Attention à l’effet domino sur le social

Au-delà de la crise de croissance, les experts alertent sur les risques qu’engendre la persistance de cette décélération sur le contexte social. L’année 2016 étant une année électorale, les surenchères politiques pourraient conduire à l’immobilisme économique.
C’est le HCP qui le dit : «les conditions dans lesquelles démarrent la nouvelle année sont, par ailleurs, porteuses d’un contexte social où la problématique de la pauvreté et des inégalités sociales et territoriales devrait se poser avec une nouvelle acuité». Les autorités sont donc prévenues des risques que la situation actuelle peut engendrer sur le contexte social, qui semble déjà assez inquiétant au vu des différentes tensions qui surgissent un peu partout dans le pays, en mettant en cause la politique sociale du gouvernement. C’est du reste ce que concède l’économiste Jaidi pour qui: «Les risques de tensions sociales sont réelles surtout en cette année électorale». De ce fait et au-delà du gouvernement à qui incombe la responsabilité d’anticiper sur les conséquences qui peuvent survenir, le rôle des acteurs politiques et socioéconomiques, dans leur ensemble, refait surface. «Il y a un immobilisme politique face à cette situation», constate l’universitaire pour qui cet immobilisme conduira nécessairement à «un immobilisme économique». Cette appréhension de la situation rejoint les inquiétudes du FMI qui tout en faisant preuve de satisfaction vis-à-vis des réformes engagées par le Maroc, s’est inquiété des risques que peut engendrer le contexte électoral de cette année sur la mise en œuvre des réformes économiques.
Inflexions stratégiques
La conjoncture agricole a, de toute évidence, des répercussions sur la croissance économique mais fait aussi peser, dans l’immédiat, des menaces sérieuses sur l’état du cheptel et de l’emploi, du revenu et des conditions de vie des populations rurales. C’est du reste pour cette raison que le HCP penche pour des mesures urgentes destinées à relancer la production agricole et l’activité dans le monde rural. «Cela devrait susciter des inflexions sérieuses à la politique économique, financière et monétaire, autant qu’à la politique sociale». C’est dans une certaine mesure dans ce cadre qu’on pourrait inscrire les dernières orientations royales à destination du gouvernement afin d’apporter l’assistance nécessaire au monde rural. Dans une analyse plus large, Jean-Pierre Chauffour de la Banque mondiale s’alarme, lui, de la persistance des urgences parmi lesquelles se trouve le chômage des jeunes, qui conserve des proportions inquiétantes alors que des milliers de diplômés attendent chaque année aux portes du marché du travail. Les priorités sont légions mais dans l’urgence certains défis nécessitent plus qu’un plan de gestion de crise ; des mesures ciblées afin d’atténuer les tensions.
Feuille de route
En 2012, le gouvernement qui venait de prendre fonction avait trouvé sur son bureau un paquet de réformes à mettre en œuvre pour assainir la situation économique. Dans l’ensemble, les mesures préconisées faisaient consensus tant sur le plan interne qu’auprès des partenaires financiers internationaux comme le FMI, dont l’accompagnement et une couverture des risques ont été sollicités. Cette année aussi, il risque d’en aller de même avec la convergence des analyses sur les instruments disponibles pour l’État afin de faire face à la situation. Il s’agit notamment des politiques monétaire et budgétaire qui devraient permettre, à condition de faire preuve d’une meilleure coordination, d’atténuer la crise conjoncturelle et d’accélérer la transformation économique. Le débat reste ouvert, mais la feuille de route est toute tracée et pourrait être l’héritage de Benkirane.