Maroc

Accidents de la circulation. Le nécessaire dépoussiérage du Dahir de 1984

Le texte réglementant les indemnisations des victimes d’accidents de la circulation est devenu quasi-désuet, notamment au niveau des barèmes d’indemnisation, ce qui pousse à une jurisprudence instable.

35 ans après la promulgation du Dahir de 1984 relatif à l’indemnisation des victimes des accidents de la circulation et leurs ayants droit, les juristes font le bilan. En 2018, les morts se sont chiffrés à 3.485 dont 893 piétons (26% de l’ensemble des tués) et 1.175 usagers des 2 et 3 roues (34% de l’ensemble des victimes. Les chiffres du ministère de l’Équipement, du transport, de la logistique et de l’eau montrent bel et bien que cet objectif n’a pas été atteint. Les derniers chiffres du ministère font état d’une légère régression (-0,62%) des accidents mortels qui se sont établis à 3.066. Il en va de même pour les blessés graves dont le nombre a diminué de 4,90% en s’établissant à 8.725.

En revanche, les blessés légers ont enregistré la plus forte hausse (+7,65%) en se chiffrant à 128.249. Il faut aussi signaler que les accidents de la route ont été plus nombreux en 2018. Les statistiques révèlent une hausse de 6,82% des accidents qui se sont élevés à 96.133. On notera également que les accidents non mortels ont bondi de 7,08% en s’établissant à 93.067. Le versement des indemnités durant cette année s’est donc élevé à 2,8 MMDH. Une indemnisation qui est due au regard du Dahir en question. Ce dernier n’a fait que consacrer un principe général de droit, à savoir que l’indemnisation de la victime ou de ses ayants droit doit tenir compte de la part de responsabilité de l’auteur du dommage. Le législateur a, par souci de clarification, précisé ce principe général dans certains articles, mais il a omis de l’indiquer dans d’autres, notamment les articles relatifs au préjudice affectif, au remboursement des frais médicaux, chirurgicaux ou pharmaceutiques ainsi qu’aux frais funéraires. Cette omission a créé des divergences d’interprétation au niveau des différentes juridictions du royaume. En effet, certains tribunaux et cours d’appel n’opèrent pas de partage de responsabilité en arguant du silence du législateur dans les articles 2 et 4 du Dahir portant loi du 2 octobre 1984.

«Seulement, dans la pratique, il a été remarqué qu’une grande disparité régnait entre les différents jugements, du fait de l’absence de critères précis d’allocation des indemnités et du pouvoir discrétionnaire du juge», indique Mohamed Benabdelkader, ministre de la Justice.

En effet, il est rare que les parties se mettent d’accord sur l’application des dispositions de l’article 88 du Dahir sur les obligations et contrats. La jurisprudence a instauré une présomption de responsabilité à l’encontre du conducteur du véhicule, ce qui a conduit les victimes, notamment les piétons sur le conseil de leurs avocats, à refuser un partage de responsabilité sachant pertinemment les faveurs de la jurisprudence. Cette attitude se traduit en pratique par une préférence à se constituer, le plus souvent, partie civile dans le procès pénal que de poursuivre la procédure transactionnelle et subir un partage de responsabilité.

De plus, le formalisme imposant au demandeur de présenter sa demande selon des modalités et délais déterminés constitue pour les victimes non pourvues d’avocats une entrave à leur indemnisation. Il est à déplorer aussi l’attitude de certaines entreprises d’assurances qui ne respectent pas scrupuleusement les nouvelles dispositions préférant retarder au maximum le paiement des indemnités.

Ainsi, selon le ministre et après 35 ans d’application, «le temps est venu de faire un bilan approfondi de cette législation et d’identifier les points qui devront être réformés, le but étant de garder l’équilibre entre les droits des victimes et la sauvegarde des intérêts du secteur des assurances, qui ne doit pas subir de choc financier non plus». Benabdelkader a ainsi assuré que «le ministère de la Justice est prêt à s’engager de manière pro-active dans les débats devant mener à la modification du texte de 1984 en mettant à disposition toutes les données statistiques, techniques et juridiques, qui permettra une réforme adéquate aux réalités actuelles. D’autant que l’Exécutif est en voie de remodelage de l’expertise médicale judiciaire qui est une composante indépassable de la problématique de l’indemnisation des victimes». 



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