Engraissement des moutons : Une filière hors de contrôle !
Le risque de putréfaction des viandes, comme au lendemain de l’Aïd al-Adha 2015, n’est pas écarté. La Fédération nationale de la protection des consommateurs tire la sonnette d’alarme.
L’Aïd al-Adha approche à grands pas. Coïncidant presque avec la rentrée scolaire, les familles marocaines espèrent que le prix des moutons se maintiendra à des niveaux «raisonnables». La qualité de la viande est aussi au coeur de leurs préoccupations. Des soucis justifiés par les cas de la putréfaction très rapide de la viande du mouton, observés l’an dernier (www.leseco.ma). Et cette année, le risque ne semble pas écarté, selon des représentants des associations de protection des consommateurs. Ainsi, la Fédération nationale de protection des consommateurs, pour ne citer que cette instance, tire la sonnette d’alarme. «Pour engraisser leurs bêtes, certains éleveurs continuent malheureusement d’utiliser des aliments prohibés.
Toutes les méthodes sont bonnes, ce qui constitue un danger pour la santé des consommateurs», déplore Bouazza Kherrati, vétérinaire et président de la fédération. L’an dernier déjà, cette instance avait dénoncé cette situation qui a fait couler beaucoup d’encre, au vu du nombre important des cas qui se sont déclarés au lendemain du sacrifice. Visiblement, les choses ne se sont pas arrangées. «On risque de constater d’autres affaires de putréfaction de viandes. Puisque la situation est toujours la même et rien n’a changé à ce niveau», selon le président de la fédération. Même les vétérinaires appellent à être vigilants. «La loi marocaine interdit l’utilisation des déchets quelque soit leur nature. Or, les déchets de la volaille, par exemple, sont toujours utilisés dans l’alimentation pour l’engraissement des ovins et des bovins.
Nous avons constaté que le nombre des unités qui s’adonnent à ce type d’alimentation par des déchets de volaille est important», dénonce la corporation des vétérinaires contactée par Les Inspirations ÉCO. Cette situation s’explique, selon eux, par le départ à la retraite de plusieurs agents chargés de contrôle à l’ONSSA. Depuis 2014, près de 70 % de ces agents de contrôle auraient quitté l’administration. «Il faut dire que l’ONSSA n’a pas les moyens humains et matériels pour faire ce travail de suivi au niveau de l’ensemble des unités d’élevage. Car il n’y a pas eu de recrutement de nouveaux agents pour renforcer les équipes d’inspection», renchérit le président de la fédération.
Pour les associatifs, la solution à ce problème d’alimentation reste l’application de la loi 28-07 relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires. Laquelle exige que, toutes les unités de production doivent être identifiées et qu’il y ait un système de traçabilité concernant notamment l’alimentation des ovins et bovins. «Certes, on a commencé l’identification des ovins et des bovins des grandes usines, mais pas encore celle des unités dont certaines s’adonnent à des pratiques illégales pour l’engraissement de leur bêtes», précise Kherrati, qui ne manquera pas de soulever également le problème de la contrebande. «Des animaux peuvent rentrer facilement des frontières avec la Mauritanie. La fédération a, à maintes reprises, demandé aux responsables d’y renforcer le contrôler et pourquoi pas de construire un mur au niveau de ces frontières, comme on a fait pour les frontières avec l’Algérie», conclut-il.
Du côté de l’Office national de la sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), on se veut rassurant. «Nous veillons à ce que tout le cheptel commercialisé avant et pendant la fête du sacrifice soit contrôlé.
Cela fait plus de dix ans que l’office procède à un contrôle rigoureux pour vérifier la qualité des animaux à sacrifier, et aussi pour contrôler la présence de certaines matières vétérinaires interdites dans les échantillons que nous prélevons», concluent des sources autorisées à l’office, lesquelles assurent que des prélèvements réguliers sont effectués, aussi bien au niveau des abattoirs que des souks.