Ambitions vertes : le Maroc revisite sa CDN et le champ d’action de l’AMEE
Le Maroc s’engage dans la transition énergétique avec des mesures concrètes pour décarboner son économie, notamment dans le secteur de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables. Le pays n’exclut pas l’amélioration de la formulation de la Contribution déterminée au niveau national (CDN) dans les transports pour des engagements plus ambitieux.
Le Maroc est engagé dans un processus de décarbonation de son économie, pour répondre aux défis environnementaux et économiques actuels. Dans ce contexte, le secteur de l’efficacité énergétique joue un rôle clé, en permettant une utilisation plus rationnelle et moins émettrice de carbone. Pour atteindre ces objectifs, les autorités ont pris des mesures importantes pour libéraliser le marché des énergies renouvelables et encourager l’autoproduction, tout en travaillant à la transformation de l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (AMEE). En effet, «l’AMEE va bientôt subir une transformation et voir son champ d’action élargi pour inclure de nouveaux domaines tels que la décarbonation et l’économie circulaire», annonce Mohamed Benyahya, son directeur général, lors du salon Logismed 2023. Ces projets étant en cours de développement, il promet d’en dire plus en temps opportun.
«L’année dernière, deux lois importantes ont été adoptées pour lever les verrous qui entravaient le développement des énergies renouvelables dans le cadre de la loi 13-09 et de l’autoproduction. La loi sur l’autoproduction a supprimé toutes les restrictions, en termes de puissance installée, et a mis en place une procédure de simple déclaration plutôt qu’une autorisation. De même, la loi 13-09 sur les énergies renouvelables a également été simplifiée, avec des procédures désormais digitalisées pour faciliter les démarches des entreprises», poursuit le DG de l’AMEE.
En outre, il indique que des garanties d’origine pour l’énergie verte ont été mises en place. Ces dernières permettront aux entreprises marocaines d’exporter plus facilement vers l’Europe. De son côté, le ministère de tutelle assure travailler acivement sur les décrets d’application de ces lois. Ce qui augure de nouvelles positives à venir au cours des prochains mois. Cela dit, le Maroc ne doit pas précipiter sa transition énergétique sans prendre en compte les coûts et la viabilité des différentes options technologiques.
Une transition sûre et viable
Comme le souligne Hassan Agouzoul, directeur de SDG Action et coordinateur de la stratégie nationale bas carbone, le secteur du transport et de la logistique est actuellement l’objet d’un effort mondial d’investissement dans la R&D, et le Maroc doit choisir avec prudence son option d’investissement. Pour lui, «aujourd’hui, si l’on suit l’actualité technologique internationale dans le domaine de la décarbonation des économies, on constate que le secteur des transports et de la logistique est celui qui fait l’objet de tous les efforts mondiaux d’investissement en R&D, mais dont les technologies matures, industrielles et compétitives ne sont pas encore prêtes. Il y a donc une compétition mondiale entre plusieurs options. Il est donc préférable d’attendre et de bien réfléchir à l’option et à l’investissement que le Maroc va choisir, plutôt que de se précipiter et de payer cher en termes de coûts et de viabilité».
Hassan Agouzoul ajoute que l’État est en train d’élaborer une stratégie bas carbone fédératrice à l’horizon 2050, qui implique toutes les forces vives du secteur public, du privé, des régions et des territoires. «Nous voulons mettre en place un cadre solide où tous les acteurs s’approprient le chemin critique. Le paramètre clé de cette stratégie est le couple technologie-coût, afin que cette transition soit sûre et garantie, et éviter les erreurs», affirme le directeur de SDG Action.
Améliorer la formulation de la CDN propre au secteur du transport
Selon Noureddine Dib, inspecteur général au ministère du Transport et de la Logistique, le Maroc figure parmi les rares pays à avoir proposé une Contribution déterminée au niveau national (CDN) pour les transports. Cependant, il est important de rappeler que ce secteur est le moteur de l’économie et que de nombreux pays ne veulent pas s’engager, vu les contraintes que cela entrainerait pour cette activité clé. Malgré cela, le Royaume a pris les devants.
D’après Noureddine Dib, les engagements sont même plus ambitieux que ce qui a été présenté dans la CDN. Toutefois, il reconnaît que la formulation pourrait être améliorée et que cela pourrait être envisagé lors de la révision prochaine. En effet, la Contribution déterminée au niveau national est un engagement pris par les pays signataires de l’Accord de Paris sur le climat pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Les engagements pris sont donc cruciaux pour la réalisation des objectifs climatiques mondiaux.
Les transports figurent parmi les principaux responsables des émissions de gaz à effet de serre, car ild représentent environ un quart des émissions mondiales. Il est donc essentiel que les pays prennent des engagements ambitieux pour décarboner leur secteur du transport. En tant que pays en voie de développement, le Maroc a l’opportunité de témoigner de son engagement dans la lutte contre le changement climatique en proposant des engagements ambitieux. Cependant, il est important que ces engagements soient réalisables et réalistes. La révision de la CDN devra tenir compte de ce double enjeu.
Modeste Kouamé / Les Inspirations ÉCO