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Avances de trésorerie : une question de survie pour les petites entreprises

À fin octobre, les crédits de trésorerie et les découverts bancaires ont atteint 257 milliards de DH, un niveau historique de ces quinze dernières années. Sans ces avances obtenues auprès de leurs banquiers, beaucoup de TPME seraient incapables d’honorer leurs échéances de fin de mois, cotisations CNSS, impôts, voire le règlement des salaires de leur personnel. L’amélioration constatée sur les délais de paiement est encore timide, surtout dans le secteur privé.

Les crédits de trésorerie et les découverts bancaires concédés aux entreprises renseignent, à bien des égards, sur le comportement des opérateurs économiques à honorer leurs engagements auprès de leurs fournisseurs et prestataires. Car moins les entreprises encaissent leurs factures dans les délais, plus elles sollicitent des facilités de caisse et des avances de trésorerie auprès des banques.

À l’évidence, malgré une amélioration du comportement relevé par l’Observatoire des délais de paiement l’an dernier, la plupart des TPME sont constamment sous perfusion de leurs banques.

Le calvaire des délais de paiement
Selon les données de Bank Al-Maghrib, l’année 2024 devrait battre tous les records avec un montant de crédits de trésorerie de 257,37 milliards de dirhams (MMDH) à fin octobre (voir infographie). C’est presque deux fois le montant levé il y a quinze ans (en 2010), et cela ne tient pas qu’à la nécessité d’une gestion active des entrées et sorties d’argent.

Pour la plupart des PME, les échéances de fin de mois, notamment le paiement des cotisations CNSS, de l’impôt sur le revenu, voire des salaires, tournent à une crise d’angoisse chez les dirigeants. Le seuil psychologique de 200 MMDH de crédits de trésorerie a été franchi pour la première fois en 2020, sans doute sous l’effet de l’arrêt partiel de l’activité.

Pour beaucoup de PME, sans cette bouffée d’oxygène, il est parfois impossible de survivre dans un environnement des affaires pollué par les retards de paiement. Tous ces comptes dans le rouge, ou en dépassement du découvert autorisé, génèrent de substantiels revenus pour les banques sous forme d’agios. Depuis 2010, leur montant a grossi de 114,4 MMDH. Et cette progression ne tient pas qu’à l’effet de la «croissance naturelle», ni à la gestion active des entrées et sorties d’argent de l’entreprise.

L’une des explications se trouve dans les délais de paiement à rallonge qui ont longtemps étranglé les PME jusqu’à les pousser à la faillite. Toutes les enquêtes le confirment d’ailleurs : le chiffre d’affaires en souffrance à l’extérieur est une des principales causes de mortalité chez les PME. Malgré la pression réglementaire et l’entrée en jeu du fisc, qui assure le rôle de gendarme des délais de paiement des entreprises, les pratiques évoluent très lentement. Il faut désormais joindre une liste des clients débiteurs assortie des détails sur les délais de paiement contractuels.

Une nouvelle dynamique en marche
Les lignes sont en train de bouger, explique un expert-comptable. «Les mauvais payeurs historiques, souvent des grandes entreprises, se précipitent pour se conformer à la loi par crainte de pénalités dues désormais au Trésor», ajoute-t-il.

L’essentiel, c’est la dynamique qui s’installe dans la pratique des affaires même si tout n’est pas parfait. L’amende qui vise les contrevenants aux délais de paiement légaux ou contractuels, équivaut au taux directeur de la Banque centrale et s’applique dès la fin du premier mois de retard de paiement. Au-delà, il faut ajouter 0,85% par mois ou fraction de mois supplémentaire. La base de calcul de l’amende est le montant de la créance en souffrance.

Au sens de la réglementation fiscale, les délais de paiement courent à compter de la date d’émission de la facture, qui correspond au plus tard au dernier jour du mois de livraison des marchandises, de l’exécution des travaux ou de la prestation de services requis.

Ce point d’apparence précis est pourtant une source permanente de la discorde dans les marchés publics entre les donneurs d’ordre et les entreprises adjudicataires. Au cœur du litige, la date de réception du marché qui conditionne aussi les délais d’attente du règlement. Si historiquement, c’est le BTP qui concentrait ce problème, les prestations de service ont été «contaminées». Les SSII marocaines fournissant les systèmes d’information au secteur public se plaignent constamment de cette «zone grise».

À défaut, c’est-à-dire en cas de désaccord entre les parties, le délai de paiement commence à courir à partir de la fin du mois de livraison de la marchandise, de l’exécution des travaux ou de la prestation de service requis ; et du premier mois suivant celui des transactions lorsque les parties conviennent d’effectuer des opérations commerciales entre elles sur une périodicité ne dépassant pas un mois (ndlr : cas des abonnements aux services de fourniture d’eau, d’électricité, de téléphone, d’internet ou de location). L’autre disposition dissuasive est l’obligation de déclaration trimestrielle des clients défaillants. Elle concerne les personnes physiques et celles qui réalisent un chiffre d’affaires de plus de 50 millions de dirhams.

Qui est concerné par la déclaration des clients débiteurs
Sont concernées sans délai à l’obligation de déclaration trimestrielle des clients défaillants, les personnes physiques et les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse les 50 millions de dirhams. En dessous de ce seuil, une période transitoire est concédée pour les exercices 2024 et 2025 durant lesquels ces contribuables seront soumis à une déclaration annuelle avant de basculer au rythme trimestriel.

La déclaration contient les informations suivantes : la «carte d’identité» de l’entreprise déclarante, la période concernée par la déclaration, le chiffre d’affaires global hors TVA au titre du dernier exercice, le montant total des factures TTC non payées dans les délais et le montant correspondant aux factures impayées totalement ou partiellement hors délai.

À ces éléments s’ajoutent le montant total des factures faisant l’objet de litiges judiciaires, le montant de l’amende pécuniaire et, éventuellement, des sanctions y afférant.

Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO



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