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Emploi : Résultats mitigés !

Bilan Gouvernemental «2»

Emploi : Résultats mitigés !

Après l’analyse du Plan Maroc Vert (édition du 15/8/2016), les ÉCO se penche sur le  bilan du  gouvernement sur le dossier de l’emploi. En dépit des mesures incitatives prises en matière de la promotion de l’accès au marché du travail,  l’amélioration de la protection sociale et du travail décent,  l’Exécutif n’est pas parvenu à mettre en œuvre sa promesse de réduction du taux de chômage à 8%.

L’emploi est parmi les dossiers épineux dont le gouvernement devra rendre compte en cette fin de mandat. Lors de la déclaration gouvernementale en janvier 2012, le chef de l’Exécutif n’a mentionné qu’un seul engagement chiffré en matière de promotion de l’emploi : la réduction du taux de chômage à 8 %. À moins de deux mois de la fin du mandat gouvernemental, le gouvernement n’a pas réussi à concrétiser cet engagement. Le taux de chômage qui s’est situé à 10% au premier trimestre de cette année est de 8,6% au deuxième trimestre, selon la dernière note d’information du Haut-commissariat au plan sur la situation du marché du travail. Et l’on s’attend à clôturer cette année avec un taux de chômage dépassant 9%.

Ce pourcentage est très élevé parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans. Il est passé à 21,5% alors que celui des femmes est à 9,9% et que le taux de chômage des lauréats des grandes écoles et instituts a augmenté à 9,1%. L’opposition tire à boulets rouges sur le gouvernement alors que l’Exécutif brandit la carte de la conjoncture économique mondiale, d’autant plus que la promotion de l’emploi est largement tributaire du taux de croissance. Sur ce point, le gouvernement n’a pas non plus tenu ses engagements. Sur les cinq ans du mandat du gouvernement de Benkirane, le taux de croissance réalisé par le Maroc ne dépassera pas la moyenne quinquennale de 3,2% alors que l’engagement gouvernemental était de 5,5%.

En gros, le Maroc a enregistré la création nette de 42.000 emplois en moyenne par an entre 2012 et 2015 dans le secteur privé. Un chiffre jugé on ne peut plus insuffisant en raison des flux annuels de demandeurs d’emploi. Dans la fonction publique, le nombre de postes budgétaires programmés sur cinq ans est de 116.977. Les projections des besoins en création d’emplois nouveaux sur la prochaine décennie indiquent la nécessité de créer au moins 200.000 emplois par an. Cette ambition pourrait être réalisée dans les années à venir grâce aux stratégies sectorielles dont le Plan d’accélération industrielle qui prévoit la création de 500.000 postes d’emploi à l’horizon 2020.

Résultats mitigés des programmes d’emploi
Le gouvernement, qui est parvenu à faire face aux protestations des jeunes diplômés en imposant la procédure des concours pour l’accès à la fonction publique, a mis en place quelques initiatives pour la promotion de l’emploi dans le secteur privé. L’Exécutif s’était engagé en 2012 à veiller au suivi de la mise en œuvre et au développement des programmes «Taahil», «Moukawalati» et «Idmaj», pour en améliorer l’efficience, tout en adoptant de nouveaux programmes. Chapeauté par l’Anapec, le programme Idmaj a été pendant longtemps pointé du doigt en raison de la précarité de l’emploi généré.

Pour résoudre en partie cette problématique due aux pratiques de certaines entreprises, la loi sur le contrat d’insertion a été rectifiée en introduisant certaines mesures (couverture médicale pendant 24 mois, durée de stage ne dépassant pas 24 mois, engagement de l’entreprise à recruter au moins 60% des stagiaires). Au titre de l’année 2015, les réalisations s’élèvent à 70.123 insertions dont 3.045 dans le cadre du placement à l’international. Entre 2012 et 2015, environ 250.000 chercheurs d’emploi ont été insérés et plus de 70.500 personnes ont bénéficié de programmes d’amélioration de l’employabilité. Plus de 7.200 porteurs de projets ont été accompagnés.

Le programme «Moukawalati» pour le soutien à la création d’entreprise, rappelons-le, s’est révélé un véritable échec et a dû être arrêté pour lancer de nouvelles mesures en matière d’auto-emploi. Au niveau de l’accompagnement des chercheurs d’emploi licenciés, le gouvernement n’a lancé qu’en 2016 le programme d’encadrement de 25.000 jeunes sur 3 ans dans plusieurs domaines et spécialités.

Ces jeunes devront être insérés dans le secteur privé qui est appelé à s’ouvrir sur ces nouvelles compétences fraîchement formées. Le programme Moubadara portant sur la promotion de l’emploi dans le secteur associatif, qui figure dans le programme gouvernemental est resté jusque-là lettres mortes. Le département de l’Emploi espère l’activer en 2017 en l’incluant au projet de budget de 2017. Quant au dispositif «Tahfiz» d’appui à l’emploi pour les entreprises nouvellement créées, il n’a pas donné l’effet escompté et devra être révisé en 2017.

Une stratégie nationale en fin de mandat
En vue de mettre en œuvre une vision claire à l’horizon 2025, le gouvernement a élaboré la stratégie nationale de l’emploi, mais en fin de mandat (2015). Aujourd’hui, il s’avère nécessaire de mettre en œuvre cette stratégie et de procéder à la territorialisation de ses objectifs en vue d’assurer l’adéquation formation-emploi, l’égalité des chances entre les régions et de faciliter l’insertion professionnelle des jeunes. Les objectifs fixés sont ambitieux, et il faudra ainsi se doter des moyens nécessaires pour les concrétiser.

Insuffisance des inspecteurs du travail
Sur le plan de la protection des droits des travailleurs, le nombre d’inspecteurs du travail reste très faible par rapport aux besoins. Un grand manque est constaté dans le domaine, mais sans pour autant que des efforts soient déployés pour rectifier le tir. Dans l’immédiat, le besoin se chiffre à plus de 400 inspecteurs du travail pour améliorer le contrôle et par conséquent les conditions de travail. Les postes budgétaires sont donnés au compte-gouttes. L’année dernière, le ministère de l’Emploi a eu droit à 5 postes budgétaires et 10 cette année.

L’IPE demeure perfectible
Le gouvernement est aussi très attendu sur l’amélioration du dispositif de l’indemnité pour perte d’emploi mis en place en 2015. Les prestations servies de cette indemnité par la CNSS s’élèvent à 85,4 MDH pour la période allant de décembre 2014 à fin décembre 2015, au profit de 10.404 bénéficiaires alors que l’objectif de départ était d’en faire bénéficier 30.000 personnes par an. Les conditions pour l’accès à l’indemnité pour perte d’emploi sont jugées trop draconiennes. C’était voulu au départ pour assurer la viabilité du système. Aujourd’hui, il s’avère nécessaire de revoir les critères d’éligibilité et de les assouplir surtout que le budget est disponible. Le taux de rejet est grand car les demandeurs ne remplissaient pas les critères (non cumul du nombre de jours de cotisation, manque de pièces, l’existence de déclarations de salaires dans la période de perte d’emploi, dépôt de la demande hors délais, démission ou abandon de poste).

Couverture sociale, un chantier ouvert
Le gouvernement de Benkirane était aussi très attendu sur le volet de la couverture sociale. Aujourd’hui, les régimes d’assurance maladie obligatoire et de retraite des salariés ne concernent que le tiers de la population active occupée. Certes des actions ont été lancées en la matière, mais il s’avère nécessaire de poursuivre les efforts tendant à développer, étendre et généraliser la protection sociale et la couverture médicale aux catégories non couvertes, dont notamment les travailleurs indépendants et ceux des professions libérales.

L’extension de l’AMO aux indépendants concerne 11 millions de personnes. Le projet de loi 98-15 relatif au système de l’assurance maladie obligatoire destiné aux professionnels, travailleurs indépendants est entre les mains de la Chambre des représentants après son adoption par les conseillers juste avant la clôture de la session printanière. Quant au texte relatif à la retraite des professionnels et travailleurs indépendants, il est toujours chez les conseillers. Un autre projet s’avère important : le projet de loi 109.12 portant Code de la mutualité, qui a été largement contesté.

Il est au stade final au Parlement après son adoption au début août  par la Chambre des représentants. Par ailleurs, la loi 18.12 relative à la réparation des accidents du travail est entrée en vigueur (publication des 6 arrêtés du ministre de l’Emploi et des affaires sociales le 14 mars 2016). Le volet législatif a été renforcé  par l’adoption de la loi sur le travail domestique après des années de blocage. Le texte qui a été vertement critiqué en raison notamment de l’âge minimal du travail domestique a finalement franchi le cap du Parlement en cette fin de législature. Finalement, l’âge minimal a été fixé à 18 ans après une phase transitoire de cinq ans à partir de l’entrée en vigueur du texte.

Retard législatif
Toujours sur le volet législatif, on reproche au gouvernement le retard pris dans l’élaboration du projet de loi organique sur la grève qui n’a été examiné par le Conseil de gouvernement que le 28 juillet dernier.  Par ailleurs, le gouvernement n’a pas mis dans le circuit législatif, comme attendu, le projet de loi sur les syndicats. II s’agit d’un autre projet sensible que le gouvernement a hésité à mettre sur les rails bien que le texte soit ficelé selon la même philosophie que celle de la loi sur les partis politiques. Le texte devrait contribuer un tant soit peu à la rationalisation de la scène syndicale à travers notamment le contrôle par la Cour des comptes des finances des syndicats, la limitation des mandats pour les secrétaires généraux et la démocratie interne.

Dialogue social au point mort
Le gouvernement est épinglé par les partenaires sociaux en raison de «l’échec» du dialogue social.  Le dernier round des négociations à la veille du 1er mai n’a été couronné par aucun accord en raison du dossier de la réforme des retraites. L’Exécutif n’a pas non plus répondu à la doléance des centrales syndicales ayant trait aux augmentations salariales. Le gouvernement, pour sa part, met en avant ses réalisations en particulier la consécration d’une enveloppe de 13,2 MMDH pour  la mise en oeuvre des contenus de l’Accord du 26 avril et l’augmentation du salaire minimum dans la fonction publique à 3.000DH ainsi que du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) dans le secteur privé de 10%.


 

Abdesselam Seddiki,
Ministre de l’Emploi
et des affaires sociales

«Le gouvernement n’a pas concrétisé l’engagement de porter le taux de chômage à 8% car l’engagement de porter le taux de croissance à 5,5% n’a pas été concrétisé…L’idéal était de passer à l’instauration de l’assurance contre le chômage qui donne des chiffres précis sur le taux du chômage, mais cette mesure n’est pas simple. Le budget minimaliste pour appliquer cette mesure est estimé à 24 MMDH par an. Notre pays ne peut pas se permettre de débourser une telle somme. Tant qu’on n’instaure pas cette indemnité, les chiffres sur le chômage restent approximatifs».

 


 

Précarité  
Selon la dernière note d’information du Haut-commissariat au plan publiée le 5 août sur le marché du travail, le taux d’activité entre le deuxième trimestre de l’année 2015 et la même période de 2016, continue à connaître la même tendance baissière, passant de 48% à 47,2%. Dans ce contexte, l’économie marocaine a perdu 26.000 postes d’emploi, contre une création annuelle moyenne de 74.000 au cours des trois dernières années. Ce recul dans le volume de l’emploi est, selon le HCP, le résultat de la création de 38.000 postes en milieu urbain et de la perte, en raison de la mauvaise campagne agricole, de 64.000 en milieu rural. Le secteur de «l’agriculture, forêt et pêche» a perdu 175.000 postes d’emploi alors que les services en ont créé 70.000, les BTP 41.000 et l’industrie y compris l’artisanat 38.000 postes. Ces emplois restent caractérisés en général par l’informel et la précarité, notamment dans le secteur des BTP et celui des services, en particulier dans les branches des «services personnels et domestiques» (35.000 emplois) et du «commerce de détail hors magasin» (25.000 emplois).


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