Melilia : Les imams marocains non grata

Les musulmans de l’enclave accusent le gouvernement local d’entraver le transit des imams mandatés par le Maroc pour célébrer l’office du vendredi.
Après les moutons marocains, ce sont désormais les imams qui ne sont pas les bienvenus à Melilia. La présence des religieux originaires du royaume dans les mosquées de l’enclave déplairait aux pouvoirs publics espagnols, à en croire les représentants de la communauté musulmane. Selon la Commission islamique de Melilia (CIM), le gouvernement local perturbe l’accès des imams mandatés par le Maroc pour célébrer la prière du vendredi. L’organisme, qui gère les affaires du culte musulman de Melilia, a dénoncé les agissements des agents postés aux frontières envers les hommes de religion lors des contrôles d’accès au préside. De la sorte, la commission a appelé le gouvernement local à accorder un traitement respectueux aux représentants du culte musulman se rendant à Melilia.
Dans un communiqué, l’entité a souligné qu’elle a fait part de ses doléances au préfet de la ville, Abdelmalik El Berkani, ainsi qu’au chef supérieur de la police de Melilia, mais leurs requêtes sont restées sans suite. La situation a affecté les imams au point que ces derniers y ont consacré le prêche du vendredi dernier, durant lequel ils ont dénoncé les prétendus agissements des agents espagnols. La question de la gestion de la chose religieuse à Melilia a toujours déchaîné les passions, au sein de la population, multiconfessionnelle, de l’enclave. Le gouvernement local, dirigé par l’un des barons du PP, Juan Imbroda, ne cache pas son animosité quant aux liens qu’entretiennent certains leaders musulmans avec le royaume. D’où ces procédés dissuasifs pour couper le cordon entre l’enclave et son voisinage.
Rappelez-vous la polémique autour de l’interdiction du passage des moutons marocains, sous prétexte que les ovins constituaient une menace pour le cheptel de l’enclave et, de facto, de l’ensemble de la péninsule ibérique. Habile politologue, Imbroda n’a pas tardé à réagir à ces accusations de défavoriser le culte musulman. Il a d’ailleurs emprunté la stratégie adoptée durant la «crise des moutons», en appelant la commission à faire appel à des «imams locaux», comme lorsqu’il a proposé aux «pro-moutons marocains» d’en importer d’Espagne en vue de Aïd al Adha. «Pourquoi ne sont-ils (les imams, ndlr) pas de Melilia ou de Santander, peu importe le lieu, ceux-ci étant musulmans et espagnols? Je ne comprends pas pourquoi les imams doivent venir du Maroc. Je ne le comprends pas», s’est-il faussement interrogé. La commission islamique a attribué cette dépendance envers le royaume à la modeste subvention que l’entité reçoit chaque année, aux alentours de 120.000 d’euros annuels, et qui ne permet pas de recourir à des formations d’imams.
De même, le président du gouvernement de la ville a réfuté le fait que les agents discriminent les imams en particulier, alléguant que l’ensemble des passages sont congestionnés. «Les imams ne sont pas les seuls à vouloir entrer, tout le monde a des problèmes pour traverser les frontières», a-t-il manifesté. Environ 14 imams marocains se rendent chaque semaine à Melilia pour y célébrer l’office du vendredi.