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Régionalisation : La charte de la déconcentration administrative bloquée ?

La réussite du chantier de la régionalisation avancée est fortement tributaire de la mise en place d’une véritable déconcentration administrative. Or, la charte de la déconcentration administrative se fait toujours attendre.

Finalisée depuis des mois, la charte de la déconcentration administrative, qui est très attendue pour renforcer la régionalisation avancée, n’a pas encore vu le jour. Une réunion ministérielle devait se tenir en juillet dernier pour lancer son processus d’adoption, mais elle a été ajournée pour «des raisons d’agenda», selon une source gouvernementale qui précise qu’il fallait en premier lieu attendre l’adoption au Parlement des textes accompagnant la loi organique sur la régionalisation. Donc, c’est au prochain gouvernement de valider le projet dont l’approbation risque d’accuser un grand retard, bien qu’il ne soit pas à caractère politique. Le texte est technique et porte notamment sur la nature de l’organisation administrative, la relation entre les services extérieurs et le service central, la délégation des pouvoirs, les responsabilités au niveau central et régional, la relation entre les services extérieurs et l’autorité locale…

Le prochain Exécutif est appelé à inscrire ce chantier parmi les priorités, d’autant plus que la mise en œuvre de la charte de la déconcentration ne devrait pas nécessiter un budget supplémentaire, à en croire une source au ministère de la Fonction publique: «au contraire, la nouvelle organisation permettra d’optimiser les ressources et de les mutualiser par, notamment, le regroupement de certains services extérieurs, ce qui va permettre de rationaliser les dépenses et les moyens». Il s’agit d’un mécanisme de la plus haute importance qui va permettre de régler bon nombre de problématiques au niveau régional. En effet, en dépit des efforts entrepris au cours des dernières années, c’est toujours l’administration centrale qui détient les commandes. La charte de la déconcentration administrative permettra de définir le rôle de chaque acteur tant au niveau central que régional (wali, gouverneur, élus, administrations régionales).

L’idée est de mettre en place une organisation efficace pour élaborer des politiques sectorielles régionales tout en respectant les orientations nationales. Des projets territoriaux importants pourront voir le jour, à condition d’opter pour une approche d’action globale qui met l’accent sur plusieurs volets dont les incitations aux entreprises, la gestion foncière, la mise à niveau des agglomérations urbaines, l’amélioration des conditions de vie des citoyens, la formation des ressources humaines, la mise en valeur du patrimoine territorial… On s’attend à ce que la mise en œuvre des dispositions de la charte crée une nouvelle vision de gouvernance pour rendre les régions attractives à travers la réalisation des projets de territoire, levier d’accélérateur de développement. Mais sans le renforcement des pouvoirs des responsables locaux, il s’avère difficile d’accélérer le rythme de développement au niveau régional. Jusque-là, les administrations régionales ne disposent ni de l’autonomie, ni du budget nécessaire leur permettant de prendre des décisions sans recourir à l’administration centrale. Il s’agit d’un véritable frein au développement local.

Cette situation est appelée à changer grâce au chantier de la déconcentration administrative en déléguant le maximum des pouvoirs de l’administration centrale aux directions régionales. Comme nous l’avons déjà souligné, aux Inspirations Éco, des pôles interministériels par type d’activité seront constitués au niveau régional. Chaque région devra adapter les politiques nationales à ses spécificités. Les acteurs locaux sont, en effet, les mieux placés pour concevoir et mettre en place les stratégies de développement de leur propre région à condition que la coordination soit efficace. Dans ce cadre, le rôle du wali sera confirmé en tant que représentant du pouvoir central en région. Quant aux élus, les lois sur la régionalisation ont déjà régi leur relation avec les walis et les gouverneurs. 


Rachid Labker
Professeur de droit public

Les ÉCO :  Quelles sont les conséquences du retard accusé dans la mise en œuvre de la charte de la déconcentration administrative ?   
Rachid Labker : Depuis les assises sur les collectivités locales en 1998, la question de la nécessité de la délégation des pouvoirs et de la déconcentration administrative est mise au devant de la scène. Le débat a été lancé. Plusieurs textes ont été adoptés. Mais aucune loi n’a porté sur la déconcentration. Le gouvernement d’alternance a organisé le dialogue national sur l’aménagement du territoire national qui a jeté la lumière sur plusieurs questions, dont la nécessité de la révision du système de régionalisation et de décentralisation.
 
Que doit contenir la future charte de la déconcentration ?
Plusieurs attributions doivent être déléguées au niveau régional. Sur le plan financier, à titre d’exemple, on peut définir un seuil relevant des attributions régionales sans recourir à la validation de l’administration centrale pour accélérer la prise de décision. L’administration au niveau local doit être accompagnée par toutes les instances décisionnelles pour que toutes les administrations soient représentées localement. L’approche partenariale s’avère aussi de la plus haute importance.

À quoi est dû ce retard ?
Le retard est dû à deux facteurs. Le premier est d’ordre psychologique. Les pouvoirs publics demeurent toujours méfiants du local en tant que petite structure dont on n’arriverait pas à maîtriser le développement. Le deuxième facteur est d’ordre financier. La déconcentration est coûteuse et nécessite des cadres compétents, des administrations performantes et une bonne logistique. À l’heure actuelle, les administrations locales souffrent du manque de moyens et de cadres.



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