Lutte contre le cancer : La prévention d’abord !

Le cancer est certainement la première cause de mortalité dans le monde. Au Maroc, elle touche environ 35.000 personnes/an. La maladie n’est pas incurable. Elle se soigne si elle est diagnostiquée à temps. C’est le message lancé par les oncologues, à l’occasion de la journée internationale de lutte contre le cancer, célébrée ce 4 février.
Le cancer, qualifié de «sale maladie» par les Marocains est-il dans tous les cas fatal? Aujourd’hui, cette pathologie peut être guérie. Cette maladie chronique, qui touche 35.000 personnes chaque année (selon le registre de Casablanca), est aujourd’hui bien prise en charge. «Dans les années 70, on arrivait à guérir 1 malade sur 5, c’est-à-dire 20% des patients. En 2015, on guérit 2 malades sur 3, ce qui équivaut à 70% des malades. L’autre bonne nouvelle, c’est que tout cancer localisé est curable à 95%», souligne Hassan Errihani, professeur d’oncologie au Centre hospitalier universitaire (CHU) de Rabat. Hassan Errihani est également aussi président de l’AMFROM (Association marocaine pour la formation et la recherche en oncologie médicale) & directeur du Diplôme national d’oncologie médicale de Rabat. Il faut dire qu’en matière de lutte contre le cancer, le Maroc a fait beaucoup de chemin.
Dans le fond, c’est le travail de l’Association Lalla Salma, fondée en 2005, qui a permis d’atteindre ces réalisations. D’ailleurs, l’Association, aujourd’hui élevée au grade de Fondation grâce à ses réalisations, a fêté ses 10 ans en 2015. Parmi les plus grands accomplissements de la Fondation, les médecins s’étalent particulièrement sur le volet relatif à l’équipement des hôpitaux. «À titre d’exemple, pendant les années 90, nous avions un seul accélérateur linéaire pour la radiothérapie à Rabat. En Tunisie, ils en avaient un aussi, mais rapporté à la population, le pays était meilleur que nous. Aujourd’hui, nous avons 35 appareils au Maroc, en total accord avec les standards internationaux en la matière, c’est-à-dire un accélérateur pour 1 million d’habitants», explique Hassan Errihani.
De plus, un grand travail a été accompli en termes d’humanisation des hôpitaux. «Si le service est détérioré, il est mis à niveau. Il y a eu également l’ouverture de plusieurs centres dans toutes les grandes villes du Maroc. Beni Mellal et Laâyoune sont les prochaines sur la liste. Il ne faut pas omettre la prise en charge et la disponibilité des médicaments pour les patients. Nous arrivons aujourd’hui à fournir aux patientes atteintes de cancer du sein des médicaments qui coûtent 50.000 DH. Les maisons de vie qui hébergent les malades ont également contribué au suivi du traitement pour éviter que les patients arrêtent leur traitement», déclare Errihani. Par ailleurs, la Fondation Lalla Salma a signé un partenariat avec l’entreprise pharmaceutique suisse Roche en vue de la mise à disposition de médicaments à prix préférentiels. Pour bénéficier de la prise en charge, le patient doit disposer du RAMED, d’une mutuelle CNOPS, CNSS ou autre. «Dans le cas contraire, il paie le traitement. Néanmoins, pour être pris en charge à l’hôpital, il faut nécessairement être démuni», déclare le professeur Abdellatif Ben Idder, chef du service d’oncologie au CHU Ibn Rochd de Casablanca et membre du comité scientifique de la Fondation Lalla Salma.
Au Centre d’oncologie de Casablanca, 3.000 patients sont admis chaque année. «Nous sommes débordés», lance Ben Idder. Le traitement médical d’un patient coûte à l’État entre 50.000 et 500.000 DH, voire plus, selon le Pr. Hassan Errihani.
Facteurs de risque
Au Maroc, les cancers les plus fréquents chez l’homme sont ceux du poumon (24%), de la prostate (8%), du lymphome (6%) et du larynx (5%). Chez la femme, c’est le cancer du sein qui vient en tête (36%) suivi du col utérin (13%), puis de la thyroïde (5%) et des ovaires (5%). Pour les spécialistes, la cigarette demeure la cause numéro 1 du cancer du poumon. «La cigarette donne 80% des cancers du poumon chez les fumeurs. Si on élimine la cigarette, on supprime 80% des cancers du poumon», assure le Pr Errihani.
D’ailleurs, la gente masculine demeure la plus touchée par le cancer. «Les hommes sont exposés à des facteurs de risque à l’instar de l’intoxication par alcool et le tabagisme sans compter l’exposition sur le plan professionnel, notamment industriel», détaille le Pr Abdellatif Ben Idder. Or, l’hérédité, très souvent évoquée, ne représente finalement que 5% des causes de la maladie. En clair, la solution c’est la prévention. Selon le professeur Hassan Errihani, le tabagisme est un gros facteur de risque. C’est pour quoi d’ailleurs la Fondation Lalla Selma s’est attaquée à la loi anti-tabac. «Nous faisons en effet du forcing pour voter la loi anti-tabac au Parlement.
Il y a quelques jours, nous avons tenu une réunion avec les parlementaires à Rabat pour débattre du problème du tabac en vue de les convaincre à finalement voter cette loi qui interdit de fumer dans les lieux publics», déclare Abdellatif Ben Idder. Le problème sera-t-il résolu pour autant? «À titre d’exemple, le cancer de la peau : le mélanome est le plus fréquent chez les patients de type européen à cause d’une exposition trop fréquente au soleil. Le cancer du colon est le plus fréquent à cause de la consommation excessive de viande rouge. La seule manière de diminuer les risques de cancer demeure le recours à une alimentation variée et une activité sportive régulière de 3 fois/semaine», dit Errihani. Par ailleurs, même les patients atteints de cancer, qui ont une activité physique régulière, ont moins de chance de récidiver en comparaison avec les sédentaires. En tout cas, malgré les 35.000 nouveaux cas de cancer chaque année, le Maroc s’est déjà mis à niveau pour accueillir et soigner ses malades. C’est le coeur même de la mission que s’estv assignée la Fondation Lalla Salma.