Réforme de l’enseignement. Le bilan d’étape
Le diagnostic provisoire de la mise en œuvre de la vision stratégique met en lumière plusieurs indicateurs cruciaux. Les détails.
C’est aujourd’hui à Rabat que Saïd Amzazi présentera son bilan d’étape de la réforme de l’enseignement au Maroc. Difficile exercice pour le ministre de l’Éducation nationale dans un contexte marqué par des attentes urgentes à plusieurs étages du système éducatif. Et surtout, ce besoin d’une réforme basée sur la gouvernance qui ne soit pas non plus budgétivore comme le fut par exemple le Plan d’urgence ayant nécessité 13 MMDH sans résultats probants. La moisson sera présentée sous forme de plusieurs chapitres déclinés en leviers chiffrés retraçant la mise en œuvre de la vision stratégique 2015-2025. Le document dont les ÉCO a eu copie se veut exhaustif et touchant à tous les aspects de la réforme avec même des perspectives chiffrées pour cette année et les années à venir.
Une école de l’équité et de l’égalité des chances
Ce sont huit leviers qui concernent cet aspect important représentant la finalité de toute réforme de l’enseignement. Ainsi, l’accès à l’éducation a été renforcé par la création de 389 établissements scolaires depuis 2015, 149 internats ainsi que le recrutement de 70.000 enseignants qui totalisent aujourd’hui 246.000 personnes. Toutefois, les écoles communales n’ont pas connu la même dynamique avec la création de seulement 39 écoles sur la même période portant leur nombre à 135. Pour renforcer l’offre en infrastructure éducative, le ministère prévoit la création de 33 nouvelles écoles communales en partenariat avec les conseils locaux. Est prévue également la construction de 35 internats et 10 maisons de l’étudiant. Et malgré le déficit en transport scolaire, il faut savoir que l’offre a quand même évolué de 279% depuis 2015 profitant aujourd’hui à 240.209 élèves. Quant au budget alloué aux internats et cantines scolaires, il aura évolué de 63% par rapport à la précédente rentrée scolaire avec une enveloppe globale de presque 1,5 MMDH. Par ailleurs, le programme Tayssir profite aujourd’hui à 1,2 million de familles avec un budget de 2,1 MMDH et une évolution de 183% depuis 2015. Grâce à tous ces facteurs, le département d’Amzazi ambitionne de réduire le taux de décrochage scolaire à 3% à l’horizon 2025. Le taux de scolarisation a atteint des taux important de 99,7% dans le primaire et 91,1% dans le secondaire mais de seulement 66,2% dans le secondaire qualifiant. Ce faible taux s’explique notamment par l’orientation des élèves vers les filières de la formation professionnelle. Intégration des enfants en situation de handicap. Sur ce registre, l’on compte 80.000 enfants en situation de handicap léger ou moyen dans les classes normales. L’on se penche actuellement sur l’adaptation des programmes ainsi que les structures d’accueil de certains établissements scolaires pour faciliter l’intégration de cette catégorie d’élèves. Sur un autre registre, le ministère prévoit la création de 80 centres de la deuxième chance à l’horizon 2022.
Amélioration de l’apprentissage
Sur le chapitre de la mise à niveau des établissements scolaires, 1.993 unités seront concernées par ce programme en 2019 et l’ambition de se débarrasser complètement des écoles en préfabriqué en 2021. L’on remarque aussi une amélioration des taux de réussite dans tous les cycles de l’enseignement avec notamment 89,8% aux épreuves de la 6e année du primaire, 67,9% à la 3e année du collège et 71,9% au baccalauréat. Ce qui dénote, estime Amzazi, de l’amélioration notoire du niveau d’apprentissage des élèves marocains. Sur ce même chapitre, des projets sont dans le pipe comme l’actualisation du règlement intérieur des établissements scolaires ainsi que le guide référentiel des activités de la vie scolaire et la création de 25.000 clubs éducatifs et thématiques.
Quid de l’enseignement privé ?
Le bilan parle de l’octroi de 1.000 autorisations entre 2015 et 2018 mais aussi la mise en place de comités provinciaux de contrôle et la mise en place d’un cadre légal pour maîtriser les infractions. Un suivi particulier concernera les établissements privés où l’on a constaté un écart dans les notes des élèves entre les épreuves unifiées et ceux du contrôle continu.
200 MDH pour la formation continue des enseignants
Pour arriver à une école de la qualité, plusieurs formules ont été expérimentées mais sans résultats consistants. En cette année 2019, un programme de formation continue aux profits des enseignants sera mené avec un budget de 200 MDH avec notamment l’appui d’une plateforme électronique de formation à distance e-takwine. Tout cela dans un cadre global de gouvernance des métiers de l’éducation, la formation et la gestion. Il porte sur la préparation d’un projet de statut des métiers de l’enseignement actuellement à l’étude avec les syndicats du secteur mais également sur le recrutement régional des enseignants et cadres de soutien technique qui relèvera de la compétence des académies régionales au même titre que la gestion des ressources humaines. S’y ajoute un projet de guide de gestion des RH dans les établissements scolaires.
Du nouveau pour le baccalauréat marocain
La qualité dépend aussi du niveau d’implémentation de l’enseignement préscolaire comme prouvé par moult études. Sur ce chapitre, le ministère s’engage à l’intégration du préscolaire dans le primaire après sa généralisation. N’est pas moins importante, voire cruciale, la réforme des programmes et curricula qui a fait l’objet de débat et de mécontentement de la part des parents d’élèves. Sur ce registre, le document parle d’un programme complètement révisé et généralisé pour le primaire à l’horizon 2021. Ainsi pour la rentrée scolaire
2019-2020, 26 nouveaux manuels scolaires seront édités dans le primaire et autant de guides pédagogiques. Pas moins de 78 manuels des sciences et mathématiques en français du cycle collégial et du baccalauréat feront l’objet d’une évaluation. Autre nouveauté, l’introduction d’une classe de philosophie dans le cycle du baccalauréat professionnel. Fait marquant, Amzazi annonce une nouvelle architecture du baccalauréat marocain basé sur l’unification des branches à partir de la rentrée prochaine.
Gouvernance budgétaire, l’efficience recherchée
En plus de la mise en œuvre graduelle de la Loi organique des finances, le renforcement des mécanismes de la gouvernance financière passe aussi par l’élaboration d’un guide des procédures comptables ainsi que le renforcement des systèmes d’information des AREF. Le département de tutelle envisage également d’établir un mode de comptabilité analytique en vue d’instaurer une batterie de règles prudentielles, dont l’application facilitera l’optimisation des dépenses. Le chantier de la gouvernance englobe aussi «Massar», qui devra profiter des évolutions attendues en matière d’administration numérique. L’objectif est de pouvoir instaurer des modalités de diffusion d’informations fiables englobant un nouveau modèle pour les statistiques ainsi que la simplification des procédures devant les élèves. Des investissements prévisionnels ont été aussi prévus pour la mise en place d’un centre national des données. Au niveau éducatif, la gouvernance devra se focaliser sur les trois prochaines années pour que 6.000 établissements puissent incarner le nouveau mode de gouvernance.
Enseignement supérieur, l’employabilité prioritaire
La mise en place de 3 centres pilotes pour le développement des compétences (Career Center) a été opérée en partenariat avec l’USAID «dans l’optique de la généraliser à toutes les universités», précise le bilan d’étape. L’État compte prioriser les soft skills en procédant à la formation de formateurs dans ce domaine et dans le cadre du package «Najahi». Les intervenants dans ce vaste champ de l’adéquation des formations aux demandes du marché du travail seront associés à la révision des programmes des filières en fonction des exigences des nouveaux métiers. Actuellement, ce sont 50% des filières accréditées avec comme objectif à court terme l’unification des branches destinées aux ingénieurs ainsi que les spécialités technologiques qui sont ouvertes au sein des universités.