Développement du monde rural : Le CESE recommande l’adoption d’une loi-cadre
La situation du monde rural demeure très inquiétante, en dépit des nombreuses initiatives de développement, lancées par les différents acteurs. Le constat est dressé par le Conseil économique, social et environnemental qui appelle à la mise en place d’une vision nationale.
Le développement du monde rural nécessite la mise en place d’une vision nationale. Certes, de grands efforts ont été déployés au cours des dernières années dans divers domaines. Mais, «l’impact des programmes et projets de développement en milieu rural demeure en deçà des attentes et des besoins des populations».
Le monde rural, -où vivent 79,4% des personnes pauvres et 64% des personnes vulnérables -, souffre, en effet encore, de plusieurs problématiques : persistance de la faiblesse des infrastructures, zones enclavées, faible accès aux services de base, insuffisance des infrastructures économiques, sociales et éducatives, analphabétisme des populations encore élevé… Ainsi, l’élaboration d’une vision nationale, «incorporant le plan humain, économique, social, environnemental, culturel, projetée à l’horizon de 2030 puis 2050», s’impose pour donner un coup de fouet au développement du monde rural. C’est l’une des recommandations du Conseil économique, social et environnemental qui vient d’élaborer un projet de rapport sur la base d’une auto-saisine sur «le développement du monde rural, défis et perspectives». Pour concrétiser les objectifs fixés, l’adoption d’une loi-cadre, relative au développement du monde rural, s’avère une nécessité selon l’institution de Nizar Baraka. Une entité dédiée au développement du monde rural et des zones de montagnes devra être mise en place pour accomplir plusieurs missions, dont la coordination et l’intégration des actions sectorielles et la définition des vocations essentielles des régions.
Le CESE appelle également à reconsidérer profondément les modes d’affectation, de gestion et de motivation des ressources humaines des différentes administrations et du secteur privé. À cela s’ajoute l’impératif de mettre en œuvre les mécanismes d’intégration des politiques nationales et territoriales et d’optimisation des moyens nécessaires au développement du monde rural. La concrétisation de ce dessein passe plusieurs préalables, dont l’activation de la promulgation de la Charte de la déconcentration et la mise en place d’un Comité national de pilotage de la régionalisation avancée, comme l’avait recommandé le conseil. Une réforme en profondeur des statuts juridiques des terres est préconisée pour répondre aux problématiques croissantes, notamment le morcellement des terrains agricoles, la forte urbanisation et les mutations démographiques et sociales.
Au niveau de chaque région, un Plan d’aménagement des centres ruraux est à développer et à mettre en œuvre. Sur le volet économique, le conseil préconise de conforter le dynamisme de l’économie rurale. À ce titre, une évaluation objective des retombées sociales, économiques et environnementales de la stratégie Plan Maroc Vert, sur les ménages, vivant en monde rural, s’impose. Le CESE propose la mise en place des mécanismes adaptés à chaque type de production en vue de maîtriser les circuits d’approvisionnement et de promouvoir la commercialisation des productions pour le marché interne ou externe. Des mesures incitatives devront être mises en place pour encourager l’installation des unités de valorisation des produits agricoles en milieu rural. La clarification des rôles et des responsabilités des intervenants dans le domaine de l’industrie de transformation des produits agricoles n’est pas en reste, en vue de donner une nouvelle dynamique au développement du tissu industriel en milieu rural. Il est également recommandé de soutenir et renforcer le développement et la réglementation de l’agriculture bio et différents produits du terroir, issus notamment de l’agriculture familiale et solidaire.
Le tourisme rural territorial, les activités d’artisanat et celles non-agricoles en milieu rural doivent être encouragés. Sur le plan opérationnel, le conseil recommande de garantir un meilleur accès des populations rurales aux services sociaux et aux infrastructures (réseau routier des localités rurales, offres de soins de santé, enseignement…). S’agissant de l’amélioration des programmes d’adduction d’eau potable et d’électrification, le CESE préconise de relier obligatoirement l’adduction d’eau potable à l’assainissement liquide et solide et de lier l’électrification au développement des activités économiques avec la promotion et le soutien de projets micro-méso ou macro-économiques dans les zones électrifiées.
Le monde rural en chiffres
*Le monde rural au Maroc s’étend sur 90% de la superficie du royaume et représente 40% de la population nationale, selon le rapport du CESE. Il regroupe 85% (soit 1.282 communes rurales sur 1.503) des communes. 13% des communes rurales disposent d’un centre urbain.
*Le monde rural comprend 43% des actifs du pays et couvre 65% des besoins en céréale, 96% des besoins en lait, 98% des besoins en viande rouge, 100% des besoins en volaille, 48% des besoins en sucre et 9% des besoins en huile.
*Globalement, seuls 32% de la population rurale bénéficient d’une couverture médicale et seuls 23% des personnes bénéficient de l’AMO et 48% du RAMED.
*Bien que le taux d’accès à l’eau potable ait atteint 95% actuellement, contre 14% en 1995, l’accès de la population à l’eau potable du réseau ne dépasse pas 55,3% fin 2014, et les branchements à domicile ne représentent que 39,7%.
*L’évacuation des eaux usées en milieu rural pose aussi un grand problème : 59,2% des ménages occupent un logement raccordé à un réseau public d’évacuation des eaux usées, dont 88,5% en milieu urbain et seulement 2,8% en milieu rural. 23% recourent à une fosse septique : 8,8% en milieu urbain et 50,5% en milieu rural.