Commerce extérieur : Mauvaise passe pour les partenaires du Maroc

Les perspectives ne s’annoncent pas des plus reluisantes pour l’économie mondiale. En dépit d’une hausse des exportations, la demande extérieure adressée au Maroc va connaître une contribution négative en 2016. L’une des principales raisons, c’est la situation économique atone que traversent certains des principaux partenaires commerciaux du royaume.
À la place de l’incertitude et des espoirs de reprise qui caractériseraient les perspectives économiques mondiales ces dernières années, 2016 s’annonce avec des projections des plus pessimistes. Si la Banque mondiale, qui vient de publier ses premières perspectives économiques pour la nouvelle année, table sur des prévisions de 2,9% contre 2,5% en 2015, les analyses convergent vers une nouvelle année de vaches maigres en 2016. Il est vrai que cette évolution reste conditionnée par un ensemble de facteurs, mais le scénario n’augure rien de bon pour le Maroc qui a fait, depuis quelques années, le choix de l’ouverture économique.
Cela d’autant plus que cette morosité de l’économie mondiale touche de plein fouet les principaux partenaires du royaume. Dans son budget exploratoire 2016, le HCP a anticipé une contribution négative, environ 0,5 point, de la demande extérieure au lieu d’une contribution positive en 2014 et 2015. «Ce résultat serait dû à la hausse de 3,2% des importations de biens et services en volume au lieu d’une baisse d’1% en 2015 et du léger accroissement des exportations de 2,6% contre 1,9% en 2015», a estimé le HCP. Selon la Banque mondiale, c’est l’atonie de la croissance dans les principaux pays émergents qui pèsera sur la croissance mondiale en 2016, «mais l’activité économique devrait se raffermir quelque peu et la croissance atteindre 2,9%, contre 2,4 % en 2015, soutenue par une reprise dans les pays développés».
D’après les nouvelles estimations, la croissance économique mondiale a été plus faible que prévue en 2015 et il est attendu une légère reprise cette année dans les pays développés, notamment de l’Union européenne. La situation demeure encore toutefois incertaine pour ce qui sera du comportement dans les prochains mois de la demande extérieure adressée au Maroc, même s’il est attendu que les exportations continuent à connaître une sensible hausse. Cependant, tempère Ayhan Kose, directeur du groupe «Perspectives des services, économie du développement de la Banque mondiale» : «un raffermissement de la croissance dans les pays développés ne compensera que partiellement les risques d’une atonie persistante dans les principaux pays émergents».
Zone euro
Légère reprise en vue
Avec plus de 60% de parts des échanges du Maroc, les pays de la zone euro constituent le premier partenaire commercial du Maroc. De ce fait, la croissance du PIB national est fortement corrélée à l’évolution de la situation dans cette zone et l’atonie qu’elle a connu ces dernières années a lourdement impacté l’économie nationale. Selon les différentes projections, la reprise est en train de se consolider mais elle sera «légère» à court terme. En clair, elle restera en dessous de 3% jusqu’en 2017. Après 1,6% en 2015, l’UE table désormais sur une croissance d’1,8% pour 2016. Les premiers partenaires commerciaux du Maroc, la France et l’Espagne, continuent à afficher une grise mine. Ainsi, l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) s’attend à une croissance d’1,8% pour la France en 2016. Pour ce qui est de l’Espagne, la Banque d’Espagne s’attend à un meilleur cru, 2,8% pour la même année.
Afrique subsaharienne
L’UEMOA en force
Selon la Banque mondiale, la croissance de la région devrait s’accélérer pour passer de 3,4% en 2015 à 4,2% en 2016 grâce à la stabilisation des prix des produits de base. Il va sans dire que l’activité économique variera d’un pays subsaharien à l’autre. Ainsi, la croissance de la consommation demeure faible dans les pays exportateurs de pétrole du fait de la hausse du coût des carburants, tandis que le ralentissement de l’inflation dans les pays importateurs de pétrole contribue à doper les dépenses de consommation. Ce sont par conséquent les pays membres de l’UEMOA, principaux partenaires du Maroc dans la région, qui affichent les plus forts taux de croissance du PIB. En 2015, ladite croissance y a été estimée à plus de 6% soit plus que la Chine et pour 2016, la même dynamique est attendue, principalement portée par l’évolution que connaît la Côte d’Ivoire (9%) et dans une moindre mesure le Sénégal (6%) ou le Mali (6%). La croissance de l’Afrique subsaharienne reste lourdement impactée par la baisse des cours des matières premières, principalement le pétrole, ainsi que par la situation en Chine, premier partenaire commercial de la région. La croissance du Nigéria devrait s’établir, par exemple, à 4,6%, contre 3,3% l’an dernier, tandis que celle de l’Afrique du Sud progressera sans doute modestement pour atteindre 1,4%, contre 1,3% l’année dernière.
Pays du Golfe et MENA
En zone de turbulences
L’année 2016 s’annonce sous de mauvais auspices pour les pétromonarchies du CCG. La baisse du cours du pétrole, qui a perdu les 2/3 de sa valeur en dix huit mois, ainsi que sa persistance pèsent lourdement sur ces économies majoritairement dépendantes de l’évolution des cours de l’or noir. La preuve de cette zone de turbulences n’est autre que l’Arabie saoudite, qui est entrée cette année dans une période d’austérité budgétaire. À cette situation vient s’ajouter la persistance de risques d’instabilité géopolitique. Cependant, dans la région MENA, il est attendu que la croissance s’accélère pour atteindre 5,1% en 2016, contre 2,5% l’année dernière, selon la Banque mondiale. L’activité devrait également se renforcer dans d’autres pays exportateurs de pétrole, surtout dans l’hypothèse d’une stabilisation des prix du pétrole. Il faut dire qu’en dépit de la conjoncture actuelle, les pays de la région disposent encore d’une certaine marge de manœuvre budgétaire, de quoi augurer un bon comportement des échanges avec ces pays qui contribuent également à soutenir l’économie nationale à travers les IDE, les envois de fonds des MRE ainsi que les dons des pays du CCG, au moment où la dynamique des échanges commerciaux entre le Maroc et ces pays se consolide davantage.
BRICS
Perspectives sombres
Des 5 pays du BRICS, quatre traversent actuellement une mauvaise passe. Il s’agit d’abord de la Chine, du Brésil, de la Russie et de l’Afrique du Sud. Seul l’Inde continue de maintenir la dynamique de ces pays, qui ont fortement contribué à la croissance mondiale ces dernières années. 2016 s’annonce morose puisque les facteurs qui ont contribué à faire chuter la croissance des pays émergents ne sont pas près de disparaître. La Russie et le Brésil resteront en récession alors que la croissance chinoise continuera de ralentir et l’Afrique du Sud tournera autour d’1%. Il s’agit d’une mauvaise nouvelle pour l’économie mondiale car selon les estimations, 1 point de croissance en moins dans les BRICS, c’est d’ici deux ans, une perte de croissance de 0,8 point de PIB dans le reste des pays émergents, d’1,5 point de PIB dans les économies frontalières des BRICS et de 0,4 point de PIB pour l’économie mondiale.
Les échanges mondiaux en berne
C’est la conséquence logique de l’évolution contrastée de l’économie mondiale de ces dernières années. Le commerce mondial accuse une sensible baisse depuis le premier trimestre 2015 où pour la première fois depuis 2009, il s’est contracté sous l’effet d’une demande moins forte liée aux récessions brésilienne et russe, à la mutation chinoise et aux nombreuses dépréciations des monnaies. Selon la Banque mondiale, «la faiblesse persistante des échanges commerciaux réduit les opportunités d’exportation et les possibilités de faire des gains de productivité grâce à une plus grande spécialisation et la diffusion des technologies. Avec une évolution attendue de 5% de ses exportations en 2016, le Maroc semble bien tenir encore la corde, ce qui le conforte dans sa stratégie de diversification commerciale de ses partenaires, accompagnée d’un renforcement de la compétitivité de ses entreprises.