Maroc

Station de dessalement. Premiers coups de pioche à Douira

Le ministère de l’Agriculture et l’ONEE construisent la plus grande unité mutualisée de dessalement de l’eau de mer avec leur partenaire, le groupe espagnol Abengao. Le chantier qui a démarré à Douira dans la région de Chtouka est titanesque.

Tout au long de l’année, Douira s’enorgueillit de son climat doux influencé par les vents marins. C’est ici dans cette localité côtière située à plus de 55 kilomètres d’Agadir que le projet mutualisé de la future station de dessalement de l’eau de mer destiné à l’irrigation agricole et à l’usage d’eau potable commence à sortir de terre, non loin des habitations, à 300 m de la côte. Une fois sur place, l’on comprend que le site relevant de la commune rurale d’Inchaden a été principalement sélectionné sur la base de sa proximité d’avec la première région primeuriste du royaume puisqu’il est pratiquement impossible de ne pas croiser des abris-serres en empruntant la route menant à Douira et d’autres localités au départ la voie expresse Agadir-Tiznit. Et dès que l’on s’approche du chantier étalé sur 20 hectares, on peut constater de visu que les coups de pioche des pelleteuses et autres engins rompent le silence de ce lieu, soigneusement choisi pour la réalisation de ce projet, fruit d’un partenariat public-privé (PPP) entre le ministère de l’Agriculture et l’ONEE avec les deux filiales du groupe espagnol Abdengao : Aman El Baraka et la Société d’eau dessalée d’Agadir (SEDA).

Terrassements : STAM et GTR     accomplissent les travaux
Ce n’est donc pas étonnant de trouver, à l’entrée du chantier, des panneaux exigeant le respect des consignes de sécurité, vu l’ampleur du projet. Et à l’heure actuelle, deux sous-traitants se chargent sur le site, déjà assaini, de la réalisation des travaux de terrassement généraux pour le compte d’Abdengao, concessionnaire et délégataire de l’unité de dessalement de l’eau de mer pour une durée de 30 années. Il s’agit en l’occurrence de la Société de travaux agricoles marocains (STAM) et de la société des grands travaux routiers (GTR). La première entreprise s’occupe de la réalisation de la conduite d’amenée d’eau salée et de l’ouvrage de rejet de saumure qui sera équipé d’un diffuseur pour limiter l’impact sur l’écosystème marin. «En conformité avec le cahier des charges environnemental, ces conduites seront branchées à 48 mètres au-dessous du niveau de la mer», explique Noreddine Kessa, chef de service de l’équipement à l’Office régional de mise en valeur agricole (ORMVA) Souss-Massa et ingénieur en chef chargé du projet. Quant à la seconde société, elle effectue, pour sa part, les travaux de la station de traitement, proprement dit où l’eau sera prétraitée avant d’être traitée grâce à la technique de l’osmose inverse.

Deux sorties pour l’irrigation et l’eau potable
Il est à noter que l’ensemble de l’unité sera séparé en deux, une partie Eau potable et une partie Eau d’irrigation qui seront alimentés par des énergies renouvelables. C’est pourquoi, après la mise en service de la station, prévue en 2020, deux sorties d’eau dessalée seront réalisées, l’une pour l’irrigation dans le cadre du contrat de concession entre le ministère d’Agriculture et la société Aman El baraka et la convention de gestion déléguée entre l’ORMVA-SM avec la même société alors que l’autre sortie sera destinée à l’eau potable. Celle-ci sera gérée dans le cadre de la convention de gestion déléguée d’eau potable entre l’ONEE-Branche eau et la SEDA, son concessionnaire privé. Il va sans dire qu’avant le démarrage des travaux, il y a trois mois, la réalisation de ce projet a été conditionnée par des objectifs de souscription à l’eau dessalée de la part des producteurs-exportateurs pour la sauvegarde de la nappe surexploitée de Chtouka dont le déficit hydrique dépasse actuellement 60 millions de m³.

11.000 ha : la superficie souscrite à l’eau dessalée
Aujourd’hui, on estime la superficie irriguée à partir de cette nappe à environ 17.500 ha. «Sur 12.000 ha ciblés, plus de 11.000 ha de la superficie globale ont été souscrits après le lancement de cette opération à l’eau dessalée auprès des agriculteurs», note Hro Abro, directeur de l’Office régional de mise en valeur agricole (ORMVA) Souss-Massa. Toujours est-il que la superficie souscrite en substitution des volumes sur-prélevés sur la nappe phréatique est passée de 2.500 ha lors du démarrage de la campagne de souscription à 11.000 ha alors que l’objectif a été d’atteindre 80% de la superficie ciblée avant le démarrage des travaux. Pour ce qui est du tarif de l’eau dessalée, il a été établi à 5 DH hors taxe par m³ rendu à la borne, soit 19.440 DH par an et par hectare souscrit. «C’est essentiellement grâce à la question de la mutualisation des deux projets et la contribution publique de l’État fixée à 1,8 MMDH qu’on est arrivé à ce coût de 5 DH hors taxe», souligne Hro Abro. En ce qui concerne les droits de raccordement et de souscription, ils ont été fixés à 10.000 DH/ha. Aujourd’hui, «c’est la première partie de l’opération de souscription qui sera collectée», précise Noreddine Kessa. Il s’agit des droits de souscription fixés à 5.000 DH par ha tandis que les droits de raccordement fixés également à 5.000 DH/ha seront payables à la réalisation du raccordement. Sur ce dernier point, «il faut savoir que ce sont les travaux topographiques qui sont actuellement lancés dans le cadre d’une anticipation de cette démarche afin de préparer les dossiers d’expropriation de terrains qui seront dédiés aux réseaux d’irrigation», précise Noreddine Kessa.

Chtouka : un décret pour la sauvegarde de la nappe
En plus de la production d’eau dessalée pour l’irrigation du périmètre irrigué de Chtouka, ce projet de sauvegarde initié par le ministère de l’Agriculture à la demande des agriculteurs et de leurs entités professionnelles est composé aussi d’un accord-cadre et d’un décret (n°2-17-596) considérant la nappe phréatique de Chtouka comme périmètre de sauvegarde. Ce dernier qui a été publié au bulletin officiel du 16 novembre 2017, porte sur la délimitation du périmètre de sauvegarde et déclare l’état de pénurie d’eau au niveau de cette zone. Par ailleurs, la capacité de production initiale de ladite station est de 275.000 m3/j à raison d’un débit de 150.000 m3/j pour satisfaire les besoins en eau potable et d’un débit de 125.000 m3/j pour satisfaire les besoins en eau d’irrigation. Par ailleurs, la non-réalisation de ce projet a été synonyme d’une perte de 9 MMDH de valeur ajoutée créée par le secteur des fruits et légumes dans la région, de 3 MMDH d’investissement et d’1 million d’emplois journaliers et réguliers. 



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