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Arnaque. Des investisseurs turcs piégés

Venus au Maroc pour investir, deux opérateurs turcs ont vécu une situation pas comme les autres. Ils ont été arnaqués par trois avocats qui devaient en principe défendre leurs intérêts et accompagner le développement de leur business dans le pays. Récit d’une affaire qui traîne depuis 2013.

C’est une affaire qui traîne depuis plusieurs années. La cause est méconnaissable voire inexplicable pour les investisseurs turcs concernés. En effet, l’histoire en question remonte à 2013 quand deux investisseurs turcs, O.ME.S et M.G se sont intéressés à une vente aux enchères judiciaire concernant l’acquisition du matériel de production de Général Tire en liquidation judiciaire en 2013 au Maroc. Ironie du sort, le projet d’investissement de ces deux derniers est mort né ! Ils ont été arnaqués par leurs propres avocats ! «Si le système n’est pas verrouillé, n’est pas transparent, comment peut-on faire du Maroc un pays accueillant et accompagnateur d’investisseurs voulant créer de la richesse et surtout de la valeur ajoutée ?», martèle O.ME.S. Ces derniers ont, en effet, frappé à toutes les portes pour que justice soit faite mais en vain. De notre côté, nous avons pris contact avec les différentes parties concernées, que ce soit au niveau de la Cour d’appel de Rabat, du Tribunal de première instance mais également du Barreau de Casablanca. Toutefois, le mot d’ordre reste le même : «c’est une affaire en cours et la procédure en vigueur sera appliquée pour cette affaire».

Acte I
À fin 2013, les investisseurs ont mandaté une avocate Z.C inscrite au barreau de Casablanca pour faciliter la création de leur entreprise Global Metal industrie. La chose étant faite, les investisseurs ont donc ouvert un compte pour y injecter la somme de 5 millions de dirhams. «Comme nous devions procéder à des formalités administratives, l’avocate a glissé parmi les documents à légaliser une pleine procuration qui permet d’agir en lieu et place du titulaire du compte de l’entreprise créée. Comme nous ne maîtrisons pas la langue arabe, nous n’avons donc pas été alerté par ce document», martèle O.ME.S. Plusieurs mois s’écoulent donc sans que les concernés aient des nouvelles de leur participation à la vente aux enchères. Procédant à une vérification, ils se sont retrouvés devant le fait accompli, l’avocate avait retiré les 5 millions de dirhams. «Nous avons été pris au piège par notre propre avocate», se lamente O.ME.S. Convaincus qu’ils n’ont plus aucune chance de participer aux enchères de Général Tire, les deux investisseurs n’ont plus qu’un seul but à atteindre : récupérer leur dû ! En 2014, ils ont donc adressé une plainte au procureur du roi auprès de la Cour d’appel de Casablanca. De ce fait, l’avocate a été placée en garde à vue.

Acte II
À ce stade, un nouvel avocat est entré en jeu. Les investisseurs turcs ont été conseillés de prendre un nouvel avocat pour entamer la procédure judiciaire contre Z.C. Ainsi M.H.C, inscrit au barreau de Casablanca a été nommé pour les représenter. Ce dernier a par ailleurs pris la décision de nommer un autre avocat inscrit au Barreau de Rabat, A.J, pour l’assister dans l’affaire, assurant que cette dernière était une avocate appartenant au même barreau que lui. Ainsi, lors de la présentation de l’avocate devant le procureur du roi, les plaideurs en question ont été surpris de voir leur défense se désister des poursuites judiciaires en contrepartie de la délivrance des chèques représentant le montant de la somme litigieuse. Sauf que les chèques présentés n’étaient pas au nom des investisseurs en question, mais au nom de A.J. Le comble c’est qu’ils ont été surpris par le fait que Z.C n’a payé que 4,5 millions de dirhams en chèques, dont deux certifiés d’un montant d’1 million de dirhams chacun et un troisième non certifié d’une valeur de 2,5 millions de dirhams. «Nous n’étions pas d’accord sur toute la ligne, les avocats n’ont pas pris la peine de se soucier de notre avis concernant cette entente. Ce qui est juste intolérable. Nous sommes victimes d’une double opération d’escroquerie et d’arnaque venant d’avocats censés être les défenseurs de la loi et représentants de la justice», déplore O.ME.S. Ces investisseurs n’ont pu, en fin de compte, récupérer que la somme de 635.000 dirhams contre un montant global déboursé incluant les honoraires des différents avocats précités de 5,06 millions de dirhams, soit un montant de 4,425 millions de dirhams évaporés ! En tout cas, depuis octobre 2017, l’affaire suit son cours au niveau du Tribunal de première instance de Rabat puisque les deux investisseurs en question ont aussi poursuivi en justice les deux avocats M.H.C et A.J pour escroquerie, lésion, enrichissement illicite et trafic d’influence. Les opérateurs turcs ne voient pas le bout du tunnel et espèrent retrouver le minimum de ce qu’ils ont perdu en temps et fonds pour cette affaire qui n’a jamais pu aboutir. Wait and see… 


Erdoğan suit l’affaire

En date du 19 septembre 2017 et dans leur tentative de trouver une issue à leur situation compliquée, les deux investisseurs turcs ont adressé une lettre au président turc Tayyip Erdoğan, dont nous détenons copie. Ces derniers y dénoncent la passivité de l’ancien ambassadeur de Turquie à Rabat par rapport à cette affaire. Le message a été entendu car, quelques semaines après cette correspondance, le diplomate a été rappelé à Ankara et remplacé par un nouvel ambassadeur.



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