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Conjoncture : Déséquilibres en série

Bien qu’elles soient reluisantes, les perspectives de croissance économique pour l’année 2017 ne devraient pas occulter la réalité des «déséquilibres» macroéconomiques du royaume. Déficit commercial, déficit budgétaire, hausse du taux d’endettement, balance des paiements… la situation des échanges extérieurs et des finances publiques demeure préoccupante.

«L’économie marocaine montre des signes de déséquilibre inquiétants : Le déficit des finances publiques a atteint des niveaux élevés, le taux d’endettement devient de plus en plus pesant et le solde négatif de la balance commerciale s’alourdit d’année en année», s’alarme le Centre marocain de conjoncture dans sa dernière note de conjoncture. Autant de sujets brûlants auxquels le nouvel Exécutif, en cours de formation, devra accorder la priorité. En effet, les derniers résultats des échanges extérieurs, au titre de l’année 2016, publiés par l’Office des changes, sont tout sauf rassurants. On y apprend notamment que le déficit commercial s’est finalement établi à 184,6 MMDH, après une année 2015 de compression du déficit qui avait reculé à 154,2 MMDH. En 2016, l’économie marocaine a renoué avec un déficit des plus importants de cette dernière décennie, avec une hausse vertigineuse des importations (voir tableau) Résultat : le taux de couverture se situe à 54,8% au lieu de 58,6% en 2015.

Dans ce contexte, la balance des paiements enregistre un déficit du compte des transactions courantes de 44,5 MMDH en 2016, contre 21,1 MMDH pour l’année 2015, soit plus du double. Ces déficits sont un signal d’alarme important concernant la santé de l’économie et confirment une nouvelle fois la dépendance du Maroc vis-à-vis de l’étranger. En effet, la balance des paiements accuse de sérieuses contreperformances. L’analyse de l’ensemble des flux d’actifs réels fait ressortir une augmentation du déficit des transactions, au titre des biens de 30,2 MMDH, atténuée partiellement par la hausse de l’excédent du compte du revenu secondaire (+5,7 MMDH) et la quasi-stabilité des soldes des échanges de services et du revenu primaire.

S’agissant de la position extérieure globale, qui reflète la situation patrimoniale de l’économie marocaine vis-à-vis du reste du monde, elle fait ressortir une situation nette débitrice de 668,9 MMDH, contre 628,7 MMDH à fin septembre 2016, précisant que cette situation résulte d’une hausse plus prononcée de l’encours des engagements financiers (+41,7 MMDH) que celle de l’encours des avoirs financiers (+1,6 MMDH). Concernant le déficit de la balance commerciale, celui-ci s’est creusé sous l’effet d’une hausse importante des importations qui ont progressé de 36,4 MMDH, alors que les exportations ne se sont appréciées que de 6 MMDH. Dans ces conditions, le déficit s’est creusé de plus de 30 MMDH. Un déficit qui demeure, somme toute, bénéfique à en croire certaines analyses, puisque principalement déterminé par les importations de biens d’équipement (25,8 MMDH), soit 16% du total des importations qui ont atteint 408,7 MMDH, contre 372,2 MMDH. Des importations de biens d’équipement sont souvent indicatrices d’un investissement dans le tissu productif et annonciateur d’une embellie dans l’activité économique. Mais si ces chiffres sont inquiétants, c’est d’abord parce que leur augmentation n’est pas justifiée par une hausse de la facture énergétique qui constitue traditionnellement l’élément le plus pesant dans la balance commerciale.

À en croire les chiffres de l’Office des changes, la facture énergétique régresse de 11,8 MMDH, du fait de la baisse des cours et des quantités importées. En dehors des achats de biens d’équipement et de demi-produits, les importations n’augmentent que de 2,6% ou +5,1MMDH. Autrement dit, une flambée du prix du baril à l’international risque de coûter cher au Maroc. L’embellie de 2015 n’était donc que passagère et le déficit commercial semble bien parti pour se creuser durant 2017. Les premiers chiffres de l’année 2017 montrent des importations en hausse de 9,7% à cause notamment de l’accroissement des approvisionnements en produits énergétiques, notamment le gas-oil et fuel-oil (2,2 MMDH), en relation avec l’augmentation des prix d’achat sur le marché international. Le doute plane toujours autour de la reprise du prix du baril à l’international dans la perspective d’un accord entre les principaux pays producteurs de pétrole. À noter que le poids de l’import demeure incompressible par l’export malgré l’amélioration notable des expéditions.

La structure des échanges demeure visiblement la même avec des exportations qui n’arrivent toujours pas à se diversifier. L’export demeure principalement tiré par les métiers mondiaux du Maroc à savoir l’automobile, l’agriculture et le textile. Ces secteurs enregistrant toutefois de faibles progressions de, respectivement, 5,8 MMDH, 2,6 MMDH et 2,2 MMDH. De légères performances qui demeurent de surcroît atténuées par la baisse des ventes de produits miniers (-3,4 MMDH). Dans son étude, le Centre marocain de conjoncture (CMC) s’inquiète du lien étroit entre les carences de la balance commerciale et le déficit des finances publiques. Ce dernier, malgré sa relative atténuation durant ces dernières années (il atteint 3,9% du PIB en 2016, alors qu’il s’affichait à 4,2% en 2015) s’affiche toujours à des niveaux inquiétants. Ce double déficit (commercial et budgétaire) que les experts appellent souvent «déficit jumeaux» devrait être érigé comme priorité à en croire le CMC. «Pour espérer trouver des solutions à tous ces problèmes de déséquilibres macroéconomiques, des réformes visant à optimiser l’impact des décisions des pouvoirs publics sur les finances publiques et le commerce extérieur sont à rechercher», estime l’observatoire privé de l’économie marocaine qui précise qu’une solution peut être cherchée dans l’amélioration de l’instrument fiscal, soit à travers le renforcement des dépenses publiques, soit à travers une meilleure utilisation des taxes. 


En quête d’IDE

Pour le CMC, le Maroc a grandement besoin de capitaux extérieurs pour financer son économie et son niveau de vie. Le Maroc a tout intérêt à accroître son attractivité à l’égard du capital étranger pour au moins deux raisons majeures. La première réside dans son ambition de moderniser son tissu productif. «La mise en œuvre des grandes stratégies sectorielles nécessitera davantage de capitaux pour permettre à ces filières de franchir un nouveau cap industriel et technologique». La deuxième a trait à la décision des autorités monétaires de rendre le dirham plus flexible, auquel cas le Maroc aurait tout intérêt à renforcer son matelas de devises. Pour le CMC, l’efficacité de cette décision qui donnera, à coup sûr, une plus grande marge de manœuvre dans la gestion des chocs conjoncturels découlant de l’ouverture de l’économie nationale sur le reste du monde, est fortement tributaire des flux des IDE en direction du Maroc.



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