement des activités liées à la construction et aux travaux d’infrastructure. Selon l’expert, depuis la crise financière internationale de 2008, les ventes de ciment se sont inscrites dans un cycle baissier à cause d’un ralentissement observé au niveau du segment de la construction de logements. Cette stagnation dure jusqu’à présent. Face à ce marasme perceptible à travers les chiffres de la consommation de ciment, l’économiste invite les pouvoirs publics à prendre des décisions fortes. «Il ne faut pas laisser le secteur des BTP dans sa situation, d’autant plus que le secteur représente plus de la moitié des investissements de la formation brute de capital de l’économie. Il faut lui accorder plus d’attention».

Dynamiser le secteur
Plusieurs leviers sont à actionner pour dynamiser le secteur. À commencer par diminuer la pression fiscale, faciliter les procédures d’accès au permis de construire, notamment celles d’extension des logements. Cela aura pour effet de booster la consommation de ciment. S’y ajoutent les limitations d’accès aux crédits bancaires et le taux d’intérêt qui est relativement élevé comparé à l’Europe (moins de 1,5% contre environ 5,5% au Maroc). Comparée à des pays à indicateurs comparables, la consommation de ciment par habitant avec les pays de la Méditerranée montre que «le Maroc a considérablement reculé ces dix dernières années au niveau de ce ratio. Cela démontre qu’on ne construit pas assez de bâtiments, équipements ou infrastructures, comme cela se fait dans les pays émergents de la Méditerranée», explique Driss Effina. 

Modeste Kouamé / Les Inspirations Éco


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