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Établissements et entreprises publics : Le Maroc S.A. très endetté !

Dans son dernier rapport, la Cour des comptes a tiré une nouvelle fois la sonnette d’alarme sur l’endettement des Établissements et entreprises publics (EEP). Retour sur les principaux chiffres.

Driss Jettou, 1er président de la Cour des comptes, revient à la charge. Après avoir évoqué le risque de la dette des EEP lors de la présentation de son rapport annuel devant le Parlement, le président des tribunaux financiers du Maroc, donne plus de détails sur ce sujet dans son nouveau rapport sur les EEP.

Un secteur «surendetté»
Les sources d’inquiétudes, selon la Cour des comptes, sont multiples. Une évolution de l’endettement depuis 2008 de 103%, avec un pic en 2013 ; des ratios fonds propres/endettement atteignant dans certains cas 495% (Autoroute du Maroc). La structure des dettes de financement des EEP est un autre facteur à donner des sueurs froides pour les gestionnaires des finances publiques. La dette des EEP est libellée à 65,2% en devises. «Comparativement à son poids dans l’économie nationale, le secteur des EEP est manifestement surendetté à l’extérieur exigeant un dispositif dynamique de suivi et de surveillance», précise la Cour.

L’augmentation «importante» de l’endettement que connaissent les EEP, enregistrée depuis le début de la décennie 2010, «pourrait constituer une source de fragilité pour le secteur», avertit la Cour. À fin 2015, l’encours des dettes de financement des EEP a atteint 245,8 MMDH, ce qui représente environ 25% du PIB. Cette augmentation des dettes de financement des EEP est concentrée au niveau des principaux EEP engagés dans des programmes d’investissement. Il s’agit en l’occurrence du groupe OCP, ONEE, ADM, ONCF, RAM, TMSA, MASEN, Caisse de financier routier (CFR) et certaines filiales du groupe CDG. L’encours des dettes contractées par ces organismes représente plus de 90% du total endettement du secteur et des dettes contractées en devises. Cette lourde ardoise est la conséquence des programmes d’investissement, lancés par les EEP dans le cadre de la politique des grands chantiers ou l’accompagnement des plans sectoriels.

La cour donne les exemples des programmes structurants pour le raccordement à l’eau potable, la production des phosphates et ou le développement des énergies renouvelables. Côté infrastructures, ces emprunts ont financé, «la réalisation d’infrastructures de transport moderne dans les domaines autoroutier, ferroviaire, portuaire et aéroportuaire et le développement de la connectivité maritime du Maroc grâce notamment à la mise en exploitation du port Tanger-Med». À l’heure du ralentissement économique et des performances de certaines EEP, ces dettes peuvent constituer un risque pour les finances publiques.

65,2% en devises
La dette extérieure des EEP totalise à fin 2015, 160,3 MM DH, soit 65,2% du total endettement du secteur, et représente 17% du PIB. Sur ce stock, 106 MMDH sont garantis par l’État. Un fait important à signaler, près du tiers des dettes extérieures est le fait de l’OCP. «L’augmentation continue de la part de la dette en devises, depuis 2012, est porteuse de risques pour les finances publiques, car toute défaillance des organismes débiteurs dans le règlement de leurs dettes garanties, entraînera leur prise en charge par le budget général de l’État», prévient la Cour.

Cette situation présente aussi des risques liés à l’équilibre financier fragile que connaissent certains EEP (le cas de l’ONEE), un risque de change pouvant impacter substantiellement les résultats de ceux qui ne réalisent pas de chiffre d’affaires en devises. Toutefois, les magistrats de la cour considèrent que «le recours de plus en plus fréquent de certains EEP à des financements externes sans recours à la garantie de l’État dénote de la maturité de ces organismes et traduit la confiance des bailleurs de fonds reflétant une maîtrise des risques associés», note cette juridiction financière. Par ailleurs, l’encours de la dette des EEP garantie par le Trésor s’élève à 126,8 MM DH, dont 105,1 MM DH en devises. Le ratio fonds propres/dettes est le dernier facteur à surveiller de près. Certains EEP enregistrent des niveaux d’endettement par rapport à leurs fonds propres qui ont atteint des seuils importants. Les EEP enregistrant des taux d’endettement élevés, sont ADM (495%), ONEE (331%), RAM (228%), OCP (88%) et ONCF (88%) ! 


 

Répartition de l’endettement des EPP (en MMDH)

ONEE : 56,8 (23%)
Groupe OCP : 54,7 (22,5%)
ADM : 39,9 (16,2%)
Groupe CDG : 24,7 (10%)
ONCF : 23,9 (9,7%)
TMSA : 10,7 (5%)
MASEN : 9,3 (4%)
CFR : 6,6 (3%)
RAM : 5,4 (2%)
Autres : 13,8 (6%)


 

Proposition d’une veille permanente
La Cour des comptes recommande «d’exercer une veille permanente sur l’endettement des EEP», car ce volet devrait constituer une «préoccupation majeure». La cour propose de mettre en place ce dispositif, à faire piloter par le ministère de l’Économie et des finances. Ces missions seront d’être «informé en temps réel sur l’endettement des EEP» ; fixer des ratios et règles prudentiels que les EEP doivent respecter en matière de financement extérieur ; recourir à des instruments pour border les risques et réduire le coût de la dette : garantie des risques de change, recours à des garants autres que l’État, règlement anticipé des dettes onéreuses, diversification des monnaies d’emprunt; enfin le mixage des emprunts locaux avec les emprunts extérieurs.



Gouvernance des EEP : une réforme en profondeur se prépare


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