Accord d’Agadir : Les Égyptiens refoulent les voitures de Tanger Med
Depuis plus de deux ans, les exportations de l’usine Renault de Tanger-Med sont refusées à l’entrée du territoire égyptien. Les autorités du Caire soulèvent un «non-respect» par ces marchandises des règles de cumul de l’origine inclus dans le cadre de l’Accord d’Agadir. Des pourparlers bilatéraux ont été lancés pour résoudre le problème.
Les règles d’origine euro-méditerranéennes continuent de poser problème pour les exportations marocaines. Cette fois, ce sont les expéditions de l’usine de Renault Tanger-Med qui en font les frais. Depuis deux ans, les exportations marocaines en automobile, depuis l’usine de Renault, sont refusées sur le territoire égyptien, les autorités invoquant le «non-respect de la règle du cumul de l’origine euro-méditerranéenne».
En effet, l’Accord d’Agadir prévoit l’application de règles d’origine strictes pour la région, incluses dans le cadre du protocole pan-euro-med, ratifié par les pays membres de l’Accord d’Agadir (Maroc, Égypte, Tunisie, Jordanie) et l’Union européenne (UE). Parmi celles-ci, la règle du cumul diagonal de l’origine qui considère comme produits originaires du Maroc -et donc acceptés à l’entrée en franchise de droits de douane dans les pays de la zone- ceux ayant subi un ensemble d’ouvraisons intermédiaires dans des pays différents de la zone euro-méditerranéenne, moyennant l’usage des matières originaires de la région (UE et pays de l’Accord d’Agadir). «Nous dépassons largement cette condition grâce à l’exploitation de la règle du cumul diagonal avec l’UE», assure Latifa Elbouabdellaoui, directrice des relations internationales au sein du ministère délégué chargé du Commerce extérieur.
La question a d’ailleurs été largement débattue dans le cadre de l’atelier sur les règles d’origine euro-méditerranéennes, organisé par l’Unité technique de l’Accord d’Agadir (ATU) et l’Association marocaine des exportateurs (ASMEX), jeudi dernier à Casablanca. «Les Égyptiens acceptent volontiers les exportations Renault en provenance d’autres lieux de production, comme Casablanca, mais refusent catégoriquement les importations en provenance de Tanger-Med, arguant qu’il s’agit d’une Zone franche d’exportation et que celle-ci n’est pas concernée par les règles d’origine euro-méditerranéennes», explique Hassan Sentissi, président de l’ASMEX. Il semblerait qu’il ne s’agisse-là que d’une manœuvre en vue d’instaurer un obstacle technique et de limiter ainsi les importations automobile en provenance du Maroc.
Il faut dire que sur l’ensemble du continent africain, l’Égypte et la Tunisie sont les premiers importateurs des modèles Renault produits au Maroc, notamment la Dacia Logan. «L’Accord d’Agadir n’exclut à aucun moment ces zones franches de l’application des règles du cumul de l’origine et réglemente clairement le cas de ces zones industrielles d’exportation, accordant aux marchandises qui respectent les règles du cumul le caractère de marchandises marocaines», assure une source au sein du service des règles d’origine à l’administration des douanes. L’affaire a d’ailleurs été prise en main par le ministère du Commerce extérieur. Des discussions sont en cours et plusieurs réunions ont été tenues entre les responsables des deux parties. «Renault a monté un dossier solide afin de faire valoir son droit et la partie marocaine a proposé à des équipes de techniciens égyptiens de venir constater la réalité sur place», précise une source au département du Commerce extérieur.
L’Unité technique de l’Accord d’Agadir devrait également intervenir dans le cadre du traitement de cette question durant les prochains mois. «Un Conseil d’affaires vient d’être créé afin de rapprocher les points de vue entre les différents secteurs privés des pays membres de l’accord. Une réunion devrait bientôt se tenir en Jordanie et la question de Renault devrait certainement être traitée», explique-t-on auprès de l’Unité technique de l’Accord d’Agadir. Il faut dire que les règles d’origine euro-méditerranéennes posent souvent problème aux opérateurs des pays membres. «D’autres cas existent et nous allons les traiter mais nous avons besoin de dossiers bien ficelés de la part des opérateurs qui se sentent lésés afin de pouvoir les défendre», estime Elbouabdellaoui.
Les règles euro-méditerranéennes en cours de renégociation
Le ministère chargé du Commerce extérieur réalise actuellement une étude d’évaluation des 10 années de libéralisation des échanges dans le cadre de l’Accord d’Agadir. Cette étude devrait notamment s’adresser aux difficultés rencontrées par l’application des règles d’origine euro-méditerranéennes. Les derniers détails sont en cours de traitement et les résultats seront connus 6 mois après le lancement de l’étude. Cette étude permettra également au Maroc, en collaboration avec l’Unité technique de l’accord d’Agadir de mieux se préparer pour les renégociations de ces règles actuellement en cours au sein des institutions européennes.