L’intégration sud-sud comme réponse à la vague protectionniste
Le Forum international MEDays qui se tient à Tanger, du 7 au 10 novembre, remet sur la table des discussions des thématiques brûlantes liées aux guerres commerciales et les possibles voies pour l’Afrique de se prendre en main.
À l’heure du retour insoupçonné du protectionnisme incarné par la politique économique du président américain Donald Trump, il est légitime de se poser la question sur le sort des pays du sud, du rôle de la Chine et des nouveaux espaces économiques africains en construction. On parle alors de facteurs disruptifs qui marquent une soudaine rupture avec le cours normal des choses, des relations économiques, politiques et diplomatiques entre les pays. Naguère peu usité, le mot disruptif renoue avec l’actualité. Il n’y a pas une étude, analyse ou réflexion sur ce nouvel ordre économique mondial où cet adjectif n’est pas utilisé jusqu’à être galvaudé. Pour mieux se pencher sur cette problématique, l’Institut Amadeus organise, sous le haut patronage de SM le roi Mohammed VI, du 7 au 10 novembre à Tanger, la onzième édition du Forum international MEDays, placée sous le thème «à l’ère de la disruption : bâtir de nouveaux paradigmes». Comme son intitulé le présente, le défi aujourd’hui pour l’Afrique et les pays du sud, c’est de se prendre en main pour ne pas subir de plein fouet les chamboulements économiques et sociétaux provoqués par les facteurs disruptifs. Le renforcement de la coopération sud-sud sans se détourner de celle nord-sud est aujourd’hui une condition sine qua non pour une meilleure croissance capable d’inclure toutes les franges de la société dans l’effort de création et de partage de la richesse. Justement, MEDays 2018 rassemble experts et officiels autour de trois grandes initiatives pour structurer des coopérations Sud-Sud et Nord-Sud dans une approche win-win. Une série de workshops défriche le terrain à propos du processus d’adhésion du Maroc à la CEDEAO, point d’orgue de l’événement ainsi que l’initiative Chine-Afrique et l’initiative méditerranéenne.
Cette 11e édition sera également marquée par la participation de Roch Marc Christian Kaboré, président du Burkina Faso. À propos de cette participation d’envergure, Brahim Fassi Fihri, président de l’Institut Amadeus, a expliqué que «le président du Faso est un chef d’État africain qui incarne une nouvelle page démocratique pour son pays avec une volonté de travailler à l’intégration régionale et continentale, à un modèle de croissance inclusif pour les jeunes, les femmes, et le monde rural sans oublier son engagement pour l’innovation et les énergies renouvelables». Soit dit en passant, c’est la troisième fois que le Forum MEDays accueille un chef d’État en fonction après Paul Kagamé en 2015 et Alpha Condé en 2017. Plus en détail, les débats durant les MEDays porteront essentiellement sur l’intégration régionale et continentale, les défis sécuritaires en Afrique, les nouvelles dynamiques de coopération et les enjeux économiques et diplomatiques face aux disruptions de l’ordre international. Sujet d’actualité qui ne pouvait passer inaperçu, le nouveau modèle de développement du Maroc sera abordé dans le cadre d’un environnement régional africain en pleine transformation à la lumière du récent lancement de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) et les discussions d’adhésion du Maroc à la CEDEAO.
En effet, la signature de la ZLECA intervient comme une réponse préventive aux éventuelles crises et ondes de chocs qui naîtraient des deux guerres commerciales USA-Chine et USA-UE. Dans cette dynamique, un intérêt particulier sera donné aux relations Chine-Afrique dans le cadre du fameux projet de «la route et de la ceinture» qui vise à revitaliser les anciennes routes de la soie et leurs régions. En effet, la Chine qui a récemment publié un livre blanc en réponse au blocus économique américain, nourrit l’ambition d’organiser un dialogue pour aligner les stratégies de développement africain avec sa stratégie internationale. Toutefois, certains experts et observateurs internationaux comme le président de l’IFRI, Thierry de Montbrial, voient avec circonspection ce qu’ils qualifient de visées de la Chine sur le continent. En tout cas, les débats et échanges de cette 11e édition des MEDays promettent d’être passionnants dans la mesure où ils touchent à des thématiques d’une actualité brûlante. La qualité des participants en dénote : 150 intervenants de très haut niveau, chefs d’États et de gouvernements, ministres, responsables politiques, prix Nobels, chefs d’entreprises, dirigeants d’organisations internationales, experts et représentants de la société civile croiseront le fer sur les questions prioritaires de l’agenda international aux côtés de 3.000 participants.