Éco-Business

Safran : Bel avenir pour la filière

En 2016, la production est estimée à environ 5 tonnes, en deçà des aspirations des professionnels. L’accompagnement de l’Agence de développement agricole (ADA) a permis d’augmenter nettement la surface cultivée qui avoisine actuellement 1.200 hectares. Cependant, la filière déplore malheureusement la fraude qui nuit aux agriculteurs.

L’avènement du mois de décembre coïncide avec la fin de la saison de la récolte des fleurs du Crocus Sativus, d’où est extrait l’un des aliments les plus chers au monde, le safran. Depuis quelques années, les producteurs locaux, adossés à l’ADA, multiplient les efforts pour développer cette filière du terroir qui, selon Mohamed Belhoussine, président du GIE Dar Azaâfaran, regroupant 27 coopératives de Taznakht et de Taliouine, a de beaux jours devant elle. Or, cet optimisme ne cache en rien les difficultés que rencontrent les agriculteurs pour améliorer leurs performances. En 2016, la production est estimée à environ 5 tonnes, ce qui demeure faible comme quantité, et ceci en dépit de l’augmentation de la surface cultivée. «La récolte a été en deçà de nos aspirations à cause de la baisse des précipitations, même si cela va entraîner l’augmentation des prix. À l’heure actuelle, la surface globale cultivée au Maroc avoisine 1.200 hectares, en nette augmentation, comparée aux années précédentes. L’accompagnement de l’ADA a permis en effet d’augmenter la surface des terrains dédiés à la culture du safran», précise Belhoussine.

Exploitation et commercialisation
La température joue un rôle important dans l’épanouissement des cultures. Au Maroc, la plupart des plantations se trouvent dans une altitude où les neiges fondent très vite (moins de deux jours), ce qui représente une des conditions nécessaires pour cultiver le Crocus à safran. En dehors des conditions climatiques, l’investissement dans la filière du safran, faut-il le signaler, est périlleux. Pour ne citer que la récolte, celle-ci nécessite des travailleurs maîtrisant l’opération de l’émondage, ou épluchage, qui, dans le cas du safran, consiste à séparer les stigmates, ou filaments qui donnent l’épice du safran, des pétales et des étamines. En ce qui concerne ces dernières, elles sont malheureusement jetées en attendant que la recherche scientifique trouve un moyen de les exploiter. «On pense trouver un moyen d’utiliser les étamines dans la teinture, mais pour l’instant, les étamines ne sont d’aucune utilité», souligne le président. En ce qui concerne les marchés du safran marocain, ils se trouvent, quant à eux, du côté de l’Europe et du Moyen-Orient, surtout les Émirats arabes unis.

Dans la plupart des cas, ce sont des commerçants qui font le déplacement au Maroc pour acquérir le safran. La plupart de ces acheteurs s’adressent au GIE car ils exigent que la marchandise soit normalisée. Pour le groupement Dar Azaâfaran, c’est donc un grand avantage de disposer des agréments en vigueur et des autorisations de l’Office national de sécurité sanitaires des produits alimentaires (ONSSA). «Le GIE de Taliouine est le seul à disposer de l’ensemble des autorisations officielles pour exporter le safran. Les autres groupements sont en train de faire les formalités pour s’aligner aux normes nationales en termes de qualité et de sécurité sanitaire», précise Belhoussine.

Développement et benchmark
En Iran, les producteurs utilisent des techniques qui permettent d’atteindre jusqu’à quarante kilos par hectare. Il s’agit de techniques simples mais efficaces qui consistent parfois à multiplier les semences dans un seul endroit, bien que la plante iranienne ait une durée de vue de cinq ans. Au Maroc, la plante dure huit ans «avant qu’on déterre le bulbe et qu’on mette une autre semence. Sinon, le bulbe est enveloppé d’une sorte de couche qui empêche de l’irriguer. Cela dit nous ne produisons que six kilos par hectare», nous explique le spécialiste. Pour autant, Belhoussine estime qu’il est préférable d’adopter cette technique au risque de renouveler la plantation tous les cinq ans. En tout cas, les agriculteurs extraient les graines de la plante elle-même et une seule plantation renouvelée permet de planter deux de la même taille. «Quand le bulbe est planté, généralement au début de l’été, il fleurit. Cette fleur doit être cueillie et le bulbe irriguée pendant la période allant du mois d’octobre au mois de mars. Vient après une période de dormance qui dure tout le printemps. En ce qui concerne la récolte, elle commence fin octobre et dure un mois», précise Belhoussine.

Perspectives
Le président du GIE de Taliouine ne cache pas pour autant son optimisme quant à l’avenir de la filière. Au passage, il met le doigt là où le bât blesse : la fraude qui gangrène le safran marocain. En effet, des quantités considérables de fleurs Crocus entrent au Maroc de manière illégale en provenance de l’Iran. Ce safran de «contrebande» permet d’extraire jusqu’à 200 grammes d’épices à partir d’un seul kilo de fleurs mais reste reconnaissable grâce à sa couleur jaune fanée. Par ailleurs, la filière ne manque pas d’atout. Le principal avantage du safran est que la récolte peut être conservée pendant sept ans. Cela donne aux agriculteurs la possibilité d’écouler leur stock au gré des besoins de liquidité. En termes de qualité, un emballage suffit pour préserver toutes ses composantes naturelles, surtout si le stockage se fait hors zones humides. Et dans le haut Atlas oriental, ce n’est pas difficile à trouver.



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