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Rapport de Bank Al-Maghrib : L’économie faiblement résiliente

C’est le bilan d’une année difficile que retrace le rapport annuel de la Banque centrale sur la situation économique, monétaire et financière, présenté au roi samedi dernier. Le rapport souligne la faible résilience de l’économie marocaine et la nécessité d’adopter une nouvelle génération de réformes.

C’est un rapport accablant qu’a présenté le wali de Bank Al-Maghrib (BAM) au roi à la veille de la Fête du Trône. Le Maroc affiche, au terme de 2016, une faible résilience. Telle est la conclusion de Abdellatif Jouahri qui appelle à l’initiation d’«une nouvelle génération de réformes à même de renforcer la résilience de l’économie dans un environnement international incertain». Il faut dire que dans un contexte international de convalescence des pays développés, suite aux crises qui ont sévi ces dernières années, le Maroc n’est toujours pas en mesure de s’affranchir de cette dépendance vis-à-vis de ses partenaires historiques. L’économie marocaine a, en effet, subi les séquelles de cet environnement externe global défavorable, mais aussi de conditions climatiques particulièrement sévères. Jouahri souligne dans ce sens que «l’économie nationale a connu une année difficile sur plusieurs fronts».

Une croissance au plus bas
Le wali de BAM relève une croissance économique limitée à 1,2%, soit le taux le plus bas depuis 2000, ainsi qu’une forte contraction de la valeur ajoutée agricole et la persistance de l’atonie des secteurs non-agricoles. De même, l’activité a nettement ralenti dans les industries de transformation et a continué d’évoluer à un rythme faible dans le BTP. Seul le tertiaire affichait une relative amélioration, notamment au niveau des services non-marchands, du commerce et du tourisme. «Du côté de la demande, après deux années de participation positive, la contribution des exportations nettes à la croissance est ressortie négative, alors que la demande intérieure a marqué une hausse de 5,5% tirée par une augmentation notable de l’investissement», souligne Jouahri.

Une perte nette de 37.000 emplois
Fortement lié à la croissance économique, le marché du travail a été très impacté par cette situation de baisse. Il a été enregistré une perte nette de 37.000 postes, la première depuis 2001, recouvrant une diminution de 63.000 en zones rurales et une augmentation de 26.000 en milieu urbain. À l’origine de cette perte, on notera la destruction de 119.000 postes dans l’agriculture. Une destruction qui fut toutefois, limitée par la création d’emplois -bien que faible- dans les autres secteurs. Les services ont créé 38.000 postes contre une moyenne de 90.000 entre 2000 et 2013. L’industrie, y compris l’artisanat, n’a généré que 8.000 postes, soit un cumul de 23.000 sur les deux premières années de mise en œuvre du Plan d’accélération industrielle. En revanche, l’emploi a poursuivi son amélioration dans le BTP avec une création de 36.000 postes après 18.000 un an auparavant. Le taux de chômage ressort, en conséquence, légèrement amélioré pour se fixer à 9,4%.

Un déficit budgétaire qui ne recule pas
Sur le plan des équilibres macroéconomiques, Jouahri souligne que «le processus d’ajustement budgétaire, entamé en 2013, ne s’est pas poursuivi selon le rythme prévu». Le déficit s’est ainsi quasiment stabilisé à 4,1% du PIB, alors que la Loi de finances tablait sur 3,5%. À l’origine de ce maintien de niveau de déficit, le wali cite le taux d’exécution élevé des dépenses d’investissement, les importants remboursements de crédits de TVA et le niveau bas des rentrées des dons des partenaires du CCG, par rapport au montant programmé. Pour contenir le niveau des dépenses globales de l’État, la masse salariale a été contenue. Son ratio au PIB a été même réduit à 10,3%. Cependant, et malgré les efforts de décompenser nombre de produits, la charge de compensation a connu une légère progression après trois années de baisse. Dans ce sillage, l’endettement du Trésor a poursuivi sa tendance haussière pour atteindre 64,7% du PIB. Sa composante intérieure a augmenté à 50,6% et celle extérieure à 14,1% du PIB. Tenant compte de l’augmentation de la dette extérieure des entreprises et établissements publics, le taux d’endettement public global s’est alourdi à 81,4% du PIB. De même, après une atténuation importante depuis 2013, le déficit du compte courant s’est aggravé de 2,1% du PIB en 2015 à 4,4% en 2016.

Une balance commerciale détériorée…
Selon la Banque centrale, la balance commerciale s’est détériorée en 2016 après avoir enregistré trois années d’amélioration. Le déficit de ladite balance s’est ainsi creusé à 18,2% du PIB. Toutefois, il y a lieu de souligner que si la principale cause de cette détérioration est l’augmentation des importations, celles-ci sont composées principalement de biens d’équipement, signe d’une accélération des investissements. Parallèlement, les exportations ont connu un ralentissement sensible de leur rythme de progression, attribuable en grande partie au recul des prix des phosphates et dérivés sur le marché international. Par ailleurs, et comme à l’accoutumée, les recettes de voyages et les transferts des MRE ont enregistré un renforcement notable. Ces dernières ajoutées aux entrées de dons des partenaires, bien qu’inférieures à ce qui fut attendu, ont permis une entrée, globale de 7,2 MMDH. Le déficit du compte courant est ainsi ressorti à 4,4% du PIB contre 2,1% une année auparavant.

….Mais les réserves de change sont en hausse
Grâce aux recettes des MRE, aux entrées de voyages, aux dons du CCG mais aussi aux entrées d’IDE, les réserves de change ont pu progresser de 12,1%. Il faut bien souligner que les investissements directs étrangers, bien qu’ils soient en baisse, sont restés importants. Ils se sont chiffrés à 33 MMDH. Au total, les réserves internationales nettes ont poursuivi leur renforcement atteignant 251,9 MMDH à fin décembre, couvrant, ainsi plus de 6 mois et 18 jours d’importation de biens et services.

Inflation modérée
Pour sa part, le niveau d’inflation -mesuré par la variation de l’indice des prix à la consommation- est resté modéré en 2016. Ce taux s’est établi à 1,6%, soit le même qu’en 2015. Ce niveau de taux cache toutefois un fort renchérissement des denrées alimentaires à prix volatiles. Ces dernières, après avoir enregistré une hausse de 4,3% en 2015, leur progression s’élève à 7,5% en 2016, soit le taux le plus élevé au cours des huit dernières années. Selon la Banque centrale, «cette accélération est imputable à une série de chocs qui ont impacté négativement l’offre de plusieurs produits alimentaires frais». Parallèlement, les prix des carburants et lubrifiants ont freiné leur baisse. Le repli passe de 16,1% à seulement 1,7% en raison du retournement de la tendance baissière des cours internationaux des produits pétroliers dès le début de 2016. Ce sont plutôt les produits réglementés qui ont permis de contenir le niveau d’inflation. Après une forte hausse de 2,9% en 2015, les tarifs des produits réglementés ont connu une progression de 0,8%, suite notamment à la suspension de la hausse programmée pour les services de distribution de l’eau potable dans le cadre du contrat-programme conclu entre l’État et l’ONEE en 2014. Pour sa part, l’inflation sous-jacente est revenue de 1,3% à 0,8% dans un contexte marqué par l’atonie de la demande et la faiblesse de l’inflation importée.

Flexibilisation, premier pas dans la nouvelle génération des réformes
L’essoufflement de l’élan de croissance amorcé en 2000 et la faiblesse de l’offre exportable du royaume, qui aurait pu le prémunir des chocs exogènes, rendent l’adoption d’une nouvelle génération de réformes à même de renforcer la résilience de l’économie dans un environnement international incertain, plus que nécessaires. Pour le wali de la Banque centrale ces réformes doivent s’attarder sur l’amélioration de la productivité, seul gage de la croissance à long terme tout autant que sur la transformation digitale, quatrième révolution industrielle. Quant à la flexibilisation du régime de change, Jouahri précise que c’est dans le cadre de cette nouvelle génération de réformes qu’elle a été entreprise. Elle permettra de rehausser la capacité de l’économie à absorber les chocs externes et de soutenir sa compétitivité.



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