Éducation nationale. Amzazi fait le point sur la réforme

Pour le ministre de l’Éducation, Saïd Amzazi, il est nécessaire d’augmenter le budget si l’on veut réussir la réforme du secteur.
«Aujourd’hui, c’est le meilleur moment pour réussir la réforme». C’est avec ces mots que Saïd Amzazi, ministre de l’Éducation nationale, de la formation professionnelle, de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifi que a amorcé son intervention lors de la rencontre- débat sur la réforme de l’éducation nationale organisé la semaine dernière sur le campus de HEM Fès sous le thème, «L’école au coeur du débat». Dans son discours, le ministre a partagé sa vision sur le secteur de l’éducation au Maroc, il a également détaillé l’ensemble des mesures programmées par son département dans le cadre de la réforme. Pour lui, «la réforme est arrivée à point nommé pour résoudre les nombreuses lacunes dont souffre le secteur de l’éducation au Maroc». Néanmoins, le budget dédié par le gouvernement au secteur de l’enseignement reste toujours insuffisant. «Seulement 20% du budget de l’État est consacré à ce secteur. Avec ce budget, il sera difficile d’obtenir les meilleurs résultats », précise le ministre.
En effet, d’autres pays y ont consacré près des deux tiers de leur budget, sur plusieurs années, pour bien réussir leur réforme. S’agissant de la qualité de l’enseignement, Amzazi a rappelé que selon une étude du ministère «près de 60% des enseignants dans les écoles publiques du primaire et du secondaire n’ont pas de mention au Bac. Ce qui met en question la qualité offerte par ces établissements». Dans ce sillage, le ministre a précisé «qu’en plus de la formation professionnelle que nous sommes en train de déployer pour les enseignants, nous ambitionnons de lancer une formation de cinq ans pour chercher des profils qui ont une véritable vocation pour le métier de l’enseignement». Et d’ajouter, «bientôt, nous allons lancer un programme de formation de trois ans sanctionné par une licence en sciences de l’éducation donnant droit à l’accès au master dans les Centres régionaux des métiers d’éducation et de formation (CRMEF)». La réforme touchera également aux programmes pédagogiques puisqu’ils vont adopter de nouveaux modes d’apprentissage comme la lecture précoce et l’approche actionnelle (approche projetée sur des situations de la vie réelle) ou syllabique (un apprentissage associant les lettres de l’alphabet aux syllabes qu’elles forment) pour les langues arabe et française au primaire ainsi que le développement de l’apprentissage des mathématiques et des sciences. Pour ce qui est du lycée et du collège, le ministre a expliqué que le gouvernement précédent avait mis en place un nouveau processus en créant des classes internationales où les matières scientifiques sont dispensées soit en français soit en anglais. La première expérience qui a démarré en 2015 s’est développée car la demande des familles était très importante au niveau du lycée. «Aujourd’hui, nous avons commencé à intégrer cette expérience dans les collèges et à partir de la rentrée prochaine, les trois années du collège seront concernées par ces classes internationales. Dorénavant, l’enseignement des matières scientifiques et techniques sera dispensé en français ou en anglais», précise Amzazi.
Dans ce cadre, le ministère prévoit également de réduire les options du bac de 13 à 6 options avec un appui aux bacs internationaux. Actuellement seulement 300 élèves sont inscrits au baccalauréat international option anglais, contre 25.000 pour les classes internationales en langue française. Preuve à l’appui, le taux de réussite au bac international option française dépasse les 96% alors que la moyenne nationale des résultats pour le diplôme classique n’est que de 73%. «C’est donc une fi lière d’excellence et également une manière de répondre aux demandes des familles», précise le ministre. Et d’ajouter, «tant qu’il n’y a pas de loi, la législation actuelle ne nous interdit pas d’élargir cette offre sachant que l’arabisation s’est faite par une simple circulaire et que mes prédécesseurs ont mis en place le dispositif de bac international également avec une circulaire». D’après les propos du ministre, ce n’est qu’à partir de 2030 que le pays pourra récolter les vrais résultats de cette grande réforme, surtout qu’énormément de chantiers sont actuellement ouverts.
Une déperdition universitaire estimée à 3 MMDH
Le secteur de l’enseignement soufre d’une déperdition universitaire fatale et très coûteuse estimée à 3 MMDH. D’après Amzazi, il existe une vraie fracture linguistique entre le lycée et le cycle supérieur, marquée par une frustration au niveau des premières années. En effet, 22% des étudiants quittent les facultés de sciences avant d’avoir passé le premier examen du semestre. Plus de 43% des étudiants abandonnent l’université notamment ceux inscrits dans les filières scientifiques sans avoir obtenu aucun diplôme. «D’où la nécessité d’harmoniser le cycle secondaire et supérieur, notant que dans l’ensemble de la population universitaire, à peine 12% sont dans les filières scientifiques. Cette discipline est le socle pour bâtir une société de savoir et de technologie», ajoute le ministre. Pour ce qui est de l’insertion des jeunes au marché du travail, paradoxalement plus on est diplômé au Maroc, plus on a de chances d’être chômeur. Sur ce point, une part de responsabilité revient aux entreprises qui préfèrent recruter des profils au niveau pas très avancé car elles sont incapables de les payer à hauteur de leurs diplômes. En outre, plus l’étudiant approfondit sa spécialité moins il est en adéquation avec les besoins du marché du travail. Dans ce cadre, Amzazi a expliqué que «son ministère a lancé un grand chantier de réformes des formations universitaires notamment dans les établissements à accès ouvert car aujourd’hui, il n’y a aucune vraie orientation».